Tahiti, le 8 avril 2025 - Reprise des débats à l’Assemblée nationale dans le cadre de la commission sur la politique française d’expérimentation nucléaire après un passage éclair d’une délégation il y a deux semaines au Fenua.
La nuit dernière, c’est l’ancienne ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, qui était interrogée par la commission d'enquête de l’Assemblée nationale relative à la politique française d'expérimentation nucléaire, sur la préparation de la loi Morin. Un texte pour lequel son ministère “n’a pas été associé”, a-t-elle expliqué en préambule.
“Vous m’interrogez sur un sujet qui date de plus de 15 ans, je n’ai que ma mémoire pour y répondre”, s’est-elle excusée par avance.
Au cœur de débats, parfois tendus, notamment avec le député Rassemblement national, Yoann Gillet, pas de grande aide à la compréhension de la construction de la loi Morin, mais quelques pensées d’une femme politique qui n’a jamais vraiment eu sa langue dans sa poche. “Je pense qu’il serait plus simple d’inscrire tous les cancers à la liste des maladies radio-induites”, a-t-elle lâché au cours de son audition.
Plus loin, interrogée sur la possibilité de rendre ces indemnisations aux victimes des conséquences des essais nucléaires au même niveau que celui des victimes d’accidents médicaux graves, l’ancienne ministre répond : “Il y a un certain nombre de choses qui n’ont pas été comprises dans la loi et les études épidémiologiques auraient sans doute dû les aborder, comme l’éventuelle disproportion d’enfants mort-nés, de fausses couches ou de malformations. Je ne pense pas que dans l’étude épidémiologique CPIA (réalisée en 2009), ces choses-là ont été abordées. Indemniser le préjudice propre, moral ou patrimonial des ayants droit des victimes des essais nucléaires rapprocherait le régime des indemnisations des victimes de celui, au nom de la solidarité nationale, qui a été mis en place pour les victimes d’accidents médicaux graves. Il ne serait pas pour moi choquant qu’au nom de la solidarité nationale, un tel régime d’indemnisation soit mis en place quand il s’agit des essais conduits par l’État.”
Une petite révolution dans le courant de pensée issu de la droite républicaine.
La nuit dernière, c’est l’ancienne ministre de la Santé, Roselyne Bachelot, qui était interrogée par la commission d'enquête de l’Assemblée nationale relative à la politique française d'expérimentation nucléaire, sur la préparation de la loi Morin. Un texte pour lequel son ministère “n’a pas été associé”, a-t-elle expliqué en préambule.
“Vous m’interrogez sur un sujet qui date de plus de 15 ans, je n’ai que ma mémoire pour y répondre”, s’est-elle excusée par avance.
Au cœur de débats, parfois tendus, notamment avec le député Rassemblement national, Yoann Gillet, pas de grande aide à la compréhension de la construction de la loi Morin, mais quelques pensées d’une femme politique qui n’a jamais vraiment eu sa langue dans sa poche. “Je pense qu’il serait plus simple d’inscrire tous les cancers à la liste des maladies radio-induites”, a-t-elle lâché au cours de son audition.
Plus loin, interrogée sur la possibilité de rendre ces indemnisations aux victimes des conséquences des essais nucléaires au même niveau que celui des victimes d’accidents médicaux graves, l’ancienne ministre répond : “Il y a un certain nombre de choses qui n’ont pas été comprises dans la loi et les études épidémiologiques auraient sans doute dû les aborder, comme l’éventuelle disproportion d’enfants mort-nés, de fausses couches ou de malformations. Je ne pense pas que dans l’étude épidémiologique CPIA (réalisée en 2009), ces choses-là ont été abordées. Indemniser le préjudice propre, moral ou patrimonial des ayants droit des victimes des essais nucléaires rapprocherait le régime des indemnisations des victimes de celui, au nom de la solidarité nationale, qui a été mis en place pour les victimes d’accidents médicaux graves. Il ne serait pas pour moi choquant qu’au nom de la solidarité nationale, un tel régime d’indemnisation soit mis en place quand il s’agit des essais conduits par l’État.”
Une petite révolution dans le courant de pensée issu de la droite républicaine.
Le millisievert en question
Après l’ancienne ministre, Marianne Lahana, avocate et rédactrice d’une thèse de droit public consacrée aux indemnisations des essais, et qui a elle-même travaillé au Comité d’indemnisation des victimes des essais nucléaire (Civen) pendant quatre ans, était entendue.
Le but de son audition, comprendre l’importance, ou non, du maintien du seuil de 1 millisievert comme critère d’indemnisation des victimes. Restant dans le cadre de la lecture juridique, Marianne Lahana s’est surtout arrêtée sur une évidence, dès lors que l’intégralité des cancers en Polynésie française ne sont pas tous liés à la campagne des essais atmosphériques des essais nucléaires. “C’est un critère qui reste malgré tout très bas. Il a permis d’augmenter significativement le nombre de personnes indemnisées. Il a été le seul critère de l’histoire de ce dispositif qui aura permis à la communauté scientifique et à la communauté législative de trouver un consensus dans une volonté d’indemnisation des victimes, même si le droit ne peut pas tout réparer”, a-t-elle détaillé pour sa part.
Sur son maintien, elle est catégorique. “Je ne pense pas qu’il faille le supprimer. Il y un point d’équilibre qui a été atteint et qu’il faut conserver pour l’avenir au risque de venir détruire ce qui a été mis en œuvre pour répondre de la manière la plus juste à l’indemnisation des victimes. Ça ne suffit pas à dire que ce régime est parfait. (…) On ne pouvait pas considérer que tous les cancers étaient liés uniquement aux essais nucléaires, et demander d’autre part au Civen d’apporter la preuve que le cancer n’était pas lié était difficile. Il a fallu trouver une solution qui soit admissible aux deux communautés.”
