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Radioactivité : les traces des essais nucléaires s'estompent mais restent décelables


L'évolution de la dose annuelle liée à l'ingestion chez l'adulte : stable depuis la fin des années 1990 (l'écart observé en 2005 est lié à une activité particulièrement élevée en Césium 137 dans la viande de bœuf de Taravao).
L'évolution de la dose annuelle liée à l'ingestion chez l'adulte : stable depuis la fin des années 1990 (l'écart observé en 2005 est lié à une activité particulièrement élevée en Césium 137 dans la viande de bœuf de Taravao).
PAPEETE, le 6 octobre 2015. Il y a une quinzaine de jours, l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire (IRSN) publiait le bilan 2014 de la surveillance de la radioactivité en Polynésie française. Il en ressort que les concentrations observées sont largement en-dessous des valeurs maximales autorisées. Par endroits, toutefois une rémanence des essais nucléaires aériens menés à Moruroa est encore décelable.

La synthèse du rapport de l'Institut de radioprotection et de sûreté nucléaire est la suivante : "après une diminution régulière des niveaux de radioactivité depuis l’arrêt en 1974 des essais atmosphériques français d’armes nucléaires, l’état radiologique constaté en 2014 est stable, dans la continuité des années antérieures récentes, et se situe à un très bas niveau. Cette radioactivité résiduelle est essentiellement attribuable au césium 137. "i[Le seul radionucléide artificiel émetteur encore détectable en Polynésie française est le césium 137. Il témoigne de la rémanence des retombées anciennes des essais atmosphériques d’armes nucléaires" indique le rapport. "La dose efficace annuelle ajoutée par la radioactivité d’origine artificielle est inférieure à 5 microsieverts par an" (voir en encadré). Selon les mesures effectuées par l'IRSN, la Polynésie française, bien qu'ayant été impactée par les retombées des 41 essais nucléaires aériens est, au moins depuis le début des années 1990, loin, très loin même de la dose maximale réglementaire autorisée en France. "L’évolution de l’activité volumique du césium 137 dans l’air à Tahiti et à Orsay (région parisienne) montre une diminution comparable, d’environ trois à quatre ordres de grandeur, entre 1971 et 2014". Au final, "la valeur moyenne annuelle à Orsay reste environ deux fois plus élevée que celle de Tahiti"!

Le rapport 2014 rappelle que "l’un des objectifs de la surveillance radiologique de l’environnement est de contribuer à évaluer l’exposition de la population à la radioactivité environnementale au travers d’estimations dosimétriques. Lorsque l’activité (exprimée en becquerel) de l’air, d’un sol ou d’une denrée, peut être mesurée, il est possible de calculer la dose (exprimée en sievert) qui peut en résulter et qui est, elle, représentative du risque pour la santé". Or, au fil des ans, l'évolution de la dose annuelle liée à l'ingestion chez l'adulte est en constante diminution, à tel point que "une nouvelle orientation du programme de surveillance a été mise en œuvre en 2014 avec l’étude de la radioactivité d’origine artificielle dans les sols, principale voie de transfert aux aliments". Ainsi les analyses menées dans le sol à la recherche du césium 137 et les isotopes 238, 239 et 240 du plutonium montrent des "concentrations dans les sols relativement stables dans le temps". Le rapport de l'IRSN note que "les concentrations mesurées dans les sols de Tahiti, de Moorea, de Hao et des îles Gambier excèdent parfois 1 Bq/kg sec, aussi bien en césium 137 qu'en plutonium 238 et 239". Césium 137 et plutonium 238 et 239 permettant clairement d'identifier une source nucléaire d'origine militaire.

