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​La justice restaurative, une “justice parallèle”


Catherine Rossi à l'UPF le 18 novembre.
Catherine Rossi à l'UPF le 18 novembre.
Tahiti, le 18 novembre 2022 – Le service pénitentiaire d'insertion et de probation et l'Association polyvalente d'actions socio-judiciaires ont organisé vendredi une conférence à l'UPF sur le thème de “justice réparatrice et justice pénale : Forces et défis d'une collaboration grandissante”. À cette occasion, la professeure de droit canadienne, Catherine Rossi, est longuement revenue sur le concept de justice restaurative – ou réparatrice – qui vise à instaurer un dialogue entre les auteurs et les victimes d'infractions. 

Catherine Rossi, professeure et chercheuse à l'École de travail social et de criminologie de l'université Laval au Québec, a animé vendredi une conférence à l'université de Polynésie française sur le thème “Justice réparatrice et justice pénale : Forces et défis d'une collaboration grandissante”. Cette conférence, organisée à l'initiative du service pénitentiaire d'insertion et de probation (SPIP) et l'Association polyvalente d'actions socio-judiciaires (APAJ), avait pour objet le principe de justice dite "restaurative" ou "réparatrice". Un concept apparu au Canada dans les années 1970 qui prévoit la mise en place d'échanges entre les victimes et auteurs d'infractions afin d'instaurer un dialogue permettant la reconstruction des individus ou leur apaisement. 

Comme l’explique Catherine Rossi, la justice réparatrice est “une forme de justice parallèle à la justice pénale classique qui vient faire autre chose”. Elle précise : “Alors que la justice pénale est concentrée sur la sécurité, le grand public et l'ordre social, la justice réparatrice est créée pour les gens, pour que les personnes qui sont impliquées dans un acte criminel – accusés ou victimes – puissent aller obtenir ce dont elles ont besoin en termes d'honneur, de réparation, de réponse à leurs questions, de retour dans leur communauté.”

Besoin de se confronter

Forte de sa longue expérience dans le domaine, Catherine Rossi rappelle que le “dialogue” est ce qui est le plus souvent demandé par les victimes et auteurs d'infractions : “Il y a des questions restées sans réponse ; des besoins de se confronter ou d'avoir le dernier mot car quand un infracteur agresse une victime, il a le dernier mot d'une conversation conflictuelle. Il s'agit parfois de recréer un lien, de savoir ce que l'on va faire après. Une grande majorité des situations criminelles ont lieu à l'intérieur de la famille ou de l'entourage proche et cela a des conséquences cataclysmiques sur le milieu social. C'est sur cela que l'on travaille, nœud par nœud, petit bout par petit bout.”

En Polynésie, c'est l'Apaj, l’Association polyvalente d’actions judiciaires, qui mène les actions de médiation restaurative. Tel que l'explique sa directrice, Cécile Moreau, cela permet d'offrir “un espace de dialogue” aux victimes et auteurs d'infractions : “Il y a visiblement un besoin de reprendre contact, de comprendre certaines choses qui n'ont pas pu être expliquées ou dites pendant la procédure entre les auteurs et les victimes. Car les enjeux durant la procédure sont différents. Il y a l'enjeu de la culpabilité, l'enjeu de la peine mais il y aussi l'influence, parfois, de certains avocats qui estiment qu'il ne serait pas opportun de jouer totalement la transparence. Nous sommes donc dans un cadre où l'on ne peut pas prendre la parole librement et répondre du tac au tac avec spontanéité.” Récemment, l'Apaj a mené une action de médiation restaurative entre un homme condamné il y a plusieurs années pour le viol de sa fille et une jeune femme qui a été victime d'inceste durant son enfance. Si cette action est encore en cours d'évaluation, Cécile Moreau se félicite du fait que les “premiers retours” soient “positifs”.
 

Rédigé par Garance Colbert le Vendredi 18 Novembre 2022 à 18:43 | Lu 1329 fois