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Euronixa mise sur le salariat en freelance pour le fenua


Tahiti, le 14 septembre 2020 - Candidat au concours Tech4Islands, Euronixa cherche à introduire le portage salarial dans le code du travail polynésien. Alternative au statut d'indépendant et à la création de société, le salarié porté bénéficie des mêmes avantages qu'un salarié classique, avec toute la liberté d'un patenté.
 

Etre à son compte sans être patenté, ou développer une activité indépendante tout en conservant le statut de salarié : alternative à la création de société, le portage salarial cherche à se faire une place au fenua. Spécialisée sur ce créneau, l'agence Euronixa (European Network Information eXchange Area) a ouvert le 16 janvier une succursale à Papeete. Quelques mois plus tard, elle figurait au rang des 186 candidats au concours Tech4Islands. "Nous sommes en phase d'étude de marché et de recherche de partenariats publics et privés car il n'y a plus de verrous technologiques entre le Pays, le Pacifique, la métropole et l'Europe" indique Christophe Tavernier, responsable de la plateforme.   

Bien qu'elle ne soit pas retenue en finale – délibérée la semaine dernière –, l'agence en est convaincue. La formule a tout pour séduire la nouvelle donne du marché du travail, dans un contexte de crise. "D'un côté, on a des chefs d'entreprise qui préfèrent payer une prestation qu'embaucher, et de l'autre, des jeunes cadres compétents en quête de liberté, mais qui hésitent à se lancer". C'est que, rémunéré sous forme d'honoraires, le cadre en question réfléchira à deux fois avant de passer du statut de salarié au statut moins confortable d'indépendant. C'est là que la société de portage intervient, en percevant sous forme de facture les honoraires versés par l'entreprise et en les transformant en fiche de paye pour le compte du cadre. C'est elle qui déduit les cotisations sociales, (régime de prévoyances, retraites, assurance maladie, etc.) prélevant au passage une commission de l'ordre de 10 % à 15 %. Ce qui lui permet d'ailleurs de se rémunérer.

"Plus de lien de subordination"

"Avec ce système, on maintient le statut du salarié externalisé chez nous, on autonomise son salaire, et il est libre de prospecter les clients qu'il veut, en gros on lui verse le salaire sans être son patron" développe Christophe. "C'est une prestation en gestion de la paye pour les entrepreneurs qui cherchent une alternative au statut de patenté et à la création d'une société." Exit les démarches administratives et comptables lourdes et contraignantes. Le portage doit ainsi permettre aux professionnels d'exercer leur activité comme s'ils avaient leur propre entreprise, tout en bénéficiant des avantages du salariat. "Il n'y a plus de lien de subordination !" insiste le responsable. Le salarié choisit ses clients dans le pays de son choix. Il appréciera au passage l'accompagnement et l'effet de réseau. Mais si l’indépendant porté est rémunéré par sa société de portage, le prix et la nature des prestations sont en revanche négociées directement avec l’entreprise cliente. Ainsi le contrat tripartite lie le salarié porté, à la société de portage et à la société client.

Né dans les années 80 pour permettre aux seniors de retrouver une activité, le concept prend un nouvel essor avec la crise sanitaire et le télétravail. C'est sur cette vague qu'Euronixa veut surfer. "Le salarié porté peut travailler à distance, il organise son temps et choisit son lieu de travail, pour les entreprises, ça permet d'avoir des équipes qui ne sont pas concentrées au même endroit, et de faire travailler des gens dans les îles. On veut démocratiser le télétravail" argumente Christophe.

Un statut qui n'existe pas dans le droit du travail polynésien

Le portage salarial apparaît également comme une solution pour tester un projet de création d’entreprise du côté des personnes en reconversion, ou en transition professionnelle. Selon le magazine Forbes, le secteur représente aujourd'hui près de 90 000 personnes sur l'hexagone, avec un chiffre d'affaires qui frise 1,5 milliard d'euros (18 milliards de francs). Reste à conquérir le marché du fenua. Car si le statut se démocratise peu à peu en France, il n'existe pas encore dans le code du travail polynésien. Euronixa le sait, et s'est déjà rapprochée du ministère concerné lors d'une rencontre en mai 2019, à Paris, avec une délégation de la Polynésie française. "J'ai présenté notre succursale à Tahiti en vue de lancer une preuve de concept pour contribuer à la réforme du droit du travail tahitien, rapporte Christophe Tavernier. Tahiti est déjà en avance sur la métropole en matière d'expérimentation sur la cybersécurité et le télétravail. Il faut donc adapter le cadre juridique pour développer les services à la transformation et internationalisation de l'emploi et des talents."

Entretemps le Covid est passé par là, mettant un sérieux coup d'arrêt aux travaux. Submergé par la gestion de la crise économique, le ministère du Tourisme et du Travail admet que le projet est "au point mort". Non seulement ses services n'ont pas eu le temps de "défricher" le dossier, mais ils sont toujours dans l'attente d'une étude de faisabilité "plus aboutie". Euronixa y travaille.
 

Rédigé par Esther Cunéo le Lundi 14 Septembre 2020 à 19:30 | Lu 2202 fois