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Rome crie victoire après le feu vert espagnol à l'accueil d'un navire de migrants


Rome, Italie | AFP | lundi 11/06/2018 - L'Italie a crié victoire lundi après l'accord de l'Espagne pour accueillir un navire chargé de 629 personnes secourues en Méditerranée, obtenant ainsi gain de cause dans sa lutte pour réduire les arrivées de migrants sur ses côtes.

"VICTOIRE", a lancé en majuscules sur Twitter le ministre italien de l'Intérieur, Matteo Salvini, également patron de la Ligue (extrême droite), après deux jours de crise en plein milieu de la Méditerranée et un bras de fer entre l'Italie et Malte.
Le sort de ce navire affrété par l'ONG française SOS Méditerranée restait cependant incertain dans l'après-midi. Le navire, l'Aquarius, n'avait toujours pas fait savoir s'il comptait faire route vers l’Espagne, distante de quelque 1.300 km - soit au moins quatre jours, selon des estimations de l'AFP -, dans l'attente d'un ordre du centre de coordination des secours de Rome.
La proposition espagnole "est encourageante, cela montre qu'il y a des Etats sensibles à l'urgence humanitaire", a déclaré à l'AFP Sophie Beau, directrice générale de l'ONG SOS Méditerranée.
Soulignant la distance importante à parcourir jusqu'à l'Espagne, Mme Beau a assuré que "demain on n'aura plus de nourriture sauf des biscuits énergétiques". Il règne une chaleur torride dans les cales du navire, où se trouvent une partie des migrants, notamment les femmes, avait indiqué auparavant la journaliste Annelise Borges, qui se trouve à bord de l'Aquarius
Le Premier ministre maltais, Joseph Muscat, qui a également remercié l'Espagne, a promis d'acheminer des vivres sur l'Aquarius distant de 55 km des côtes maltaises. 
M. Salvini, à la manoeuvre depuis le début de cette crise en Méditerranée, la première depuis l'arrivée au pouvoir de la Ligue et du Mouvement cinq étoiles (M5S, antisystème), a prévenu les autres ONG qu'elles seraient traitées de la même manière. Autrement dit, "nous fermons les ports", comme le rappelle le hashtag sur Twitter sous lequel communique M. Salvini.
"Nous avons ouvert un front en Europe", s'est-il félicité. "L'Italie n'est plus seule", a renchéri le chef de gouvernement italien, Giuseppe Conte, évoquant un "tournant important". L'Italie, qui a vu quelque 700.000 migrants débarquer sur ses côtes depuis 2013, a régulièrement accusé, y compris lorsque le gouvernement était à majorité de centre gauche, les Européens d'avoir détourné la tête et de l'avoir laissée seule face à la crise migratoire.

 - Bras de fer -

 
La Commission européenne avait souhaité lundi un "règlement rapide" de ce bras de fer en Méditerranée, tout comme un porte-parole du gouvernement allemand, qui en avait appelé au devoir "humanitaire" et au sens de la responsabilité de toutes les parties.
Le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés s'était montré plus direct en enjoignant Malte et l'Italie à autoriser "immédiatement" le débarquement de ces 629 migrants, dont sept femmes enceintes, 11 enfants en bas âge et 123 mineurs isolés.
Ces appels réitérés n'ont pas ébranlé le nouveau ministre de l'Intérieur, également vice-président du Conseil des ministres, et qui s'impose jour après jour comme l'homme fort de la politique italienne.
"Sauver des vies est un devoir, transformer l'Italie en un énorme camp de réfugiés, non. L’Italie en a fini de courber l'échine et d'obéir, cette fois IL Y A QUELQU'UN QUI DIT NON", a-t-il assuré sur Twitter, le mode de communication qu'il affectionne.
C'est la première fois depuis l'arrivée au pouvoir de la coalition Ligue-M5S que l'Italie bloque ainsi ses ports. Matteo Salvini avait fait campagne avant les législatives sur le thème de la fermeture des frontières aux migrants, et prévenu qu'une fois au pouvoir, il ferait tout pour empêcher ces débarquements, particulièrement lorsqu'ils sont le fait des ONG qui patrouillent au large de la Libye.
Mais comme cela a été le cas encore ce week-end, l'Aquarius a aussi récupéré des migrants sauvés par d'autres navires présents sur zone, y compris par des vedettes des garde-côtes italiens.
Malte avait confirmé dès dimanche soir son refus après un communiqué italien lui enjoignant d'accueillir l'Aquarius.
Le Premier ministre maltais, Joseph Muscat, s'en est entretenu au téléphone avec le chef du gouvernement italien Giuseppe Conte. "Malte agit en pleine conformité avec ses obligations internationales", mais "ne recevra pas le navire en question dans ses ports", avait alors annoncé le gouvernement maltais.
Le ministre italien de l'Intérieur et son homologue des Transports, Danilo Toninelli, dont dépendent les garde-côtes italiens, avaient jugé que Malte ne pouvait "pas continuer à regarder ailleurs lorsqu'il s'agit de respecter des conventions internationales précises sur la protection de la vie humaine".

le Lundi 11 Juin 2018 à 06:08 | Lu 189 fois