Amélie Oudéa-Castera, ministre des sports et des Jeux Olympiques et Paralympiques, rassure : " Nous ferons tout pour préserver l'authenticité des lieux."
Tahiti, le 17 août 2023 - Au lendemain de la Shiseido Tahiti Pro 2023, la ministre nationale des Sports et des Jeux Olympiques et Paralympiques, Amélie Oudéa-Castera, s'est rendue une nouvelle fois à la Presqu'île afin de porter une attention toute particulière aux différents acteurs locaux et internationaux qui participeront à l'organisation des Jeux de Paris 2024. Bilan, enjeux, et perspectives d'avenir avec la Polynésie, la ministre des sports fait le point au micro de Tahiti Infos.
La Shiseido Tahiti Pro 2023 représentait la dernière grande répétition générale avant l'épreuve olympique de 2024, quel bilan faites-vous de cette compétition ?
Depuis mon arrivée sur le territoire, j'ai vraiment eu des discussions très riches et très intenses, afin de comprendre et cerner justement tous les détails de cette préparation. Ce “test event” a été une grande chance pour les différentes équipes. Avec le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, nous avons déjà pu, hier [Mercredi, NDLR], faire le point sur les questions de sécurité. Ce matin encore nous discutions des sujets concernant les infrastructures. Le nouveau gouvernement en place, avec l'impulsion de son président Moetai Brotherson et de la ministre des sports Nahema Temarii, a vraiment poussé l'avancée de ces infrastructures, y compris sur le plan budgétaire afin de remettre de l'ordre sur certaines choses. Je pense que désormais nous avons une vision très précise du projet, et j'ai la conviction que tout sera livré en temps et en heure. Il y a forcément encore un peu de travail, des choses à ajuster, de l'attention à apporter car les délais sont exigeants, mais il y a maintenant une vision claire sur la répartition des tâches : les athlètes seront logés sur l'Aranui qui sera la base de vie en journée pour ces athlètes également ; le domaine Rose avec l'accueil des équipes ; le centre des médias ; toute la partie “back office” ; les volontaires, etc. Aujourd'hui nous avons une équation qui est très stabilisée, et ce qui a été vécu là lors de la Tahiti Pro est très rassurant justement à cet égard.
Ce n'est que la deuxième fois, dans toute l'histoire des Jeux Olympiques, qu'une épreuve sera délocalisée de la sorte. La première fois étant en 1956, lors des Jeux d'Australie, où les épreuves d'équitation ont du être déplacées en Suède. Comment fait-on, à Paris, pour faire en sorte que cette épreuve délocalisée de Teahupo'o prenne toute sa place dans les Jeux de 2024 ?
Tout d'abord, cela est possible car il y a une très bonne collaboration sur place entre les équipes du gouvernement de Polynésie française, Paris 2024, qui a une représentante permanente ici en la personne de Barbara Martins-Nio, le haut-commissaire Éric Spitz et ses équipes, sans oublier les élus locaux et cet engouement dans les différentes communes. Nous étions hier à Vairao pour rencontrer le maire, Tetuanui Hamblin, et sentir son goût pour le sport, sa compréhension des choses concernant cette opportunité historique d'impulser quelque chose de vraiment merveilleux. Cela facilite énormément les relations entre Paris et Tahiti. L'année dernière Tony Estanguet, président du comité d'organisation de Paris 2024, était descendu lui-même sur Tahiti. On veille, grâce à ces visites de terrain depuis Paris, à avoir cette compréhension très fine de comment les choses se passent, se planifient. Il y a aussi des comités de pilotage, qui s'organisent avec des visio-conférences à distance, et qui permettent de suivre l'avancée des différents chantiers. Je suis témoin de la vitesse à laquelle les choses se mettent en place ici, car nous avons le même amour pour le sport, la même exigence, la même volonté, pour que ces Jeux soient de grands Jeux Olympiques ! Il y a tout ici pour que cela soit une grande réussite.
Pour autant, ces Jeux Olympiques ne font pas l'unanimité. Si, bien souvent on aime à rappeler les avantages économiques d'un tel événement, ici, les gens veulent préserver leur quiétude, leur simplicité, leur paysage. Êtes-vous consciente de ces enjeux ?
Je suis absolument consciente de ça et je pense que l'on a la capacité de marier ces différentes équations. Je pense qu'il faut préserver ici le côté écologiquement unique de ce site, avec notamment les études d'impact menés vis-à-vis de l'Aranui et de son mouillage par exemple. D'autres études sont également menées dans ce sens afin de réduire au maximum l'impact carbone. En logeant les athlètes sur l'Aranui nous espérons d'ailleurs préserver la quiétude des habitants locaux. De même que la compétition devra avoir le moins d'impact possible sur la vie, le quotidien des gens de Teahupo'o. Et en même temps, nous souhaitons que les locaux participent en quelques sortes à cet événement, qu'ils puissent se l'approprier. D'où l'importance des trois zones de célébrations : celle du PK 0, puis celle qui sera à Papeete, et enfin celle de Papara. Nous voulons que la population locale profite de la joie de ces Jeux, qu'elle la vive. C'est tout cet équilibre que nous voulons soigner. L'un ne va pas contre l'autre. Il faut que chaque chose soit préservée et c'est cette compréhension locale, cet échange avec les locaux, qui va nous permettre de sécuriser cela. Je suis convaincue que nous allons y arriver avec cet état d'esprit.
