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Accidents du travail, maladies professionnelles : des ajustements en attendant...


Les maladies professionnelles déclarées liées à l'exposition à l'amiante restent rares en Polynésie, même si leur nombre va nécessairement augmenter en raison de la multiplication de chantiers de réhabilitation de bâtiments où ce matériau a été largement utilisé. L'un des premiers cas d'une maladie liée à l'amiante sur le territoire a été celui d'un garagiste  car les fibres d'amiante étaient (jusqu'en 1996 au moins) utilisées dans les plaquettes de frein des véhicules.
Les maladies professionnelles déclarées liées à l'exposition à l'amiante restent rares en Polynésie, même si leur nombre va nécessairement augmenter en raison de la multiplication de chantiers de réhabilitation de bâtiments où ce matériau a été largement utilisé. L'un des premiers cas d'une maladie liée à l'amiante sur le territoire a été celui d'un garagiste car les fibres d'amiante étaient (jusqu'en 1996 au moins) utilisées dans les plaquettes de frein des véhicules.
PAPEETE, le 19 août 2015. Alors qu'il existe une branche spécifique du régime des salariés pour prendre en charge le coût des accidents du travail et de la maladie professionnelle, le plus souvent c'est l'assurance maladie qui le finance. Pour la deuxième fois en quatre ans, une loi du Pays tente d'équilibrer ces transferts de charge.

La loi du Pays instituant un reversement forfaitaire annuel au régime d'assurance maladie invalidité des travailleurs salariés pour couvrir les dépenses des accidents du travail et des maladies professionnelles a été promulguée au Journal officiel le 13 août 2015. La Loi du Pays a pour but de contrecarrer la sous-déclaration notoire des accidents du travail et des maladies professionnelles sur le territoire : les personnes malades ou touchant une pension invalidité, étant finalement le plus souvent "couvertes" par l'assurance maladie au lieu de l'être par une branche spécifique du régime général des salariés, exclusivement financée par les employeurs.
Le texte a été adopté par les représentants de l'Assemblée de Polynésie le 25 juin dernier par 46 voix pour et 11 abstentions. Il met en place également un versement annuel, pour les années 2015 à 2017, dont le taux est fixé à 0,48 % du montant prévisionnel des dépenses des prestations en nature de l’assurance maladie-invalidité du régime des salariés.

C'est le taux mis en place au plan national par la Sécurité sociale métropolitaine, mais qui n'a pas pu être évalué précisément pour le territoire, faute d'une enquête épidémiologique précise. C'est justement cette absence de données chiffrées, à la fois sur les accidents du travail et les maladies professionnelles, qui avait fait tiquer les membres du CESC. En mars dernier, lors de l'examen de ce texte pour avis, le CESC avait émis un avis défavorable (par 35 voix et deux abstentions) en arguant qu'actuellement la branche accidents du travail/maladies professionnelles est la seule branche excédentaire du RGS. Elle dispose à ce jour d'une réserve de 5 milliards de Fcfp. "Le faible nombre de dossiers de déclaration annuelle de maladies professionnelles ne signifie pas pour autant que la Polynésie française est à l’abri de toute prévalence. L’amélioration de la connaissance de ces maladies professionnelles et une meilleure imputation du risque devraient se traduire par des dépenses accrues".

IL MANQUE UNE ETUDE EPIDEMIOLOGIQUE

Pour le CESC, il aurait été utile de connaître le coût moyen des maladies professionnelles les plus courantes pour anticiper l’évolution de cette branche. D'autant que l'incertitude "sur la prise en charge ou non des maladies radio-induites ou des maladies dues à l’amiante (actuellement prises en charge par l’assurance maladie générale) risquent fort à terme de rendre cette branche déficitaire". Selon le CESC ce prélèvement annuel institué de manière "sans réelle base de calcul propre, ni pondération ou adaptation inhérente à la situation polynésienne, constitue une erreur d’appréciation que les membres du CESC ne sauraient avaliser" : l'épuisement rapide des réserves de cette branche spécifique étant la crainte principale. Ce principe des vases communicants de la branche des accidents du travail et des maladies professionnelles vers l'assurance maladie est certes tentant, mais considéré comme dangereux par les membres du CESC, particulièrement du point de vue des syndicats.

Les élus de la commission de la santé et du travail de l'Assemblée de la Polynésie avaient eux aussi, dans le rapport fait sur ce projet de loi du gouvernement, appuyé également la demande du CESC afin que soit organisée "le plus rapidement possible, sous l'égide du ministère en charge du travail, la réalisation de l’étude épidémiologique nécessaire pour fixer de la façon la plus exacte possible le reversement annuel à opérer de la branche Accident du travail et maladies professionnelles à la branche Assurance-maladie du régime des salariés".

Des versements exceptionnels qui deviennent la norme

Cette loi du Pays du 13 août 2015 institue par ailleurs, à titre exceptionnel, un versement de 390 millions Fcfp depuis le régime des accidents du travail et des maladies professionnelles vers le régime de l’assurance maladie des travailleurs salariés pour tenir compte justement des dépenses supportées par l'assurance maladie en 2012, 2013 et 2014. Mais ce versement "exceptionnel" n'est pas le premier du genre.

Déjà, en 2011 des dispositions similaires avaient été prises dans la loi du Pays du 11 juillet 2011. Cette précédente fois, un reversement exceptionnel de 906 millions de francs avait été effectué "au titre des accidents du travail et des maladies professionnelles non déclarés que la branche d’assurance maladie a pris en charge jusqu’alors". Ce qui souligne qu'au cours des quatre années écoulées rien n'a été fait pour y voir plus clair sur cette problématique du financement des accidents du travail et des maladies professionnelles.

Faute d'étude épidémiologique on ne sait pas, en Polynésie française, évaluer le risque des maladies professionnelles. A première vue, elles paraissent faibles : pas plus d'une dizaine de déclarations de cas par an quand en Nouvelle-Calédonie pour un effectif salarié quasi identique, il y en a dix fois plus. Il faut dire que faire reconnaître une maladie professionnelle est un parcours du combattant pour les salariés concernés en Polynésie française. C’est au salarié malade lui-même de déclarer sa maladie professionnelle pour peu que son médecin généraliste ou le médecin du travail ait réussi à faire la corrélation entre sa maladie et son activité professionnelle

Rédigé par Mireille Loubet le Mercredi 19 Août 2015 à 16:25 | Lu 1521 fois