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Haute tension en altitude dans l'Himalaya entre la Chine et l'Inde


Pékin, Chine | AFP | jeudi 27/07/2017 - Les armées indienne et chinoise observent depuis un mois un face-à-face crispé dans une zone frontalière contestée, sur un plateau himalayen stratégique, envenimant les tensions entre Pékin et New Delhi, mais aussi entre la Chine et le petit royaume du Bhoutan.

A l'ouest du Bhoutan et à l'est de l’État indien du Sikkim, le plateau himalayen du Doklam - également appelé Donglang par la Chine - est le théâtre depuis mi-juin d'une vive confrontation après la mise en chantier d'une route par l'armée chinoise.

La Chine soutient que cette construction se déroule sur son territoire, ce que contestent l'Inde et le Bhoutan - qui s'inquiètent ouvertement du renforcement de la présence militaire chinoise dans la région.

Le déploiement par l'Inde de troupes armées pour interrompre le chantier a rapidement fait monter la tension.

"La solution à ce problème est simple : il faut que les troupes indiennes se retirent", a asséné cette semaine Wang Yi, le ministre chinois des Affaires étrangères, avant la visite à Pékin d'un haut responsable de la sécurité nationale de l'Inde.

"Il est plus aisé d'ébranler une montagne que de faire reculer l'Armée populaire de libération (chinoise)", a renchéri Wu Qian, porte-parole du ministère de la Défense du régime communiste.

Mais New Delhi ne semble guère disposé aux concessions : "La Chine étend son influence à travers l'Himalaya jusqu'à chez nous et ce bien qu'elle dispose (déjà) d'une économie cinq fois supérieure à la nôtre", s'est désolé mardi Sarath Chand, chef adjoint de l'armée indienne.

"Avec des forces d'une telle ampleur... Cela va rester une menace pour des années", prédit-il.

- Stratégique 'Cou-de-Poulet' -
La vallée tibétaine de Chumbi, où se situe la hauteur contestée du Doklam, est stratégiquement sensible pour l'Inde.

Elle n'est située qu'à quelques dizaines de kilomètres du couloir de Siliguri, étroite bande de terre surnommée "Cou-de-poulet" et unique jonction territoriale pour New Delhi entre les plaines du nord et ses États du nord-est.

"L'Inde perçoit la construction de cette route comme une menace, car (les Chinois) mettent fin au statu quo sur ce territoire disputé", déclare à l'AFP Shen Dingli, vice-président de l'Institut d'études internationales de l'université Fudan à Shanghai.

Pour le colonel de l'armée chinoise Zhao Xiaozhuo, ces craintes sont "ridicules" : "L'Inde ne considère que l'usage militaire des infrastructures frontalières, avec peu d'égards sur leur rôle économique", a-t-il plaidé dans le quotidien officiel China Daily.

Ailleurs, Pékin conteste également la souveraineté de l'Inde sur son État de l'Arunachal Pradesh, pour lequel les deux pays s'étaient livré une guerre-éclair en 1962.

Quant au Doklam, "il fait partie du territoire chinois depuis des temps anciens", selon Pékin, qui accuse les troupes indiennes d'avoir franchi une frontière établie dans un accord de 1890 négocié par... la Grande-Bretagne.

Le Bhoutan, allié de l'Inde et qui n'entretient pas de relation diplomatique avec Pékin, reste spectateur, mais se voit ciblé par "un lobbying pro-Pékin", à en croire Jayadeva Ranade, directeur du Centre d'analyse et de stratégie sur la Chine, à New Delhi.

"Le Bhoutan est limité sur ce qu'il peut faire directement : il a protesté contre la Chine, émis des notes, mais que peut-il faire de plus ?", remarque-t-il.

- Pression interne -
Face aux intenses pressions des "nationalistes" dans leurs pays respectifs, ni le président chinois Xi Jinping (à l'approche d'un crucial congrès du Parti communiste), ni le Premier ministre indien Narendra Modi ne peut céder, estime Huang Jing, expert des relations sino-indiennes à l'Université nationale de Singapour.

"La situation est très tendue. Je ne pense pas que la Chine aura le choix si les troupes indiennes ne bougent pas ; Xi devra démontrer au peuple chinois qu'il tient parole", indique M. Huang à l'AFP.

De son côté, l'Inde redoute que l'essor du réseau commercial et militaire chinois dans l'Océan Indien ne sape son statut géopolitique et s'alarme du couloir économique Chine-Pakistan -lequel donnera à Pékin un accès à la mer d'Arabie... en traversant la zone disputée du Cachemire.

Le face-à-face actuel prouve en tout cas la volonté indienne de résister : "C'est un message pour les autres pays dans la région" face à une Chine qui se présentait en puissance que "personne ne défiait", observe M. Ranade.

yan/jug/ole

Rédigé par () le Jeudi 27 Juillet 2017 à 05:31 | Lu 441 fois