Paris, France | AFP | vendredi 17/06/2022 - Après près de deux ans de négociations, la levée temporaire des brevets protégeant les vaccins anti-Covid vient d'être actée par l'Organisation mondiale du Commerce (OMC), un acte symbolique rare mais qui pourrait avoir un effet limité.
Les 164 États membres de l'OMC se sont accordés vendredi sur une levée de ces brevets pendant cinq ans pour les pays en développement, une mesure jusqu'ici exceptionnelle dans le secteur pharmaceutique.
Concrètement, cette dérogation permet aux pays en développement "admissibles" de pouvoir eux aussi produire des vaccins, y compris utilisant la technologie de l'ARN messager, sans avoir l'autorisation du laboratoire découvreur initial.
Cet accord était réclamé depuis le début de la pandémie par des ONG et des pays comme l'Afrique du Sud et l'Inde, face à l'inégalité vaccinale. A date, selon l'OMS, si 60% de la population mondiale a reçu une primo-vaccination (deux doses), la situation reste très inéquitable, avec 17% de vaccinés en Libye, 8% au Nigeria ou encore moins de 5% au Cameroun.
Une situation dénoncée, y compris par les organisations internationales. Pour Tendayi Achiume, rapporteure spéciale de l'ONU sur les discriminations, "le statu quo actuel équivaut à un système d'"apartheid vaccinal".
Trop tard?
C'est la première fois qu'une levée temporaire des brevets est décidée par l'OMC. En 2001, l'organisation avait mis en place un mécanisme de licence obligatoire sur les traitements par trithérapies contre le VIH, c'est-à-dire des licences sur des brevets sans l'accord du détenteur du brevet. Cela avait permis de diminuer le prix pour les pays en développement, mais avec des difficultés à convaincre les laboratoires.
Par rapport à ces licences obligatoires, le nouvel accord de l'OMC "est un pas en avant", juge François Pochart, du cabinet August Debouzy, spécialiste des questions de brevets. "Les Etats peuvent décider seuls sans avoir à faire de demande. La vraie nouveauté, c'est que cette dérogation permet aussi au pays qui va produire le vaccin d'exporter vers d'autres marchés, vers un autre membre admissible, et pas seulement pour son pays", ajoute-t-il.
Mais cet accord sera-t-il efficace? C'est l'un des points soulevés par l'industrie pharmaceutique, hostile à la mesure, qui pointe du doigt la production actuelle de vaccins, très importante. A mi-juin, près de 14 milliards de doses ont été produites dans le monde, selon la société d'analyse de données scientifiques Aifinity. Des producteurs, comme le gigantesque Serum Institute of India, ont même décidé d'arrêter la production, faute de demande.
En outre, le plus important facteur de cette inégalité d'accès "n'est pas la propriété intellectuelle, mais le commerce. Cela n'a pas été correctement traité par l'OMC", fait valoir Thomas Cueni, patron de la Fédération internationale de l'industrie pharmaceutique (Ifpma). Pendant des mois, certains pays producteurs ont en effet bloqué l'exportation de vaccins, au nom de la souveraineté sanitaire.
Sans oublier les questions de logistique et d'accès aux soins pour les populations les plus défavorisées dans le monde. car même avec des vaccins, encore faut-il pouvoir les distribuer aux populations.
De leur côté, les pays et ONG qui ont milité pour plus d'égalité ne sont pas convaincus non plus. Il y a quelques jours, le ministre indien du Commerce lui-même avait indiqué ne pas croire que cet accord permette à la moindre nouvelle usine de se créer. "C'est tout simplement trop tard", a-t-il dit.
"Cela ne correspond pas à la demande initiale", souligne Jérôme Martin, cofondateur de l'Observatoire de la transparence des politiques du médicament, qui déplore que la dérogation ne concerne que les pays en développement. Il faut voir ce que cela donne sur le terrain, mais ce n'est pas ambitieux du tout", regrette-t-il auprès de l'AFP.
D'autant plus que pour les traitements contre le Covid, coûteux, l'OMC a encore six mois pour se prononcer.
