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Un rien suffit à emballer l'effet de serre et à transformer une planète bleue en enfer


Crédit HO / NASA / AFP
Crédit HO / NASA / AFP
Genève, Suisse | AFP | lundi 18/12/2023 - Une équipe de chercheurs franco-suisse a simulé pour la première fois la totalité du processus d'emballement de l'effet de serre qui peut transformer une planète parfaitement habitable comme la Terre en une boule stérile aux températures infernales.

Une avancée qui doit permettre notamment de mieux étudier les planètes en-dehors du système solaire mais pourrait aussi avoir des retombées pour des études plus terrestres.  

L'équipe d’astronomes de l’Université de Genève (Unige), avec le soutien des laboratoires du CNRS de Paris et Bordeaux, à l'origine de cette "première mondiale" démontre qu'une légère augmentation de la luminosité du Soleil serait suffisante "pour provoquer cet emballement et rendre notre planète inhabitable" en élevant la température de plusieurs dizaines de degrés.

A titre de comparaison, le réchauffement climatique, provoqué par l'homme et dû à la concentration de gaz à effets de serre dans l'atmosphère s'exprime plutôt en dixièmes de degré Celsius d'augmentation de température.

"Jusqu’à présent, les autres études clés en climatologie se sont concentrées sur l’étude soit de l’état tempéré avant l’emballement, soit de l’état inhabitable à l’issue de l’emballement", explique Martin Turbet, chercheur dans les laboratoires CNRS de Paris et Bordeaux, et co-auteur de l’étude publiée dans la revue Astronomy & Astrophysics.

"C’est la première fois qu’une équipe étudie la transition en elle-même avec un modèle 3D de climat global, et s’intéresse à la façon dont le climat et l’atmosphère évoluent durant ce processus", ajoute-t-il, cité dans un communiqué de l'Unige diffusé lundi.

Recherche de la vie 

La vapeur d'eau joue un rôle central en piégeant la chaleur du rayonnement solaire un peu à la manière d'une couverture de survie et l'empêche ainsi de se dissiper dans le vide spatial. C'est l'effet de serre.

Un peu d'effet de serre peut créer les conditions tempérées connues par exemple sur Terre, trop d'effet de serre et c'est la cocotte minute.

"Il existe un seuil critique pour cette quantité de vapeur d’eau au-delà duquel la planète ne peut plus refroidir. À partir de là, tout s’emballe, jusqu’à ce que les océans finissent par s’évaporer totalement et que la température atteigne plusieurs centaines de degrés", explique Guillaume Chaverot, ancien chercheur post-doctorant au Département d’astronomie de l’Unige, et auteur principal de l’étude. 

L’un des points clés de l’étude décrit l'apparition "d’un motif nuageux bien particulier, participant à l’effet d’emballement et rendant le phénomène inexorable", explique Guillaume Chaverot.

Ce motif pourrait représenter une "empreinte" spécifique du phénomène éventuellement détectable sur des exoplanètes - ces planètes qui orbitent autour d’autres étoiles que le Soleil et toujours plus nombreuses à être répertoriées par les astronomes.

La première exoplanète a d'ailleurs été découverte par deux chercheurs de l'Unige. 

"L’une de nos principales motivations est de déterminer le potentiel de celles-ci d’abriter la vie", explique la professeure Émeline Bolmont, directrice du Centre pour la Vie dans l’Univers (CVU) de l’Unige et co-auteure de l’étude.

Extinction 

Mais les auteurs de l'étude y voient aussi matière à recherche sur la Terre. Il s'agirait de déterminer si à l'instar d'un accroissement infime de la luminosité du Soleil, les gaz à effet de serre peuvent aussi démarrer ce processus d’emballement. 

"Si oui, la question suivante sera de déterminer si les températures de déclenchement sont les mêmes pour les deux processus", souligne le communiqué.

"Dans l’hypothèse où ce processus d’emballement s’enclencherait, une évaporation de seulement 10 mètres de la surface des océans résulterait en une augmentation de la pression atmosphérique au sol d’1 bar. En quelques centaines d’années, nous atteindrions une température de plus de 500°C au sol", explique Guillaume Chauverot.

"Plus tard, nous atteindrions même jusqu’à 273 bars de pression et plus de 1.500°C, lorsque la totalité des océans finirait par être évaporée", ajoute t-il.

Il a obtenu  une bourse de recherche pour étudier plus avant la question à l’Institut de Planétologie et d’Astrophysique de Grenoble (IPAG) en France.

le Lundi 18 Décembre 2023 à 07:06 | Lu 515 fois