PELALAWAN, 4 juillet 2013 (AFP) - "Le brûlage, c'est obligatoire. Qui voudrait couper ces arbres? Ils sont énormes": chaque année à la saison sèche, des forêts vierges d'Indonésie partent en fumée, au détriment de l'environnement et de la santé humaine. Mais la tradition est plus forte que la raison.
Le sol était encore chaud et fumant quand Saparina a planté ses épinards dans ce qui était auparavant une jungle primaire. "Merci Allah. Je peux maintenant planter mes légumes et mes palmiers à huile", lance l'agricultrice de 36 ans.
Sur l'île de Sumatra, comme dans d'autres régions d'Indonésie, la saison sèche est chaque année l'occasion de déforester en incendiant des centaines d'hectares pour laisser place à diverses cultures, mais surtout des palmiers à huile.
Les pieds dans la cendre chaude jusqu'aux chevilles, Saparina assure ne pas être la responsable de l'incendie qui n'a laissé sur son petit terrain d'un demi-hectare que des moignons de troncs calcinés. Mais elle ne cache pas sa joie quand elle voit ce que les flammes ont réussi à défricher en quelques heures. Il lui aurait fallu beaucoup plus de temps, même avec des équipements lourds qu'elle ne possède de toute façon pas.
La pratique fait s'envoler en fumée une des biodiversités les plus riches de la planète, libérant d'importantes quantités de CO2 dans l'atmosphère. Mais elle a également le don d'enflammer les relations entre l'Indonésie et ses voisins.
Poussé par les vents, l'épaisse fumée âcre ainsi dégagée s'invite dans la toute proche Singapour ou la Malaisie. Le problème a été particulièrement aigu cette année, provoquant une pollution record qui a été jusqu'à menacer la santé humaine.
A Singapour, l'indice de qualité de l'air a atteint un niveau susceptible de poser un danger pour la vie des personnes âgées et des malades. Et à Riau (Sumatra), où les feux courent, près de 20.000 personnes ont souffert en juin de difficultés respiratoires, selon les responsables sanitaires locaux.
Les coupables sont variés, selon les écologistes: des fermiers qui veulent nettoyer leur terrain, des gens payés pour craquer une allumette dans une concession appartenant à une grande compagnie, ou les grands planteurs de palmiers à huile.
La demande croissante dans le monde pour l'"or rouge", l'huile de palme, entrant dans la composition de nombreux biens de consommation courants, des biscuits ou pâtes à tartiner aux savons ou rouges à lèvres, encourage l'expansion rapide des plantations et la déforestation.
Huit planteurs font actuellement l'objet d'un enquête à Riau, une province de l'île de Sumatra où se situe la majorité des feux. Les groupes concernés ont tous démenti, assurant respecter une stricte interdiction de la culture sur brûlis, tout en accusant les petits propriétaires terriens voisins d'être les incendiaires.
A Pelalawan, personne bien entendu n'avouera mettre le feu à la forêt. Mais on est plus disert sur les mérites d'une pratique pourtant nocive.
"Le brûlage, c'est obligatoire", assure le propriétaire d'une petite plantation de palmiers à huile qui ne donnera que son prénom, Herman. "Qui voudrait couper ces arbres? Ils sont énormes".
"Il suffit d'un mégot de cigarette pour faire partir un énorme incendie, surtout lors de la saison sèche", révèle-t-il.
Une fois allumé, le feu est très difficile à éteindre : les flammes couvent dans la tourbière qui fait le lit de la forêt, et est épaisse de plusieurs mètres. "Elles voyagent comme de l'eau sous nos pieds. On n'a pas idée d'où le feu peut réapparaître et brûler à nouveau en surface", explique Herman.
C'est un moyen rapide et bon marché de déforester, bien plus que les excavateurs et bulldozers, et la cendre fertilise les terres, estiment les fermiers locaux.
Alors même si elle avoue que ses enfants "toussent" en raison de la pollution, Saparina soutient la pratique, tout en se défendant d'y recourir elle-même.
La loi existe pourtant: elle punit les incendiaires d'une peine minimale d'un an de prison mais elle est rarement appliquée, comme c'est souvent le cas en Indonésie.
Le problème est récurrent, mais cette année les incendies ont été les pires depuis 1997-98, poussant Jakarta à réagir.
24 petits exploitants agricoles ont été inculpés. La police enquête sur la possibilité qu'ils aient pu travailler pour de puissantes compagnies, même si aucun nom de grand groupe n'a été officiellement publié.
"Nous avons essayé d'abolir cette tradition mais c'est impossible", laisse tomber Willem Rampangilei, vice-ministre des Affaires sociales.
Les écologistes mettent en cause l'échec de la politique indonésienne de protection de la forêt: la moitié des terres qui ont brûlé cette année étaient censées être protégées par le moratoire interdisant tout défrichage de la forêt primaire indonésienne.
