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Marquises, Terre de Haïkus


Seegan Mabesone
Seegan Mabesone
TAHITI, le 8 août 2021 - Tandis que la sortie de L’île-Sirène, roman à paraître dans quelques semaines chez Haere Pō, se précise, l’auteur franco-japonais Seegan Mabesoone revient sur Haiku aux Marquises. Cet ouvrage, paru chez Pippa, passé inaperçu en Polynésie, reste disponible en librairie.

Laurent Mabesone, qui signe ses romans, poèmes et essais du nom Seegan Mabesone, a profité d’une résidence d’artiste à Hiva Oa de juillet 2019 à juin 2020. Deux projets sont nés de ce séjour : un recueil de haïkus intitulé Haïkus aux Marquises, paru chez Pippa en 2019 et un roman, L’Île-Sirène, annoncé pour cette fin d’année et édité chez Haere Pō.

Poésie minimaliste

Seegan Mabesoon, franco-japonais, vit au pays du soleil levant. Titulaire d’un DEA de littérature japonaise et d’un doctorat de littérature comparée, il est l’auteur de nombreux recueil de haïkus.

Le haïku est une forme fixe de la poésie traditionnelle japonaise, très populaire au Japon depuis l’époque d'Edo (le XVIIe siècle). Elle reste très populaire dans ce pays, puisqu’elle est pratiquée par environ dix millions de personnes, mais l’est devenue, depuis le début du XXe siècle, en France, en Grande-Bretagne, puis aux États-Unis… "On pratique dans presque toutes les langues cette ‘poésie minimaliste’", résume Seegan Mabesoon qui ajoute : "Minimaliste, mais non moins exigeante et profonde grâce à son ‘art du montage d'images concrètes’."

Pour Seegan Mabesoon qui s’inscrit dans une vision contemporaine du haïku contemporain, il est réducteur de considérer le haïku comme un "poème de l’instant, sauf peut-être pour certains auteurs d'obédience zen". D’autre part, il n'est pas indispensable de traiter de la nature, mais "il est vrai qu'un haïku émouvant résulte souvent d'un moment de communion profonde avec le cosmos".

D'ou l'intérêt, toujours selon l’auteur, d'en composer en Polynésie, car "on y ressent, dans mon cas au moins, la place minuscule de l'homme au sein de l'immensité de cette planète". Lors de son séjour à Hiva Oa, il avait prévu d’assurer des ateliers d’écriture de haïku, annulés finalement pour cause de Covid. Il espère concrétiser ce projet lors de sa venue au Salon du livre, en novembre.

Renaissance

À la fin de son séjour aux Marquises, les habitants l’appelaient "Laurent le poète". Ce qui fut "une renaissance, parce que je sentais que l'inspiration n'était plus là après une trentaine d'années passées au Japon. Tout est revenu." Seegan Mabesoon était redevenu "le petit garçon de dix ans qui, en 1978 en Normandie, avait décidé de devenir poète comme Verlaine et Rimbaud".

Il a passé les cinq premiers mois de son séjour à Hiva Oa à écrire 500 haïkus, en marchant tous les jours. Puis, il s’est plongé dans la rédaction d’un roman, L’Île-sirène. Il a rédigé ce texte d’abord en japonais, puis en français. Cet ouvrage devrait paraître à l’occasion du Salon du livre en novembre, édité par Haere Pō.

Une muse marquisienne

L’Île-Sirène est un conte moderne sur "le temps marquisien", une "histoire d'amour infinie en double spirale, comme les coquillages" qui s'étend sur deux générations, amour entre deux hommes et deux sirènes. C'est aussi un roman sur l’histoire de Hiva Oa, "telle qu'elle m'a été contée par les ‘vieux sages de l'ile’, la culture enata principalement, mais aussi des informations peu connues sur J. Brel, P. Gauguin." C’est un texte sur les essais nucléaires en Polynésie. Un parallèle est fait avec Hiroshima et la situation "post-Fukushima" au Japon. Seegan Mabesoon a organisé les premières manifestations antinucléaires dans ma ville à Nagano en 2011, avec son épouse japonaise. Mais, "toucher au problème du nucléaire est toujours très risqué". Cela lui a notamment coûté un poste universitaire

Dans la préface de l’ouvrage, l’auteur indique : "Il est des rencontres prédestinées. Comme la rencontre de ces hommes, partis en pirogues du sud-ouest du Pacifique il y a peut-être deux millénaires, avec ce qui allait devenir leur terre, la Terre des Hommes, œil de l’océan, nombril de la planète –plusieurs milliers de kilomètres plus loin… Ce destin qui relie l’Homme à la Terre, chacun peut le ressentir, le revivre en son for intérieur dès qu’il débarque aux Marquises. S’il sait rester humble devant le mystère, silencieux devant ces côtes austères".

Puis : "En juillet 2019, pour quelques raisons confuses et sans importance, je décidai de quitter le Japon pour un temps, après 25 années passées dans cet autre archipel. Je choisis les Marquises, comme beaucoup de néophytes, en souvenir de Jacques Brel. Dès mon arrivée, je compris que, pour moi au moins, la terre idéale pour composer des haïkus n’était pas –ou n’était plus?– le Japon. C’était ici que la muse m’attendait patiemment, peut-être depuis toujours, sur cette Terre des Hommes."

Seegan Mabesoon est rentré au Japon où il vit désormais de sa plume. Maigrement, mais heureusement. "J'ai retrouvé une inspiration beaucoup plus ample grâce aux Marquises, j'ai eu raison de ‘casser le temps’ avec cette année à Hiva Oa. Il faut toujours une faille pour que naisse un bourgeon."

Une femme me sourit

雨のあと花冠(フムヘイ)におう
娘(こ)の甘言

Ua koè te ūa
Te kekaa o te ùmuhei
Àtaata mai te vehine

La pluie s’arrête
Le parfum d’un ùmu hei
Une femme me sourit

Rédigé par Delphine Barrais le Dimanche 8 Août 2021 à 17:21 | Lu 2068 fois