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Elisabeth Borne, de Matignon à l'Education, pour retrouver les premiers rangs


Bertrand GUAY / AFP
Bertrand GUAY / AFP
Paris, France | AFP | lundi 23/12/2024 - Élisabeth Borne revient au gouvernement moins d'un an après avoir quitté Matignon, avec le rang de ministre d’État chargée de l’Éducation nationale dans l'équipe de François Bayrou, et un rôle politique à réinventer après avoir échoué à prendre la tête du parti Renaissance.

Mme Borne et Manuel Valls, qui retrouve également un maroquin à l'Outremer, deviennent les cinquième et sixième Premiers ministres à reprendre des responsabilités ministérielles après leur départ de Matignon, après Michel Debré, Laurent Fabius, Alain Juppé et Jean-Marc Ayrault.

Mais le retour aux affaires de Mme Borne aura été le plus rapide. Depuis son départ le 9 janvier 2024, trois autres Premiers ministres se sont succédé à Matignon. Du jamais vu sous la Ve République.

L'ancienne préfète de région venait d'y passer vingt mois. "Lorsque je quitte mes fonctions", écrit-elle dans un livre récent, "le bilan dont certains me créditent me sidère encore: j'ai +tenu+ plus longtemps qu’Édith Cresson!"

"Il existe deux catégories de Premier ministre: les vrais, les hommes. Et les autres, les femmes". Or "j'ai aussi tenu plus longtemps que Bernard Cazeneuve. J'ai tenu plus longtemps que Pierre Bérégovoy. J'ai tenu aussi plus longtemps que Laurent Fabius", ajoute-t-elle dans ce livre où elle dénonce le "sexisme" dont "toutes les femmes qui s'engagent en politique" sont "victimes".

Élisabeth Borne a longtemps dû endurer la comparaison avec l'unique femme l'ayant précédée à ce poste, dont le bail à Matignon (10 mois) était le plus court de l'histoire de la Ve République. Mais c'était avant la dissolution, avant le départ de Gabriel Attal (8 mois) et avant l'échec de l'expérience Michel Barnier (3 mois).

Nommée en mai 2022 après la réélection d'Emmanuel Macron, son séjour rue de Varenne aurait pu être plus court encore lorsque, fragilisée d'emblée par la perte de la majorité absolue à l'Assemblée, elle a vu d'importants soutiens du président plaider pour son remplacement par un profil "plus politique". Au premier rang desquels un certain François Bayrou.

Les rapports n'étaient donc pas au beau fixe entre la Première ministre et le Haut-Commissaire au Plan, qui ne s'est pas non plus privé de critiquer sa méthode pour la réforme des retraites finalement adoptée au 49.3, Mme Borne échappant de peu à la censure.

Mais depuis, écrit-elle, "je me suis rapprochée intellectuellement de ce qu'il représente". "Le patron du MoDem ne dévie jamais d'une ligne centriste et dispose d’une expérience incontestable, y compris celle de traversées du désert qui disent beaucoup d'une personnalité".

- "Au bout de vos rêves" -

Après Matignon, Élisabeth Borne est allée siéger à l'Assemblée. Elle n'avait jamais été élue avant sa nomination comme Première ministre. Elle a sauvé son siège après la dissolution et le retrait au second tour du candidat de La France insoumise face au Rassemblement national.

Des discussions avaient été engagées, selon plusieurs sources, pour un rapprochement avec le MoDem. Mais la députée du Calvados s'est finalement déclarée candidate à la direction de Renaissance, le parti d'Emmanuel Macron. Avant de renoncer trois mois plus tard en nouant un accord avec l'indéboulonnable Gabriel Attal.

Mme Borne a pris la présidence du Conseil national, sorte de parlement du parti, bien décidée à le faire plancher sur les aspects programmatiques. Mais son nom circulait pour un retour au gouvernement dès avant la nomination de François Bayrou.

Son profil de macroniste venue de la gauche --elle fut conseillère de Lionel Jospin, puis directrice de cabinet de Ségolène Royal-- semblait presque indispensable pour un nouveau Premier ministre en quête d'un gouvernement élargi, mais qui se heurte au refus de participation du Parti socialiste.

Trois fois ministre aux Transports, à l’Écologie et au Travail, elle avait dédié sa nomination à Matignon "à toutes les petites filles": "Allez au bout de vos rêves".

Une réussite exceptionnelle pour cette femme, née Bornstein, dont la vie a basculé avec le suicide, quand elle avait 11 ans, de son père, un ancien résistant de confession juive qui ne s'était jamais remis de la déportation.

Née le 18 avril 1961 à Paris, "pupille de la nation" et polytechnicienne, cette ingénieure fut aussi préfète de la région Poitou-Charentes en 2013 et présidente de la RATP de 2015 à 2017. Elle a également fait un court passage dans le privé, chargée des concessions du groupe Eiffage en 2007, avant de rejoindre la mairie de Paris comme directrice de l'urbanisme.

Divorcée et mère d'un garçon, elle est aussi surnommée "Borne out" dans les couloirs des ministères pour sa dureté supposée envers ses collaborateurs. Mais fait l'unanimité pour sa maîtrise des dossiers.

le Lundi 23 Décembre 2024 à 09:17 | Lu 201 fois