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Les voeux du Tavini  01/01/2012


2012 : la relance et le nucléaire

"La fin de l’année est par tradition le moment propice pour retracer l’essentiel de l’action de notre gouvernement depuis son arrivée aux responsabilités, exaltantes mais exigeantes, des affaires de notre pays.

2011 est à l’image de ce que nous vivons depuis la défaite des forces autonomistes soutenues par l’état en mai 2004. Cette défaite n’était pas une victoire complète de l’Union Pour Le Développement puisqu’il a manqué 2 sièges pour être une majorité. C’est ainsi que nous avons été renversés, avec les encouragements de Paris, et que s’est enclenchée la spirale des motions de défiance qui a causé un tort considérable à la Polynésie française. Ce cycle se termine avec la nouvelle loi électorale, la 3ème en 6 ans, c’est dire la qualité de notre démocratie !

Notre président, M. Oscar Temaru, également président de l’UPLD, et le groupe des îliens, Te Mana o Te Mau Motu, ont fait preuve de responsabilité et de courage en provoquant la dernière motion de défiance pour une sortie de crise dans un contexte périlleux. Le budget est désormais voté et comme toujours, il connaîtra des évolutions dans le courant de l’année.

La relance

Notre objectif 2012, nous l’avons déjà annoncé, est la relance et le redressement de nos comptes. Mais conditionner la relance à la suppression massive et immédiate d’emplois dans la sphère publique serait une énorme et cruelle erreur. Plutôt que de gonfler inconsidérément le nombre de chômeurs, qui auront un coût pour la collectivité, et accroître le désastre social, nous voulons privilégier le maintien de ces emplois qui soutiennent la consommation et l’activité. La réduction des effectifs de notre administration sera entreprise, étalée dans le temps au fur et à mesure que se rétabliront nos comptes. Notre priorité, c’est conjuguer nos efforts avec l’état pour la relance dès cette année nouvelle et c’est en cours.

Mercredi la semaine dernière, le vice président en charge du budget, M. Tony Géros, à l’issue d’une réunion du Comité de Pilotage avec le haut commissaire M. Richard Didier, a annoncé la mise en œuvre d’un financement de plusieurs chantiers à hauteur de 14 milliards. Ces sommes seront disponibles dès le mois de janvier et concernent 78 opérations programmées pour 2012, dont la plus importante sera l’échangeur de la mairie de Punaauia pour près de 2 milliards. Le lendemain, le ministre de l’économie et des finances, M. Pierre Fébault, a présenté aux professionnels du bâtiment des projets actés à hauteur de 34 milliards fcp grâce à des fonds du pays et de la DGDE, la dette nucléaire.

Il est donc clair que nous avons déjà engagé la relance de l’activité sur un total disponible de 48 milliards. C’est un bon début pour un gouvernement qui a pris en charge en avril de cette année un pays gagné par la paralysie. Ce n’est pas suffisant, nous devons poursuivre au-delà, et d’autres sources de financements sont à l’étude. Mais il ne faut pas se leurrer, la Polynésie française n’a pas fini de souffrir, des efforts seront demandés à chacun, et nous devrons tous consentir des sacrifices. Rien d’abouti ne peut être espéré dans le temps qui nous reste, mais au moins, nous montrerons que la reprise de l’activité économique est enclenchée.

Le nucléaire

2011 a vu notre demande de réinscription sur la liste des pays à décoloniser inscrite à l’agenda de l’ONU. La décolonisation, c’est réparer toutes les injustices de la colonisation. Le bannissement de Pouvanaa a Oopa est un acte colonial. Faire de notre beau pays un site d’expérimentations nucléaires est le plus funeste destin qui pouvait nous être imposé. Nous avons pris en charge nos malades et nous avons logés ces familles laissées sur la route après le départ du CEP. Sur ces points, l’État n’est pas à la hauteur de ses responsabilités.