"La poursuite du brûlage n'est que la pointe émergée de l'iceberg", estime Yuyun Indradi, de chez Greenpeace Indonésie.
Le sol était encore chaud et fumant quand Saparina a planté ses épinards dans ce qui était auparavant une jungle primaire. "Merci Allah. Je peux maintenant planter mes légumes et mes palmiers à huile", lance l'agricultrice de 36 ans.
Sur l'île de Sumatra, comme dans d'autres régions d'Indonésie, la saison sèche est chaque année l'occasion de déforester en incendiant des centaines d'hectares pour laisser place à diverses cultures, mais surtout des palmiers à huile.
Les pieds dans la cendre chaude jusqu'aux chevilles, Saparina assure ne pas être la responsable de l'incendie qui n'a laissé sur son petit terrain d'un demi-hectare que des moignons de troncs calcinés. Mais elle ne cache pas sa joie quand elle voit ce que les flammes ont réussi à défricher en quelques heures. Il lui aurait fallu beaucoup plus de temps, même avec des équipements lourds qu'elle ne possède de toute façon pas.
La pratique fait s'envoler en fumée une des biodiversités les plus riches de la planète, libérant d'importantes quantités de CO2 dans l'atmosphère. Mais elle a également le don d'enflammer les relations entre l'Indonésie et ses voisins.
Poussé par les vents, l'épaisse fumée âcre ainsi dégagée s'invite dans la toute proche Singapour ou la Malaisie. Le problème a été particulièrement aigu cette année, provoquant une pollution record qui a été jusqu'à menacer la santé humaine.
A Singapour, l'indice de qualité de l'air a atteint un niveau susceptible de poser un danger pour la vie des personnes âgées et des malades. Et à Riau (Sumatra), où les feux courent, près de 20.000 personnes ont souffert en juin de difficultés respiratoires, selon les responsables sanitaires locaux.
Les coupables sont variés, selon les écologistes: des fermiers qui veulent nettoyer leur terrain, des gens payés pour craquer une allumette dans une concession appartenant à une grande compagnie, ou les grands planteurs de palmiers à huile.
La demande croissante dans le monde pour l'"or rouge", l'huile de palme, entrant dans la composition de nombreux biens de consommation courants, des biscuits ou pâtes à tartiner aux savons ou rouges à lèvres, encourage l'expansion rapide des plantations et la déforestation.
Huit planteurs font actuellement l'objet d'un enquête à Riau, une province de l'île de Sumatra où se situe la majorité des feux. Les groupes concernés ont tous démenti, assurant respecter une stricte interdiction de la culture sur brûlis, tout en accusant les petits propriétaires terriens voisins d'être les incendiaires.
A Pelalawan, personne bien entendu n'avouera mettre le feu à la forêt. Mais on est plus disert sur les mérites d'une pratique pourtant nocive.
"Le brûlage, c'est obligatoire", assure le propriétaire d'une petite plantation de palmiers à huile qui ne donnera que son prénom, Herman. "Qui voudrait couper ces arbres? Ils sont énormes".
"Il suffit d'un mégot de cigarette pour faire partir un énorme incendie, surtout lors de la saison sèche", révèle-t-il.
Une fois allumé, le feu est très difficile à éteindre : les flammes couvent dans la tourbière qui fait le lit de la forêt, et est épaisse de plusieurs mètres. "Elles voyagent comme de l'eau sous nos pieds. On n'a pas idée d'où le feu peut réapparaître et brûler à nouveau en surface", explique Herman.
C'est un moyen rapide et bon marché de déforester, bien plus que les excavateurs et bulldozers, et la cendre fertilise les terres, estiment les fermiers locaux.
Alors même si elle avoue que ses enfants "toussent" en raison de la pollution, Saparina soutient la pratique, tout en se défendant d'y recourir elle-même.
La loi existe pourtant: elle punit les incendiaires d'une peine minimale d'un an de prison mais elle est rarement appliquée, comme c'est souvent le cas en Indonésie.
Le problème est récurrent, mais cette année les incendies ont été les pires depuis 1997-98, poussant Jakarta à réagir.
24 petits exploitants agricoles ont été inculpés. La police enquête sur la possibilité qu'ils aient pu travailler pour de puissantes compagnies, même si aucun nom de grand groupe n'a été officiellement publié.
"Nous avons essayé d'abolir cette tradition mais c'est impossible", laisse tomber Willem Rampangilei, vice-ministre des Affaires sociales.
Les écologistes mettent en cause l'échec de la politique indonésienne de protection de la forêt: la moitié des terres qui ont brûlé cette année étaient censées être protégées par le moratoire interdisant tout défrichage de la forêt primaire indonésienne.
"La poursuite du brûlage n'est que la pointe émergée de l'iceberg", estime Yuyun Indradi, de chez Greenpeace Indonésie.