Il y a quelques mois, des familles ont tout perdu ici lors des inondations. Certaines d'entre elles, ne s'en sont toujours pas remises. Et aujourd'hui, on leur parle d'une tour qui coûtera des centaines de millions de francs, plantée dans le lagon pour les deux semaines de compétition. Vous réalisez cette amertume naissante chez la population locale vis à vis des Jeux ?
Je pense qu'en même temps cette nouvelle tour des juges va être un très bel héritage aussi pour la suite. Il y a une mobilisation très importante des fonds apportés par notre équipe gouvernementale. On l'annonçait hier, on apporte un complément de financement de 628 000 euros [environ 75 millions de francs], qui va porter notre aide à 2,5 millions d’euros, ce qui représente la moitié du budget de ce projet et un très bel investissement. Nous pensons que l'aluminium qui sera utilisé pour la tour assurera sa robustesse pour toutes les éditions à venir de la Tahiti Pro. Nous ne sommes pas dans le gigantisme, puisque la tour sera approximativement de la même taille. Mais cela permettra une qualité de retransmission et de pilotage de ces grands événements qui, j'en suis sûre, sera très utile. On parle ici d'une modernisation harmonieuse qui résistera au temps. Je pense que c'est une chance et l'occasion de marier des innovations technologiques. Ce sport mérite ça, nos champions méritent ça : la plus belle tour des juges qui soit.
En parlant de durer, parlez-vous déjà de l'après Paris 2024 avec le gouvernement local ? Est-ce que ces Jeux sont aussi l'occasion de nouer des liens durables et affirmés entre le sport français et le sport polynésien ?
C'est exactement le sens de mes échanges avec la ministre des sports, Nahema Temarii. Nous avons d'abord en perspective non seulement ces éditions futures de la Tahiti Pro, mais aussi la perspective des Jeux du Pacifique 2027 qui seront également un fantastique rendez-vous. Nous espérons nous construire autour de ce projet et faire profiter la Polynésie de ces nouveaux savoir-faire, de l'évolution de certaines compétences, notamment en termes de cyber sécurité ou encore de développement des données liées à la pratique sportive par exemple. Nous souhaitons aussi travailler sur les filières sportives, comme le surf, et les rendre plus accessibles aux Polynésiens à travers une évolution des modalités de formation, une sécurisation juridique des diplômes etc. Nous cherchons la professionnalisation et la viabilisation économique de ces filières. C'est aussi ça l'héritage de ces Jeux.
Propos recueillis par Wendy Cowan
La Shiseido Tahiti Pro 2023 représentait la dernière grande répétition générale avant l'épreuve olympique de 2024, quel bilan faites-vous de cette compétition ?
Depuis mon arrivée sur le territoire, j'ai vraiment eu des discussions très riches et très intenses, afin de comprendre et cerner justement tous les détails de cette préparation. Ce “test event” a été une grande chance pour les différentes équipes. Avec le ministre de l'Intérieur, Gérald Darmanin, nous avons déjà pu, hier [Mercredi, NDLR], faire le point sur les questions de sécurité. Ce matin encore nous discutions des sujets concernant les infrastructures. Le nouveau gouvernement en place, avec l'impulsion de son président Moetai Brotherson et de la ministre des sports Nahema Temarii, a vraiment poussé l'avancée de ces infrastructures, y compris sur le plan budgétaire afin de remettre de l'ordre sur certaines choses. Je pense que désormais nous avons une vision très précise du projet, et j'ai la conviction que tout sera livré en temps et en heure. Il y a forcément encore un peu de travail, des choses à ajuster, de l'attention à apporter car les délais sont exigeants, mais il y a maintenant une vision claire sur la répartition des tâches : les athlètes seront logés sur l'Aranui qui sera la base de vie en journée pour ces athlètes également ; le domaine Rose avec l'accueil des équipes ; le centre des médias ; toute la partie “back office” ; les volontaires, etc. Aujourd'hui nous avons une équation qui est très stabilisée, et ce qui a été vécu là lors de la Tahiti Pro est très rassurant justement à cet égard.
Ce n'est que la deuxième fois, dans toute l'histoire des Jeux Olympiques, qu'une épreuve sera délocalisée de la sorte. La première fois étant en 1956, lors des Jeux d'Australie, où les épreuves d'équitation ont du être déplacées en Suède. Comment fait-on, à Paris, pour faire en sorte que cette épreuve délocalisée de Teahupo'o prenne toute sa place dans les Jeux de 2024 ?
