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Un quatrième groupe en gestation à l’Assemblée


PAPEETE, 5 mai 2015 - Les élus pro-Fritch envisagent la création d’un nouveau groupe parlementaire dès jeudi. Les présidences des commissions législatives doivent nécessairement être réparties en préambule de la prochaine séance de la session administrative de l'Assemblée.

Les élus frondeurs du Tahoera'a songent à provoquer la création d’un nouveau groupe d’au moins 14 représentants, dès jeudi, à l’entame de la deuxième séance de la session administrative de l’Assemblée.

Ce groupe parlementaire, que devrait présider Sylvana Puhetini, serait de fait partie-prenante dans la répartition des commissions intérieures de l’appareil législatif polynésien. Et, au gré des arrangements qu’ils mettront en place avec les groupes d’opposition, les frondeurs du Tahoera’a pourraient s’octroyer par ce biais les commissions de l’Economie, des institutions, de la Santé et probablement cinq des neuf commissions législatives à Tarahoi. Les autres commissions seraient alors laissées aux groupes d’opposition, en contrepartie de l'entente.

Ce Gentleman agreement sonnerait le glas de l’influence des pro-Flosse sur le travail parlementaire à Tarahoi, agravée par la perte d’initiative dans la commission de contrôle budgétaire et financier (CCBF) et sur la commission permanente, dont les membres sont désignés à la représentation proportionnelle des groupes, selon le système de la plus forte moyenne.

Mais pour l’instant rien n’est encore fait. "La décision sera prise jeudi matin", explique la représentante orange Sylvana Puhetini. "On s’interroge encore".

Le Tahoera'a Huira'atira tient ce mercredi soir un conseil politique à Erima officiellement pour faire le bilan des sénatoriales partielles ; mais il est probable que cette perspective sera abordée également, au moins pour convaincre les 24 élus encore fidèles à Gaston Flosse de le demeurer.

Depuis lundi, ils sont activement sollicités par les représentants frondeurs. "Il y en a quelques uns qui ont le cul entre deux chaises", constate sans détour un observateur de la vie politique locale.

"Une vaste opération de harcèlement s’est mise en route dès dimanche soir, dont sont victimes les élus du Tahoera’a Huiraatira. Plusieurs d’entre eux ont été convoqués à la présidence. Maniant la carotte et le bâton, le président Edouard Fritch tente de les courtiser (...)", dénonce un communiqué transmis en fin d'après-midi, mardi. "Le Tahoera’a Huiraatira exige que cessent immédiatement ces pressions insupportables sur nos élus. En accord avec les personnes concernées, il n’écarte pas de porter plainte pour chantage et harcèlement".

L’enjeu des élus pro-Fritch est non seulement de constituer une force nouvelle à l’Assemblée mais surtout de s’assurer qu’elle puisse réunir idéalement 21 représentants orange à terme, de manière à n’avoir à composer qu’avec les huit élus du bloc A Ti’a Porinetia pour parvenir à la majorité de 29.

Edouard Fritch a volontiers répondu à plusieurs questions à ce sujet, mardi matin en marge du comité de pilotage du contrat de projets Etat-Pays-Communes.

"On est dans un environnement politique. Et là, on parle de moyens", analyse de son côté Marcel Tuihani, en revenant sur l'enjeu des commissions intérieures. "Un président de commission dispose de moyens financiers pour pouvoir exercer ses fonctions. (…) A mon sens nous sommes encore dans une vision purement politicienne qui vise à désorganiser le fonctionnement du Tahoera’a Huira’atira, pour amorcer un processus qui tend à remettre en cause la gouvernance du parti", estime aussi ce très proche de Gaston Flosse.

Il se trouve en effet que chaque représentant sortant du groupe Tahoera’a emportera avec lui son allocation mensuelle en crédits collaborateurs. Sur celle-ci, chaque élu reverse mensuellement une part de 264.000 Fcfp au groupe orange. Et cette contribution est triple lorsqu’il s’agit d’un président de commission législative. La constitution d’un nouveau groupe de 14 élus, conjuguée avec la perte de toutes les présidences de commission législatives, coûterait ainsi un peu plus de 101 millions Fcfp au groupe Tahoera’a, en année pleine.

C'est-à-dire qu’en plus de priver les pro-Flosse de l’initiative sur les orientations législatives de l’Assemblée, en isolant un peu plus leur leader historique, ce nouveau groupe contribuerait activement à diminuer les moyens financiers du groupe Tahoera’a.

"Nous allons nous retrouver à l’Assemblée avec quatre groupes politiques sans qu’il n’y ait de véritable majorité", redoute Marcel Tuihani. "Je ne suis pas certains que cette perspective serve vraiment les intérêts de la collectivité. En politique, il faut travailler dans l’intérêt général".

Qu'importe, les frondeurs du Tahoera’a gonflent aujourd'hui leur assurance à la lueur du camouflet infligé dimanche au camp Flosse par les grands électeurs de Polynésie française.

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Mardi 5 Mai 2015 à 17:03 | Lu 2635 fois