Tahiti Infos

​L’opacité de la commission de décolonisation demeure


Tahiti le 21 août 2024. La commission spéciale de décolonisation demeure une énigme au sein de l'assemblée de la Polynésie française. Ses comptes-rendus, malgré la décision du Conseil d'Etat, demeurent impossibles à consulter.


Récemment, le Conseil d’Etat, interrogé par les élus de l’opposition à l’assemblée de la Polynésie française, s’était prononcé sur la légitimité de la commission spéciale sur la décolonisation créée à la demande du président de l’institution, Antony Géros. Si dans sa constitution, le Conseil d’Etat n’avait rien trouvé à redire, il avait cependant stipulé que "les comptes rendus des réunions des commissions sont communicables à toute personne qui en fait la demande en application et dans le respect des dispositions du Titre V du Livre V du code des relations entre le public et l'administration."

C’est donc fort de cette légitimité que Tahiti Infos a demandé à consulter ces comptes-rendus.

Après deux semaines d’attente et de relances diverses, c’est un refus qui est arrivé dans nos boîtes mails mardi soir. "Faisant suite à votre demande de consultation des comptes rendus de la commission spéciale sur la décolonisation, nous vous informons que conformément au point 5 de l’article 68-9 de la délibération n° 2005-59 APF du 13 mai 2005 portant règlement intérieur de l’assemblée de la Polynésie française, « les travaux de la commission ne sont pas publics", explique le bureau de la communication de Tarahoi.

Une explication hasardeuse puisqu’il ne s’agissait pas là pour votre quotidien d’assister aux séances, mais bien d’en consulter ses comptes-rendus comme chaque élu et chaque électeur serait en droit de demander.

"Toutefois, un compte rendu de chaque réunion de commission est établi. Il est signé par le président de la commission et diffusé aux seuls membres de la commission ayant voix délibérative", poursuit le mail. Autrement dit, dès lors qu'ils n'y siègent pas, les élus de l’opposition comme ceux de la majorité n’ont pas l’autorisation de consulter ces comptes-rendus, rendant totalement opaques les décisions qui y sont prises, et les éventuels crédits qui y seraient débloqués pour d’éventuelles missions.

Enfin, cerise sur le gâteau, "pour votre information", rappelle le service communication, "un article est publié sur le site internet de l’assemblée après chaque réunion."

Nous nous sommes donc rendus sur le site de l’assemblée afin de consulter cet article sur la réunion de la commission qui s’est tenue ce lundi. En tout et pour tout, six photos ont été mises en ligne, sans même une explication sur les motifs de cette réunion et son ordre du jour. Plus tard dans la journée, des explications étaient pourtant mises en ligne. On y apprenait que cette réunion avait permis de faire un point sur "l’état d’avancement du dossier devant le « Comité des 24 » à l’O.N.U.", et que Florence Poirat, professeure de l’Université de la Polynésie française, avait "partagé son analyse juridique sur certains points de dossier de décolonisation en cours à l’O.N.U."  
Lors de la toute première réunion de cette commission, le but était pourtant affiché : "Les travaux de cette commission spéciale permettront notamment aux élus de l’assemblée d’être mieux informés sur cette problématique et d’échanger avec des personnalités qualifiées et des experts, y compris sur des sujets transversaux à la question de la décolonisation (éducation, monnaie, etc.)". A part les représentants présents, tous les autres élus ignorent pourtant la teneur des échanges qui s’y déroulent.

On apprend seulement au détour des quelques lignes concernant les précédentes réunions que Carlyle Corbin, « consultant-expert en gouvernance internationale à l’ONU », et égérie du Groupe d’initiative de Bakou, a été entendu à quatre reprises (sur cinq réunions) ainsi que Anaïs Maurer, professeur assistante d’une université de New Jersey pour une proposition d’étude de la radioactivité à Hao.
 

Rédigé par Bertrand PREVOST le Mercredi 21 Août 2024 à 11:46 | Lu 3279 fois