Tout d'abord, cela est possible car il y a une très bonne collaboration sur place entre les équipes du gouvernement de Polynésie française, Paris 2024, qui a une représentante permanente ici en la personne de Barbara Martins-Nio, le haut-commissaire Éric Spitz et ses équipes, sans oublier les élus locaux et cet engouement dans les différentes communes. Nous étions hier à Vairao pour rencontrer le maire, Tetuanui Hamblin, et sentir son goût pour le sport, sa compréhension des choses concernant cette opportunité historique d'impulser quelque chose de vraiment merveilleux. Cela facilite énormément les relations entre Paris et Tahiti. L'année dernière Tony Estanguet, président du comité d'organisation de Paris 2024, était descendu lui-même sur Tahiti. On veille, grâce à ces visites de terrain depuis Paris, à avoir cette compréhension très fine de comment les choses se passent, se planifient. Il y a aussi des comités de pilotage, qui s'organisent avec des visio-conférences à distance, et qui permettent de suivre l'avancée des différents chantiers. Je suis témoin de la vitesse à laquelle les choses se mettent en place ici, car nous avons le même amour pour le sport, la même exigence, la même volonté, pour que ces Jeux soient de grands Jeux Olympiques ! Il y a tout ici pour que cela soit une grande réussite.
Pour autant, ces Jeux Olympiques ne font pas l'unanimité. Si, bien souvent on aime à rappeler les avantages économiques d'un tel événement, ici, les gens veulent préserver leur quiétude, leur simplicité, leur paysage. Êtes-vous consciente de ces enjeux ?
Je suis absolument consciente de ça et je pense que l'on a la capacité de marier ces différentes équations. Je pense qu'il faut préserver ici le côté écologiquement unique de ce site, avec notamment les études d'impact menés vis-à-vis de l'Aranui et de son mouillage par exemple. D'autres études sont également menées dans ce sens afin de réduire au maximum l'impact carbone. En logeant les athlètes sur l'Aranui nous espérons d'ailleurs préserver la quiétude des habitants locaux. De même que la compétition devra avoir le moins d'impact possible sur la vie, le quotidien des gens de Teahupo'o. Et en même temps, nous souhaitons que les locaux participent en quelques sortes à cet événement, qu'ils puissent se l'approprier. D'où l'importance des trois zones de célébrations : celle du PK 0, puis celle qui sera à Papeete, et enfin celle de Papara. Nous voulons que la population locale profite de la joie de ces Jeux, qu'elle la vive. C'est tout cet équilibre que nous voulons soigner. L'un ne va pas contre l'autre. Il faut que chaque chose soit préservée et c'est cette compréhension locale, cet échange avec les locaux, qui va nous permettre de sécuriser cela. Je suis convaincue que nous allons y arriver avec cet état d'esprit.
Il y a quelques mois, des familles ont tout perdu ici lors des inondations. Certaines d'entre elles, ne s'en sont toujours pas remises. Et aujourd'hui, on leur parle d'une tour qui coûtera des centaines de millions de francs, plantée dans le lagon pour les deux semaines de compétition. Vous réalisez cette amertume naissante chez la population locale vis à vis des Jeux ?
Je pense qu'en même temps cette nouvelle tour des juges va être un très bel héritage aussi pour la suite. Il y a une mobilisation très importante des fonds apportés par notre équipe gouvernementale. On l'annonçait hier, on apporte un complément de financement de 628 000 euros [environ 75 millions de francs], qui va porter notre aide à 2,5 millions d’euros, ce qui représente la moitié du budget de ce projet et un très bel investissement. Nous pensons que l'aluminium qui sera utilisé pour la tour assurera sa robustesse pour toutes les éditions à venir de la Tahiti Pro. Nous ne sommes pas dans le gigantisme, puisque la tour sera approximativement de la même taille. Mais cela permettra une qualité de retransmission et de pilotage de ces grands événements qui, j'en suis sûre, sera très utile. On parle ici d'une modernisation harmonieuse qui résistera au temps. Je pense que c'est une chance et l'occasion de marier des innovations technologiques. Ce sport mérite ça, nos champions méritent ça : la plus belle tour des juges qui soit.
En parlant de durer, parlez-vous déjà de l'après Paris 2024 avec le gouvernement local ? Est-ce que ces Jeux sont aussi l'occasion de nouer des liens durables et affirmés entre le sport français et le sport polynésien ?
C'est exactement le sens de mes échanges avec la ministre des sports, Nahema Temarii. Nous avons d'abord en perspective non seulement ces éditions futures de la Tahiti Pro, mais aussi la perspective des Jeux du Pacifique 2027 qui seront également un fantastique rendez-vous. Nous espérons nous construire autour de ce projet et faire profiter la Polynésie de ces nouveaux savoir-faire, de l'évolution de certaines compétences, notamment en termes de cyber sécurité ou encore de développement des données liées à la pratique sportive par exemple. Nous souhaitons aussi travailler sur les filières sportives, comme le surf, et les rendre plus accessibles aux Polynésiens à travers une évolution des modalités de formation, une sécurisation juridique des diplômes etc. Nous cherchons la professionnalisation et la viabilisation économique de ces filières. C'est aussi ça l'héritage de ces Jeux.
Propos recueillis par Wendy Cowan