Mais il y a pire. Peu à peu, des chercheurs mettent à jour de nouvelles alarmantes sur les conséquences de ces essais dangereux pour la santé de nos familles. Les cas de cancers de la thyroïde sont anormalement élevés, y compris chez des Polynésiens qui n’ont jamais travaillé pour le Centre d’Expérimentation du Pacifique. Des conclusions semblables sont signalées pour les leucémies. Enfin, plus effrayant, le docteur Sueur a mis en en évidence récemment des dérèglements des gènes chez des enfants dont les grands pères ont travaillé à Moruroa. Le célèbre généticien M. Jean Rostand avait prévenu dès 1966, les "fauteurs d'explosions nucléaires" dans les Tuamotu qu'ils allaient détériorer "le patrimoine héréditaire humain", un véritable "crime dans l'avenir". En clair, la bombe poursuivra son œuvre sur les générations du futur. Notre pays se doit de soutenir ces travaux, car nous ne pouvons pas compter sur l’État tel qu’il est aujourd’hui pour connaître toute la vérité. Cet héritage sera très lourd à porter, le contentieux sera difficile et dans bien des cas, s’agissant des impacts sur la santé des Polynésiens, impossible à réparer. Notre réinscription sur la liste des pays à décoloniser nous permettra d’aller au fond de ce différend sous l’arbitrage de l’ONU.

Moruroa et Fangataufa ont été cédés à l'Etat pour les besoins du CEP. La délibération de la commission permanente de l’assemblée du 6 février 1964 prévoit le retour d’office des sites dès la fin des essais « au domaine du territoire dans l’état où ils se trouveront à cette époque sans dédommagement ni réparation ». Les 2 atolls doivent nous être restitués et un état des lieux sera dressé, mais il est hors de question que l’état n’assume pas ses responsabilités sanitaires, environnementales, économiques, sociales et donc financières. La loi sur la transparence et la sécurité nucléaire du 13 juin 2006 prévoit l’application du principe pollueur-payeur sauf pour ce qui concerne la défense nationale. Notre sénateur M. Richard Tuheiava défendra une proposition de loi pour corriger cette injustice le 18 janvier en séance publique au Sénat et le rapporteur en sera le sénateur PS M. Roland Courteau. Rappelons que la majorité au sénat repose désormais sur l’alliance Parti Socialiste-Europe Écologie-Les Verts. Il serait bon qu’une délégation d’élus de chaque groupe soit sur place pour soutenir cette action aux côtés du Conseil d’Orientation pour le Suivi des Conséquences des Essais Nucléaires.

2012

Enfin, 2012 sera marqué par 2 élections d’importance majeure pour nous. L’élection présidentielle en mai, suivie des élections législatives en juin. Le Tavini Huiraatira a engagé un véritable partenariat avec le Parti Socialiste et appelle à voter pour son candidat M. François Hollande. Il apparaît qu’en Polynésie comme en France métropolitaine une volonté de changements profonds se manifeste. Nous avons confiance dans les forces de la gauche. Mais rien n’est gagné d’avance et le Tavini Huiraatira s’est déjà engagé et invite ses militants à la mobilisation sans attendre.

Notre dernier message dans ce contexte nouveau et exigeant, est de pas oublier que nous sommes un petit peuple : 250 000 habitants, c’est peu. Nous ne pouvons pas nous permettre de nous disperser. Il nous faut travailler ensemble, construire ensemble. Nous avons trop cru en notre bonne étoile : nous sommes les plus beaux, nous sommes les meilleurs ! Le temps de l’argent facile n’est plus, les années de la cigale sont finies, définitivement, il faut revenir les pieds sur terre. Nous devons faire comme les fourmis, nous rassembler et travailler, travailler et encore travailler. Nous avons un beau pays, le pays ma’ohi, nous devons le respecter, le mettre en valeur intelligemment. Nous avons, nous ma’ohi, de souche et d’adoption, une coutume très belle qui est l’entraide, la solidarité, et c’est en ces temps douloureux que nous devons la faire vivre.

Voilà comment le Tavini Huiraatira et son président voient les défis qui se présentent à nous, le gou-vernement, les élus, le monde du travail, de l’entreprise, notre population, pour cette nouvelle année. No-tre volonté est de montrer que nous pouvons agir et rebondir pour que cette année 2012 soit placée sous le signe de l’espoir : celui de la relance de l’emploi et de notre économie, et le redressement de nos comptes."

Car : 8148