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​Du ferme pour le père cruel et tyrannique


Tahiti, le 26 avril 2022 – Un retraité de 68 ans, jusque-là inconnu de la justice, a été condamné mardi par le tribunal correctionnel à trois ans de prison dont deux avec sursis assortis d'un mandat de dépôt. Durant de nombreuses années, l'homme avait battu ses deux enfants ainsi que son épouse atteinte de la maladie d'Alzheimer. 
 
Le tribunal correctionnel s'est plongé mardi dans le drame vécu par une famille régie par un père tyrannique, violent et alcoolique. Un ancien maçon de 68 ans, désormais retraité, comparaissait pour des violences habituelles commises sur deux de ses trois enfants mineurs ainsi que sur sa femme malade et ce, durant plusieurs années. 
 
L'ampleur et l'ancienneté des violences avaient été révélées en octobre 2020 lorsque les policiers avaient été appelés pour intervenir au domicile familial du prévenu alors que ce dernier venait de frapper son fils âgé de 13 ans. Entendu par les forces de l'ordre, le jeune garçon, véritable souffre-douleur de son père, avait relaté des années de violence gratuite commises sur lui-même mais également sur sa sœur qui était elle aussi mineure. Entendue à son tour, l'adolescente avait décrit un homme "fainéant" et "méchant" qui la frappait avec un bâton ou lui tirait les cheveux sans aucun motif particulier. Suite à l'intervention de la police et aux poursuites engagées contre leur père, les deux enfants avaient été placés en famille d'accueil.
 
Droits des enfants
 
Et c'est en leur absence que le procès de leur père s'est ouvert mardi devant le tribunal correctionnel. Tantôt hilare, tantôt vindicatif à la barre, le prévenu a non seulement reconnu les faits mais il les a aussi assumés en fustigeant notamment la mise en place de lois protégeant les droits des enfants. "La vie des gens, je m'en fiche. Ce sont mes enfants et c'est ma loi à moi" a-t-il ainsi asséné devant un tribunal ébahi. Interrogé sur les violences commises sur sa femme –atteinte de la maladie d'Alzheimer et qui réside toujours avec lui– le retraité a confirmé qu'il la frappait parfois en raison de ses "problèmes d'incontinence". Alors que le président du tribunal lui faisait remarquer que son épouse était atteinte d'une grave maladie, l'ancien maçon a sèchement répondu qu'il valait mieux la frapper plutôt que de "discuter" car cela ne "fait pas avancer les choses". Une remarque qui a littéralement stupéfié l'auditoire. 
 
Et l'audition de la tutrice légale de l'épouse du prévenu n'est pas venue arranger le cas de ce dernier. À la barre, cette femme a confessé qu'elle passait ses week-end, "inquiète", les "yeux rivés" sur son téléphone de peur qu'il n'arrive quelque chose à la victime. Sans détour, la tutrice a d'ailleurs dit au tribunal qu'elle pensait que cette femme était "en danger". Elle a par ailleurs expliqué que le retraité n'avait pas voulu lui donner la somme de 1000 Fcfp qui était destinée à acheter des médicaments pour son épouse et a rappelé que les enfants et leur mère souffraient énormément d'avoir été séparés. 
 
"Effet dévastateur"
 
Face aux "déclarations édifiantes" du prévenu, Me Texidor, qui représentait les victimes dans ce dossier, a dénoncé des "violences ancrées dans le temps, répétées pendant des années" qui ont eu un "effet dévastateur". Un effet également constaté par le procureur de la République pour lequel l'"aspect dramatique de ce dossier" est que le "bourreau va continuer à faire souffrir sa famille y compris après l'intervention judiciaire". Avant de requérir quatre ans de prison dont deux avec sursis assortis d'un mandat de dépôt, le représentant du ministère public a rappelé la situation difficile des deux enfants du prévenu qui, en plus d'avoir été victimes de violences durant des années, ont dû subir la "violence" du placement par les services sociaux.
 
Ne reconnaissant pas la loi française, le prévenu avait choisi de ne pas avoir d'avocat. Il a donc assuré sa propre défense en réaffirmant que "nos enfants nous appartiennent". Après en avoir délibéré, le tribunal l'a condamné à trois ans de prison dont deux ans avec sursis assortis d'un mandat de dépôt.  

Rédigé par Garance Colbert le Mardi 26 Avril 2022 à 17:34 | Lu 4277 fois