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Une crue et adieu les crustacés


 
Tahiti, le 25 janvier 2022 - En février 2020, les fortes pluies sur Moorea avaient conduit au débordement de la rivière Opunohu, allant jusqu’à inonder les bassins voisins de la société d’aquaculture. La production de crevettes était alors partie dans la nature. Des travaux réalisés à proximité par le Pays étant à l’origine du sinistre, la société d’aquaculture pourrait obtenir environ 11,3 millions de Fcfp en réparation du préjudice subi sur son exploitation.
 
Le 29 février 2020, l’île sœur connaissait un épisode des plus pluvieux. Plus de 310 mm d’eau était tombés en peu de temps. Un phénomène d’une telle ampleur n’intervient que tous les 50 ans. Des routes et maisons avaient été inondées et le lac de Temae avaient également débordé. A Opunohu, les bassins de la société d’aquaculture avaient été submergés. Les crevettes d’élevage avaient alors recouvré leur liberté en quittant le milieu artificiel pour rejoindre le milieu naturel. Mais si le phénomène est entièrement imputable à Mère nature, l’Homme est venu amplifier les dégâts. Au tribunal administratif de Papeete ce mardi, la responsabilité du Pays dans le sinistre était examinée.
 
Débit deux fois plus important que prévu
 
En effet, dans le cadre de l’opération de démolition et reconstruction du pont de Opunohu, menée par la Direction de l’équipement, l’entreprise JL Polynésie avait été amenée à mettre en place un pont provisoire pour maintenir la circulation. Ce faisant, l’entreprise du BTP avait, pour réaliser cet ouvrage, rétréci le passage de l’eau de la rivière vers la mer. Or, ce jour-là, le débit de la rivière était alors le double de ce qui était prévu, obligeant l’eau à trouver un itinéraire bis en traversant les parcelles proches exploitées par la société d’aquaculture. Fortes pluies et rivière bridée, un cocktail peu apprécié des crevettes de Moorea. Il avait ainsi conduit au débordement des onze bassins et à l’évasion fortuite des crustacés. Un rapport d’expertise confirmait rapidement le lien de cause à effets, le sinistre étant la conséquence du sous-dimensionnement de l’ouvrage provisoire. Les travaux en aval avaient engendré la fuite des décapodes marins en amont.
 
11,3 millions de préjudice
 
En séance, le rapporteur public du tribunal administratif a vite écarté le cas de force majeure. L’épisode pluvieux n’était en effet pas si imprévisible que cela et si les parcelles sont effectivement classées pour partie en zone inondable, cela n’exonère pas le Pays de sa responsabilité. La société doit ainsi être indemnisée. Les conditions plus qu’humides ont en effet occasionné des pertes très sèches pour l’entreprise. Des matériels ainsi que la nourriture pour l’élevage ont été endommagés de même que le groupe électrogène. La société d’aquaculture estimait à près de 13 millions de Fcfp le montant du préjudice dont 7,2 millions pour sa production qui avait pris la tangente. Si l’animal est nageur, il n’est pas domestique. Sa propension à revenir de son propre chef à son point de départ est assez faible et la capacité de l’entreprise à remettre en exploitation ses bassins s’en est trouvé réduite à court terme. Entre les pertes de matériels, de production et d’exploitation, le rapporteur public a considéré que le préjudice, à indemniser par le Pays, pouvait être estimé à 11,3 millions de Fcfp. La décision est attendue pour le 8 février prochain.
 

Rédigé par Sébastien Petit le Mardi 25 Janvier 2022 à 20:09 | Lu 3426 fois