Une réponse qui n’a pas satisfait la député Mereana Reid-Arbelot, principale membre de la commission à poser des questions. “Ce seuil n’a rien de scientifique. C’est un seuil administratif, de gestion”, a-t-elle rebondi.
Le but de son audition, comprendre l’importance, ou non, du maintien du seuil de 1 millisievert comme critère d’indemnisation des victimes. Restant dans le cadre de la lecture juridique, Marianne Lahana s’est surtout arrêtée sur une évidence, dès lors que l’intégralité des cancers en Polynésie française ne sont pas tous liés à la campagne des essais atmosphériques des essais nucléaires. “C’est un critère qui reste malgré tout très bas. Il a permis d’augmenter significativement le nombre de personnes indemnisées. Il a été le seul critère de l’histoire de ce dispositif qui aura permis à la communauté scientifique et à la communauté législative de trouver un consensus dans une volonté d’indemnisation des victimes, même si le droit ne peut pas tout réparer”, a-t-elle détaillé pour sa part.
Sur son maintien, elle est catégorique. “Je ne pense pas qu’il faille le supprimer. Il y un point d’équilibre qui a été atteint et qu’il faut conserver pour l’avenir au risque de venir détruire ce qui a été mis en œuvre pour répondre de la manière la plus juste à l’indemnisation des victimes. Ça ne suffit pas à dire que ce régime est parfait. (…) On ne pouvait pas considérer que tous les cancers étaient liés uniquement aux essais nucléaires, et demander d’autre part au Civen d’apporter la preuve que le cancer n’était pas lié était difficile. Il a fallu trouver une solution qui soit admissible aux deux communautés.”
Une réponse qui n’a pas satisfait la député Mereana Reid-Arbelot, principale membre de la commission à poser des questions. “Ce seuil n’a rien de scientifique. C’est un seuil administratif, de gestion”, a-t-elle rebondi.
Les archives de santé toujours protégées
Enfin, la ministre déléguée auprès du ministre des Armées, chargée de la Mémoire et des Anciens combattants, Patricia Mirallès, a, elle aussi, été entendue. Un entretien beaucoup plus court que les deux précédents.
Plusieurs questions, et peu de réponses pour les défenseurs de la cause des victimes. Refus d’octroi aux vétérans des essais nucléaires du titre de reconnaissance de la nation. “En quatre ans, 3 885 récipiendaires ont reçu la médaille de la Défense nationale, principale décoration du ministère des Armées, avec l’agrafe essais nucléaires”, a-t-elle argumenté en contrepartie.
C’est évidemment le dossier des archives qui a été étudié avec la ministre déléguée. “L’ouverture des archives, cela ne signifie pas que tout doit être mis en ligne”, a-t-elle répété, assurant qu’“il ne reste que 33 cartons d’archives à ouvrir et à traiter, "soit seulement 4% de l’ensemble des cartons”. Selon elle, les dernières données devraient être traitées dans le second semestre de cette année.
Enfin, concernant les archives médicales, toujours pas d’inflexion de l’État sur le sujet. L’excuse, bien pratique, du secret médical a une fois de plus été remontée. “Ce ne sont pas des archives classifiées mais des archives protégées par le secret médical”, a-t-elle rappelé. “Le délai est de 120 ans après la date de naissance de la personne concernée ou 25 ans après son décès.” Problème : les ayants droit n’ont que six ans pour faire une demande d’indemnisation après le décès d’un parent d’une des maladies reconnues par le Civen.
Cette audition aura aussi été pour la ministre déléguée l’occasion de tenter de trancher le sujet sur ce que contiendraient ces archives médicales mettant en garde sur ce “qui est une imprécision, a été repris, amplifié et acquiert pour certains la valeur d’une vérité établie”.
Plusieurs questions, et peu de réponses pour les défenseurs de la cause des victimes. Refus d’octroi aux vétérans des essais nucléaires du titre de reconnaissance de la nation. “En quatre ans, 3 885 récipiendaires ont reçu la médaille de la Défense nationale, principale décoration du ministère des Armées, avec l’agrafe essais nucléaires”, a-t-elle argumenté en contrepartie.
C’est évidemment le dossier des archives qui a été étudié avec la ministre déléguée. “L’ouverture des archives, cela ne signifie pas que tout doit être mis en ligne”, a-t-elle répété, assurant qu’“il ne reste que 33 cartons d’archives à ouvrir et à traiter, "soit seulement 4% de l’ensemble des cartons”. Selon elle, les dernières données devraient être traitées dans le second semestre de cette année.
Enfin, concernant les archives médicales, toujours pas d’inflexion de l’État sur le sujet. L’excuse, bien pratique, du secret médical a une fois de plus été remontée. “Ce ne sont pas des archives classifiées mais des archives protégées par le secret médical”, a-t-elle rappelé. “Le délai est de 120 ans après la date de naissance de la personne concernée ou 25 ans après son décès.” Problème : les ayants droit n’ont que six ans pour faire une demande d’indemnisation après le décès d’un parent d’une des maladies reconnues par le Civen.
Cette audition aura aussi été pour la ministre déléguée l’occasion de tenter de trancher le sujet sur ce que contiendraient ces archives médicales mettant en garde sur ce “qui est une imprécision, a été repris, amplifié et acquiert pour certains la valeur d’une vérité établie”.