Pour lire le rapport 2014 de l'IRSN en entier, CLIQUER ICI


En 1966, décontamination d'un avion Vautour à Hao après son passage dans un nuage radioactif (Photo J.Enne issue du site www.moruroa.org)
En 1966, décontamination d'un avion Vautour à Hao après son passage dans un nuage radioactif (Photo J.Enne issue du site www.moruroa.org)
Le cas particulier de Hao


Le sol est aujourd'hui la principale voie de transfert de la radioactivité. En effet, 40 ans après la fin des essais nucléaires atmosphériques, le sol contient encore une fraction des retombées de ces essais. "N’ayant que quelques données éparses sur les teneurs en radionucléides artificiels dans les sols de Polynésie française, une étude a été initiée en 2014". Les échantillonnages concernent Tahiti, Moorea, Hao et les Gambier. Pour Hao, six prélèvements concernent le principal motu habité de l’atoll, un autre provient du motu Ovao près de la passe Kaki, enfin 91 autres sont localisés sous 5 000 m2 de dalles en béton. "Ce contrôle a été réalisé à la demande du Com Sup dans le cadre des travaux de réhabilitation de l’atoll donnant lieu au démantèlement des ouvrages construits à l’époque du CEP" (centre d’expérimentation du Pacifique). Si on retrouve de faibles traces seulement du Césium 137 dans les sols de Hao c'est que le corail avec très peu de matière organique n'a pas retenu cette matière. Par ailleurs, les teneurs en plutonium sont inférieures à 1 Bq/kg sec "sauf pour une zone spécifique peu étendue à Hao, utilisée entre 1966 et 1974 comme site de décontamination des avions vautour qui traversaient les panaches radioactifs à l’issue des tirs atmosphériques". L'aire de décontamination des avions était située à l'extrémité de la piste d'aviation de Hao, en bordure de l'océan Pacifique.


Le LESE (laboratoire d’étude et de suivi de l’environnement, antenne polynésienne de l’irsN) est implanté à Vairao depuis l’été 2009, après avoir été basé durant quarante-quatre ans à Mahina. il effectue depuis 1962 une surveillance permanente de la radioactivité en Polynésie française. Ici laboratoire de radiochimie alpha (Pu).
Le LESE (laboratoire d’étude et de suivi de l’environnement, antenne polynésienne de l’irsN) est implanté à Vairao depuis l’été 2009, après avoir été basé durant quarante-quatre ans à Mahina. il effectue depuis 1962 une surveillance permanente de la radioactivité en Polynésie française. Ici laboratoire de radiochimie alpha (Pu).
Comment mesure-t-on la radioactivité ?

Les effets sur les individus dus à l’exposition aux radionucléides ne se mesurent pas directement. Ils sont quantifiés par la dose efficace à l’organisme entier dont l’unité conventionnelle est le sievert (sv) ou plus habituellement ses sous-multiples : le millisievert (1 msv = 0,001 sv), le microsievert (1 μsv = 0,000001 sv). La réglementation française fixe à 1 millisievert (mSv) par an la dose efficace maximale admissible résultant des activités humaines en dehors de la radioactivité naturelle et des doses reçues en médecine.

Aujourd’hui, en Polynésie française, selon les résultats de l'IRSN, cette dose s’est stabilisée à une valeur de l’ordre de 4 μSv/an pour un adulte (soit 0,000004 millisievert) soit quatre millièmes de la dose maximale, bien en-dessous donc des limites annuelles autorisées. Ce qui est cohérent avec la stabilité observée des niveaux de radioactivité dans les denrées et les composantes de l’environnement.

Sept îles sous surveillance

Depuis 1962 en Polynésie, la surveillance radiologique de l’environnement français concerne sept îles (Tahiti, Maupiti, Hao, Rangiroa, Hiva Oa, Mangareva et Tubuai) représentatives des cinq archipels polynésiens. La méthode d'analyse consiste à prélever régulièrement des échantillons de nature variée dans les différents milieux (air, eau, sol) avec lesquels la population peut être en contact, ainsi que des denrées alimentaires.

Rédigé par Mireille Loubet le Mardi 6 Octobre 2015 à 17:27 | Lu 4734 fois