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Te mana o te moana, 20 ans, poursuit ses objectifs


Les tortues, blessées, restent en surface. Elles sont sensibles au soleil, leur carapace doit donc être protégée du soleil.
Les tortues, blessées, restent en surface. Elles sont sensibles au soleil, leur carapace doit donc être protégée du soleil.
Tahiti, le 24 septembre 2024 - L'association Te mana o te moana a fêté ce lundi ses 20 ans d'existence, l'occasion de faire le point sur deux décennies d'actions et de sensibilisation, mais aussi sur les projets récemment engagés.

Cette journée de lundi a été ponctuée, pour Te mana o te moana, de visites guidées assurées par les membres de l’association à l'InterContinental de Tahiti. Elle s'est conclue par une conférence grand public sur les tortues. L'association a 20 ans, jour pour jour. Elle a été fondée le 23 septembre 2004 par le docteur Cécile Gaspar et Richard Bailey pour participer à la sauvegarde du monde marin polynésien et en particulier des tortues marines à travers ses actions de découverte, d'éducation et de protection. L'objectif ? Mettre en place des actions concrètes pour comprendre, éduquer et protéger l'environnement marin polynésien.
 
L'association met en place des actions pour comprendre, soigner et protéger les tortues marines de Polynésie française. Elle créé des supports, programmes et projets pédagogiques pour sensibiliser à la protection de l'environnement marin. Enfin, elle monte des projets combinant science, nature et culture pour une meilleure compréhension et protection de l’environnement marin polynésien.
 
De Moorea à Tahiti
 
Te mana o te moana s'est d'abord installée à Moorea. Le petit centre d’accueil de tortues blessées construit à l’hôtel InterContinental a rapidement grandi. Un bâtiment a été construit, une salle de classe a vu le jour et le lagon a été aménagé. En 20 ans, pas moins de 650 individus ont pu bénéficier de ces soins. La moitié a été trouvée par des résidents, riverains… Parmi cette moitié, 70% ont été impactés par l’humain (harponnage, ingestion de sac plastique, blessure…). L’association récupère par ailleurs des bébés tortues tout juste sortis du nid pour leur donner plus de chances de survie. Depuis 2007, Te mana o te moana travaille sur Tetiaroa. Elle réalise un suivi des tortues à la saison de la ponte entre septembre et avril.
 
En 2023, le centre a déménagé, il s'est installé définitivement à Tahiti. Cette année-là, l'association a également mis en place un réseau de sciences participatives baptisé Tia'i Honu. Il invite la population locale – plongeurs, pêcheurs, baigneurs... – à partager ses observations. Des formations sont proposées, des supports pédagogiques distribués et des conférences données.
 
Au vu des retours, il semble que les populations de tortues se portent bien. “Nous voyons de plus en plus d'individus subadultes, c'est-à-dire d'adultes qui ne sont pas encore en âge de se reproduire dans les lagons de Tahiti et Moorea et sur les pentes externes des récifs”, rapporte Cécile Gaspar. C'est un progrès. À Tetiaroa, il y a 15 ans, l'association recensait une vingtaine de traces de tortues sur le sable par saison (ces traces sont faites par les femelles qui remontent les plages pour aller pondre), aujourd'hui elles sont 140.
 
Ceci étant, “on sera complètement rassurés quand on verra plus de pontes sur les îles urbanisées comme Tahiti et Moorea”. Pour cela, les riverains doivent veiller à attacher leurs chiens la nuit et à éteindre les lumières car cela effraie et désoriente les tortues. Il faut en plus, dès à présent, cesser le bétonnage des côtes. “Nous expérimentons des solutions fondées sur la nature”, indique à ce propos Cécile Gaspar. À Paea ainsi que sur deux sites de Moorea et quatre de Tetiaroa, Te mana o te moana avec la Fape a révégétalisé le bord de mer en suivant un protocole étudié afin de les stabiliser.
 
Prise de conscience générale
 
L'association se concentre toujours plus sur les tortues, un animal symbolique et emblématique en Polynésie. “Il nous permet d'aborder des questions plus générales sur l'environnement et sa protection sur terre comme en mer.” En effet, les tortues vivent en mer mais pondent sur terre. Le logo de Te mana o te moana illustre cette volonté, sur le corps d'un nautilus ont d'abord été dessinées 14 espèces sous-marines, puis sept. La troisième version vient d'être dévoilée. Elle ne conserve que la tortue.
 
Au-delà des actions, Cécile Gaspar se réjouit de la prise de conscience générale sur les thématiques environnementales et de l'intérêt que ces thématiques suscitent. Par exemple, en 2005, “nous avons accueilli un stagiaire que nous sommes allés chercher”. Aujourd'hui, “nous recevons plus de dix demandes par jour !”
 
D'un point de vue politique, les choses bougent elles aussi. Il faut rappeler que c'est le gouvernement polynésien qui, en 1971, a pris les premières mesures de protection en instaurant des quotas de pêche précisant le nombre mais aussi la taille et les périodes autorisés. En 1990, l'arrêté a été modifié pour interdire toute consommation, capture, mutilation et détention des tortues. Les trafiquants risquent, en plus des peines d'emprisonnement (2 ans) et la mobilisation de leur bateau, des amendes. Celles-ci sont passées de 1,7 million à 17,8 millions de francs en 2018. Le braconnage persiste tout de même, la question aujourd'hui est de savoir s'il conviendrait de renforcer les contrôles ou d'instaurer des quotas. “Nous allons travailler sur le sujet, savoir pourquoi la tortue est si importante dans la culture polynésienne, si respectée.” Les données récoltées nourriront la réflexion.  Cécile Gaspar insiste : “Nous ne faisons pas de recherche, mais nous récoltons des données que nous mettons ensuite à disposition. Car, après la découverte, il est important de partager !” Si l'association prend de l'âge, ses objectifs, eux, n'ont pas pris une ride.
 
 

Quelques chiffres

En 20 ans, l'association, qui compte aujourd'hui six permanents, a :
  • recensé et identifié (photo-identification) plus de 950 tortues ;
  • ramassé plus de 21 tonnes de déchets ;
  • organisé plus de 490 journées événementielles ;
  • sensibilisé plus de 142 000 enfants ;
  • soigné plus de 650 tortues.

Rédigé par Delphine Barrais le Mardi 24 Septembre 2024 à 07:12 | Lu 1205 fois