“À ma connaissance, c’est la première fois à ce point”, confie une riveraine du PK 5 (Crédit : Anne-Charlotte Lehartel).
Tahiti, le 22 août 2024 – Dans le secteur de Mitirapa, à Toahotu, les plages sont régulièrement recouvertes d’un épais tapis de Turbinaria ornata et de Sargasse. Si les agriculteurs collectent une partie de ces algues brunes, l’accès à la mer demeure parfois compromis pour les familles. Agir sur leur prolifération ou les exploiter, plusieurs pistes sont envisagées.
C’est un phénomène qui semble prendre de l’ampleur, bien qu’il ne soit, pour l’heure, pas comparable avec les nuisances occasionnées aux Antilles. Ces derniers mois, dans le secteur de Mitirapa, les plages sont régulièrement recouvertes d’un épais tapis d’algues. Si la zone est connue des agriculteurs, qui en collectent une partie, la présence massive de ces algues n’est pas des plus agréables pour les familles, parfois contraintes de se tourner vers d’autres sites épargnés.
C’est un phénomène qui semble prendre de l’ampleur, bien qu’il ne soit, pour l’heure, pas comparable avec les nuisances occasionnées aux Antilles. Ces derniers mois, dans le secteur de Mitirapa, les plages sont régulièrement recouvertes d’un épais tapis d’algues. Si la zone est connue des agriculteurs, qui en collectent une partie, la présence massive de ces algues n’est pas des plus agréables pour les familles, parfois contraintes de se tourner vers d’autres sites épargnés.
Boudées par les baigneurs
“C’est comme ça tous les ans, mais j’ai l’impression qu’il y en a de plus en plus. Même quand je vais à la pêche en bateau, j’en vois beaucoup, jusqu’à l’intérieur de Puunui”, confie un habitué, stationné sur place. Une riveraine nous a aussi fait part de son étonnement. “À ma connaissance, c’est la première fois à ce point. Les enfants ont l’habitude de se baigner par-là, mais en ce moment, personne ne va à la mer : on ne sait pas ce qu’il y a dedans et ça ne donne pas envie. On laisse faire la nature pour que ça reparte avec la houle”, explique Teumere. “On fréquente cette plage depuis l’adolescence. Quand il y a trop d’algues, on ne vient pas se baigner avec nos enfants”, ajoutent deux autres usagères.
Lorsqu’elles arrivent en abondance, les algues brunes font toutefois le bonheur de certains professionnels, qui contribuent au nettoyage des sites concernés. “Je viens ramasser des algues quand j’ai le temps, pour apporter du potassium à mes pastèques. Je les fais bien sécher chez moi pendant deux ou trois semaines, puis je les mets dans le broyeur pour obtenir une poudre qui améliore le mûrissement des fruits”, explique un agriculteur de Taravao, qui a l’habitude de se fournir à Mitirapa, mais aussi du côté de Faratea.
Quelles solutions ?
Interrogé au sujet de ces marées de Turbinaria ornata et de Sargasse, le directeur adjoint des ressources marines (DRM) rappelle que c’est un phénomène naturel en lien avec les épisodes de forte houle, le site de Mitirapa étant fortement exposé, face à une passe. Pour autant, plusieurs facteurs contribuent à amplifier ce phénomène. “On a de moins en moins d’herbivores dans le lagon, comme des ume, des maito, des mārava, des oursins, etc. Ce qui fait qu’on a une prolifération algale plus importante tout autour de l’île”, constate Moana Maamaatuaiahutapu. À la surpêche s’ajoutent certains rejets anthropiques, qui favoriseraient le développement des algues envahissantes. “Le Pays travaille sur le repeuplement d’herbivores. Plusieurs études sont menées en aquaculture de restauration pour être capable de les produire et de vérifier s’ils vont effectivement consommer ces algues, au stade de bourgeon pour la plus dure des deux. Il y a d’autres voies, comme des campagnes d’arrachage par des associations, à Punaauia, par exemple, et des leviers pour l’exploitation de ces algues.”
Un programme de valorisation serait notamment à l’étude du côté de la Direction de l’agriculture (DAG). Xavier Moppert, responsable en recherche et développement chez Pacific Biotech, fait aussi partie de ceux qui planchent sur la Turbinaria ornata depuis plusieurs années, dans la continuité de la thèse de la spécialiste Mayalen Zubia, maître de conférences en écologie marine à l’Université de la Polynésie française (UPF). L’accent est mis sur cette algue, qui a tendance à étouffer les récifs, mais dont les propriétés peuvent avoir plusieurs applications. “La Turbinaria a une teneur importante en potassium et en calcium, correcte en azote, mais faible en phosphore, et l’alginate qu’elle produit est intéressant. Plus l’algue est rigide, plus elle est gélifiante. Il y a plusieurs pistes : des biostimulants pour l’agriculture et l’horticulture, l’alimentation animale, la cosmétique et les biomatériaux, comme des bioplastiques ou dans des dispositifs médicaux. Des études sont menées avec l’UPF et le Criobe pour quantifier le gisement prélevable pour améliorer l’écosystème marin, sans l’impacter”, précise Xavier Moppert. Prochaine étape : convaincre des industriels d’investir dans la filière.