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Wallis et Futuna : comment faire face au départ massif des jeunes ?


Wallis et Futuna : comment faire face au départ massif des jeunes ?
Deux sénateurs, Sophie Joissains et Jean-Pierre Sueur, sont allés à Wallis. La commission des lois leur a demandé de dresser l'état des lieux sur l'évolution institutionnelle et le développement local de Wallis et Futuna. La population s’établit, selon le recensement de 2013, à 12 197 habitants.


Les deux îles doivent faire face à un départ massif de ses habitants, en particulier des jeunes. La population a diminué de 2 000 habitants depuis 1996 : il y a plus de Wallisiens en Nouvelle-Calédonie qu’à Wallis, notent les rapporteurs. « Si la perte de population se poursuit au rythme de la dernière décennie, le nombre des habitants de l’archipel pourrait chuter en dessous des 10 000 habitants d’ici 2040 », notent les deux sénateurs. « Cette situation invite plus que jamais les acteurs locaux à s’engager, avec l’appui de l’État, dans une démarche de développement de l’île, y compris au prix de certaines inflexions en matière coutumière. »
Les deux sénateurs ont dressé une série de recommandations.

Un meilleur accès au Service militaire adapté
Selon les deux sénateurs, il y aurait près d’un millier de personnes originaires de Wallis et Futuna au sein de l'armée française. « Il serait juste qu’en retour, les jeunes de l’archipel puissent bénéficier du service militaire adapté (SMA), largement plébiscité outre-mer, par une implantation locale à Futuna ou, à tout le moins, comme l’a esquissé la ministre des Outre-mer devant votre commission, par un contingent de places garanties pour les Wallisiens et Futuniens dans le régiment implanté en Nouvelle-Calédonie », soulignent les deux sénateurs.

Actualiser le droit
Les représentants syndicaux locaux ont insisté auprès des deux sénateurs sur « l’obsolescence du droit du travail et de la protection sociale applicable aux salariés du territoire ». « Ils ont dénoncé l’absence de règles protectrices en matière de maladie professionnelle ou d’accidents du travail ainsi qu’une dissymétrie des droits au congé maternité entre employés selon qu’ils sont régis ou non par le droit métropolitain », notent les deux sénateurs. Ceux-ci recommandent donc de mener, « au niveau des administrations centrales, un travail complet d’actualisation et d’adaptation du droit applicable dans cette collectivité d’outre-mer, ainsi que d’instaurer un dispositif d’appui auprès de la collectivité pour l’exercice de son propre pouvoir normatif ».

Élire un président pour 5 ans
Actuellement, le président de l'assemblée territoriale est élu pour un an. Tandis que ses membres sont élus pour 5 ans. « Depuis trois ans, quatre présidents se sont succédé, nuisant à l’efficacité et à l’influence de cette instance », notent les rapporteurs. « Notre collègue député Napole Polutélé évoquait devant vos rapporteurs le « ballet des majorités » qui se succèdent depuis trois ans. Vos rapporteurs se demandent si, dans un premier temps, l’élection pour la durée du mandat de l’assemblée territoriale et non à un rythme annuel du président de l’assemblée territoriale ne serait pas un facteur de stabilité, comme il est prévu depuis 2007 pour le président de l’assemblée de la Polynésie française ».

Confier la juridiction financière aux magistrats du Pacifique.

S’agissant de la juridiction financière, le Territoire de Wallis-et-Futuna continue de relever de la compétence directe de la Cour des comptes.
Les rapporteurs se « demandent si, comme pour le tribunal administratif, il ne serait pas plus pertinent, dans un souci de subsidiarité et d’efficacité, de rapprocher les magistrats financiers de la collectivité soumise à leur contrôle. Les missions exercées par la Cour des comptes pourraient alors être confiées à la chambre territoriale des comptes de la Nouvelle-Calédonie ou à une chambre territoriale des comptes rattachée à une autre juridiction financière qui serait celle de la Nouvelle-Calédonie ».

La place de la coutume

Une majeure partie de la population n’est pas intégrée dans une économie monétarisée, soulignent les deux sénateurs. « Cette situation constitue un obstacle fort au développement d’activités artisanales : certains produits réalisés et pouvant avoir une valeur monétaire ne sont pas vendus mais simplement donnés », notent-ils. « La coutume permet, à cet égard, d’entretenir des liens de solidarité forts qui expliquent ainsi l’absence de législation relative à des minima sociaux sur le territoire. Le fonctionnement coutumier est fondé sur le partage des ressources. Il faut cependant se garder de penser que chacun est traité de manière parfaitement égale. Ce système traditionnel est cependant en voie de déstabilisation par le développement d’une économie de plus en plus intégrée au système économique occidentalisé. En 1993, nos anciens collègues Jean-Marie Girault, Bernard Laurent, Michel Dreyfus-Schmidt et Camille Cabana esquissaient cette évolution en relevant que « ces références coutumières sont aujourd’hui moins bien supportées par ceux qui exercent un emploi salarié et sont entrés, de ce fait, dans le circuit économique et financier » à tel point qu’« il en résulte des tensions et un risque de rupture sociale particulièrement préoccupants » ».


Rédigé par Mélanie Thomas le Vendredi 28 Novembre 2014 à 17:18 | Lu 1426 fois