"Nous sommes déçus qu'une véritable dérogation à la propriété intellectuelle (...) couvrant tous les outils médicaux Covid-19 et incluant tous les pays, n'ait pu faire l'objet d'un accord", abonde le docteur Christos Christou, président de MSF International, dans un communiqué.
Les 164 États membres de l'OMC se sont accordés vendredi sur une levée de ces brevets pendant cinq ans pour les pays en développement, une mesure jusqu'ici exceptionnelle dans le secteur pharmaceutique.
Concrètement, cette dérogation permet aux pays en développement "admissibles" de pouvoir eux aussi produire des vaccins, y compris utilisant la technologie de l'ARN messager, sans avoir l'autorisation du laboratoire découvreur initial.
Cet accord était réclamé depuis le début de la pandémie par des ONG et des pays comme l'Afrique du Sud et l'Inde, face à l'inégalité vaccinale. A date, selon l'OMS, si 60% de la population mondiale a reçu une primo-vaccination (deux doses), la situation reste très inéquitable, avec 17% de vaccinés en Libye, 8% au Nigeria ou encore moins de 5% au Cameroun.
Une situation dénoncée, y compris par les organisations internationales. Pour Tendayi Achiume, rapporteure spéciale de l'ONU sur les discriminations, "le statu quo actuel équivaut à un système d'"apartheid vaccinal".
Trop tard?
C'est la première fois qu'une levée temporaire des brevets est décidée par l'OMC. En 2001, l'organisation avait mis en place un mécanisme de licence obligatoire sur les traitements par trithérapies contre le VIH, c'est-à-dire des licences sur des brevets sans l'accord du détenteur du brevet. Cela avait permis de diminuer le prix pour les pays en développement, mais avec des difficultés à convaincre les laboratoires.
Par rapport à ces licences obligatoires, le nouvel accord de l'OMC "est un pas en avant", juge François Pochart, du cabinet August Debouzy, spécialiste des questions de brevets. "Les Etats peuvent décider seuls sans avoir à faire de demande. La vraie nouveauté, c'est que cette dérogation permet aussi au pays qui va produire le vaccin d'exporter vers d'autres marchés, vers un autre membre admissible, et pas seulement pour son pays", ajoute-t-il.
Mais cet accord sera-t-il efficace? C'est l'un des points soulevés par l'industrie pharmaceutique, hostile à la mesure, qui pointe du doigt la production actuelle de vaccins, très importante. A mi-juin, près de 14 milliards de doses ont été produites dans le monde, selon la société d'analyse de données scientifiques Aifinity. Des producteurs, comme le gigantesque Serum Institute of India, ont même décidé d'arrêter la production, faute de demande.
En outre, le plus important facteur de cette inégalité d'accès "n'est pas la propriété intellectuelle, mais le commerce. Cela n'a pas été correctement traité par l'OMC", fait valoir Thomas Cueni, patron de la Fédération internationale de l'industrie pharmaceutique (Ifpma). Pendant des mois, certains pays producteurs ont en effet bloqué l'exportation de vaccins, au nom de la souveraineté sanitaire.
Sans oublier les questions de logistique et d'accès aux soins pour les populations les plus défavorisées dans le monde. car même avec des vaccins, encore faut-il pouvoir les distribuer aux populations.
De leur côté, les pays et ONG qui ont milité pour plus d'égalité ne sont pas convaincus non plus. Il y a quelques jours, le ministre indien du Commerce lui-même avait indiqué ne pas croire que cet accord permette à la moindre nouvelle usine de se créer. "C'est tout simplement trop tard", a-t-il dit.
"Cela ne correspond pas à la demande initiale", souligne Jérôme Martin, cofondateur de l'Observatoire de la transparence des politiques du médicament, qui déplore que la dérogation ne concerne que les pays en développement. Il faut voir ce que cela donne sur le terrain, mais ce n'est pas ambitieux du tout", regrette-t-il auprès de l'AFP.
D'autant plus que pour les traitements contre le Covid, coûteux, l'OMC a encore six mois pour se prononcer.
"Nous sommes déçus qu'une véritable dérogation à la propriété intellectuelle (...) couvrant tous les outils médicaux Covid-19 et incluant tous les pays, n'ait pu faire l'objet d'un accord", abonde le docteur Christos Christou, président de MSF International, dans un communiqué.