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Teavatea mise sur les crevettes à Hitia’a


Teavatea Wong devrait procéder à sa première récolte à la fin du mois (Crédit : Anne-Charlotte Lehartel).
Teavatea Wong devrait procéder à sa première récolte à la fin du mois (Crédit : Anne-Charlotte Lehartel).
Tahiti, le 14 juin 2024 – Des études de commerce et sports aquatiques à l’élevage en mer de crevettes bleues, c’est la voie choisie par Teavatea Wong. Accompagné par la DRM, le jeune aquaculteur de 24 ans finalise ses premiers tests, qui s’avèrent prometteurs pour le développement de son activité dans le lagon de Hitia’a. Malgré les circonstances pour la filière, sa motivation reste intacte.
 
De prime abord, rien ne prédestinait Teavatea Wong à se lancer dans l’aquaculture. Ce secteur d’activité réunit pourtant plusieurs centres d’intérêt du jeune homme de 24 ans, qui a poursuivi ses études supérieures à l’École de Commerce de Tahiti (ECT), après un bac ES au lycée Samuel Raapoto. “C’est lors d’un stage en Australie que j’ai découvert le potentiel de l’élevage des crevettes, en visitant une ferme qui occupait une grande place dans l’économie locale. Ça a été un déclic, d’autant que j’ai toujours voulu m’orienter vers l’entrepreneuriat, tout en étant passionné par les sports aquatiques”, confie-t-il, décidé à se tourner vers l’élevage en mer.
 
Formé à la gestion économique, Teavatea Wong perfectionne actuellement ses connaissances techniques sur une cage-pilote de 6 m2, installée devant la maison familiale, dans le lagon de Hitia’a. “C’était important pour moi de me lancer dans la commune où j’ai grandi, et aussi plus simple en termes de suivi et de surveillance par rapport aux vols.
 

Cette production-test affiche un excellent taux de survie et de croissance.
Cette production-test affiche un excellent taux de survie et de croissance.

Des résultats prometteurs


Mûri depuis trois ans, son projet a connu une première étape majeure le 20 février dernier, avec la mise en cage des premières larves de crevettes bleues. Et le moins que l’on puisse dire, c’est que le test est concluant. “Aujourd’hui, elles pèsent entre 18 et 19 grammes, ce qui est proche du poids moyen de commercialisation, de l’ordre de 20 grammes. J’ai de très bons résultats pour l’instant, avec un taux de survie record autour de 94%, ce qui serait une première sur des cages en mer, d’après la Direction des ressources marines, qui m’accompagne dans le cadre d’une convention de partenariat. Pareil pour la croissance, avec presque deux mois d’avance. C’est vraiment encourageant pour la suite”, glisse le porteur de projet.
 
Une première vente en direct sous le nom de société Ninamu Farm, référence au bleu des crevettes et du lagon, est prévue entre fin juin et début juillet. Teavatea Wong estime sa production inaugurale entre 100 et 150 kg. À terme, il table sur une production annuelle de 3 à 5 tonnes, avec 12 cages de 25 m2, et la création d’un à deux emplois selon l’évolution du projet. Soutenu par sa famille, le jeune entrepreneur compte également solliciter des aides du Pays et se tourner vers des organismes de micro-crédit pour se développer. Malgré l’annonce récente de la fermeture de l’élevage de Toahotu et de nouvelles difficultés de production à l’écloserie de Vairao, sa motivation reste intacte.
 

L’appel de la mer


Entre passion et ambition, il est animé par la volonté de mettre en lumière le secteur primaire, côté mer. “Je me suis beaucoup cherché. En école de commerce, on nous parle de bureaux, de banques, de concours administratifs, mais le marché est saturé. À côté de ça, on a 5 millions de km2 de lagon et d’océan à valoriser en Polynésie. À Hitia’a, il y a des jeunes qui connaissent parfaitement la mer. Il faut aller vers ces métiers, même si ce n’est pas facile. J’ai commencé en vendant mon poisson au bord de la route”, encourage-t-il.
 
Teavatea Wong envisage d’ailleurs de donner rapidement une dimension pédagogique à sa ferme pour pouvoir partager et, pourquoi pas, transmettre sa passion aux plus jeunes.
 

Respecter l’environnement

L’élevage de Teavatea Wong a la particularité de se situer dans le rāhui de Hitia’a. “J’ai vraiment envie de mettre l’accent sur la propreté du lagon, qui est un pilier pour l’aquaculture. Sans un lagon riche et bien entretenu, le projet ne pourra pas évoluer. C’est dans mon intérêt de mettre en place des actions pour le protéger au maximum. Tous les matins, je plonge pour voir s’il y a trop de restes pour adapter la dose d’aliment. Je ramasse le surplus et les excréments pour les revaloriser dans mon compost”, explique-t-il. Ses crevettes sont nourries avec des granulés importés d’Australie. Si le jeune aquaculteur envisage de produire son propre aliment, difficile de s’en passer pour l’instant. Il souligne toutefois un atout : “L’avantage de l’élevage en mer, c’est l’apport d’aliments complémentaires avec les larves naturellement présentes dans le milieu, dont les crevettes raffolent.”

L’intégration sociale du projet

Qu’ils soient terrestres ou maritimes, les élevages sont souvent confrontés à des difficultés en cas de proximité avec des habitations. Mardi 4 juin, une réunion houleuse s’est tenue à la mairie de Hitia’a pour tenter de solutionner un conflit de voisinage. En effet, un riverain dénonce une pollution visuelle, nuisible à ses activités de location et de réception, ainsi qu’une atteinte à son intimité, tout en regrettant qu’une présentation du projet n’ait pas eu lieu en amont de l’installation de la première cage flottante. Néanmoins favorable au projet, il a sollicité un déplacement de la ferme quelques dizaines de mètres plus loin. Pour le maire de Hitia’a o te ra, il s’est avéré difficile de trouver un compromis, dans l’immédiat. “Le porteur de projet a installé sa ferme devant chez lui avec les autorisations nécessaires, donc je ne vois pas le problème. Un déplacement a un coût, et ce serait pour mettre devant chez quelqu’un d’autre, donc ça risque d’être compliqué. C’est une première chez nous et nous aimerions que ça inspire d’autres jeunes de la commune, donc j’espère que les deux partis pourront s’accorder », nous a indiqué Henri Flohr, à l’issue de la rencontre.

Rédigé par Anne-Charlotte Lehartel le Vendredi 14 Juin 2024 à 08:48 | Lu 4173 fois