Tahiti, le 29 août 2024 - Non seulement l'endémie de surpoids et d'obésité ne régresse pas en Polynésie, mais elle augmente. En une petite dizaine d'années, la proportion d'adultes en surpoids est passée de 70% en 2010 à 75% en 2019, les adultes obèses passant de 40% à 48%. Des chiffres qui restent très alarmants, mais l'amorce d'un virage positif dans la nécessaire modification de nos comportements alimentaires est en train de se faire.
C'est grave mais ça se soigne. La dernière étude sur les maladies non transmissibles (MNT) et les comportements à risque réalisée en 2019 (l'étude précédente datant de 2010) par l'Institut de la statistique (ISPF) montre que la Polynésie est malheureusement toujours installée sur la première marche du podium du surpoids et de l'obésité.
Il faut dire qu'en dix ans (entre 2010 et 2019), les habitudes alimentaires n'ont malheureusement pas changé. Ou trop peu en tout cas puisqu'il y a encore 25% de la population polynésienne abonnée à la “junk food” cinq jours sur sept. Si on ajoute à cela un “niveau d'activité physique limité” pour “près de la moitié de la population” et une consommation d'alcool qui a “doublé en dix ans” en passant de 4% à 8%, on comprend aisément que la situation, loin de s'être améliorée, s'est encore un peu plus dégradée.
Et cela commence de plus en plus tôt. “On voit qu'il y a une augmentation de l'obésité chez les 0-4 ans qu'on ne soupçonnait pas”, s'inquiète Zeina Ajaltouni, pédiatre spécialisée en obésité infantile et qui a lancé, depuis 2018, un programme d'éducation thérapeutique (ETP) à l'hôpital de Uturoa. Un programme inspirant puisqu'il a été repris pour les adultes depuis 2020 au centre Ora Ora de Pirae. Et ça fonctionne.
Etre acteur de ses propres choix avec l'éducation thérapeutique
La clé, c'est le travail en équipe pluridisciplinaire (médecins, diététiciens, psychologues, enseignants en activité physique adaptée) pour offrir au patient un accompagnement qui l'aide à changer ses habitudes en profondeur et sur la durée. L'objectif du centre Ora Ora est aussi d'arriver à travailler en synergie avec le Fare Tama Hau qui s'occupe des enfants et des adolescents afin de proposer une véritable démarche familiale.
Car il est indispensable que le patient et son entourage soient acteurs de ce changement. “On a des statistiques qui démontrent que tous nos patients ont un impact sur la conscience alimentaire familiale”, souligne Daniel Monconduit, docteur en anthropologie et codirecteur du centre Ora Ora. C'est essentiel car comme pour les addictions à l'alcool ou au tabac par exemple, il ne suffit pas de vouloir pour pouvoir. La rechute est plus que probable et ce sont des processus qui prennent du temps et qui demandent un suivi régulier.
"Une prise de conscience globale est en train de s'opérer"
Si on manque encore un peu de recul aujourd'hui, Daniel Monconduit estime que d'ici cinq ans, “on va pouvoir objectiver quel est le pourcentage de stabilité des changements comportementaux”. Et il y a néanmoins une petite lueur d'espoir selon lui : “On sent qu'on est dans un tournant actuellement avec une prise de conscience globale qui est en train de s'opérer”.
Et les graines législatives semées il y a une dizaine d'années vont finir par porter leurs fruits. “En Polynésie, depuis 2015, beaucoup de choses ont été faites comme l'amélioration des menus dans les cantines, les parcours santé, l'école en santé”, note Zeina Ajaltouni qui rappelle toutefois qu'il s'agit là d'actions de prévention. “Elles demeurent indispensables mais la prise en charge pluridisciplinaire est la seule chose qui va fonctionner sur des patients déjà obèses.” Même son de cloche de la part de Daniel Monconduit qui souhaiterait davantage de “coordination” au niveau des autorités et des “filières mieux structurées”.
Car si les pouvoirs publics ne peuvent pas intervenir dans la sphère privée, il est de leur compétence, pour ne pas dire de leur devoir, de proposer des outils pour lutter contre ce fléau. La question d'une “fiscalité comportementale” en taxant par exemple les produits trop sucrés ou trop salés a déjà été évoquée et revient logiquement sur le tapis. Le gouvernement Fritch s'y est cassé les dents. Le ministre Cédric Mercadal a lui aussi dit l'envisager. Reste à savoir si cela se traduira cette fois concrètement dans les textes.
L'obésité n'est pas un choix, c'est une maladie
Une chose est sûre, être en surpoids ou être obèse n'est pas un choix. C'est une maladie. Ce qui peut être choisi en revanche, c'est d'adopter une hygiène de vie plus saine. Et ça passe par l'éducation en apprenant à nos enfants à préférer une pomme plutôt que des biscuits apéritifs, ou à boire une citronnade plutôt qu'un soda. Car cela ne coûte pas plus cher. L'aspect économique reste néanmoins l'un des principaux facteurs de surpoids et d'obésité en Polynésie. “La bonne alimentation coûte cher. Nous, on l'a chiffrée puisque les gens mangent avec nous et il faut compter environ 700 francs par repas”, nous a expliqué Daniel Monconduit.
En somme, chacun doit faire sa part. Aux politiques de légiférer, et aux Polynésiens de se prendre en main. Qu'on soit petit ou grand, privilégier les escaliers à l'ascenseur, se déplacer à pied ou à vélo quand c'est possible, profiter de notre environnement pour aller nager... autant de petites actions qui participent à une meilleure santé. Des gestes simples qu'il faut parvenir à transformer en habitudes, même s'il faut un peu se forcer au début.
C'est grave mais ça se soigne. La dernière étude sur les maladies non transmissibles (MNT) et les comportements à risque réalisée en 2019 (l'étude précédente datant de 2010) par l'Institut de la statistique (ISPF) montre que la Polynésie est malheureusement toujours installée sur la première marche du podium du surpoids et de l'obésité.
Il faut dire qu'en dix ans (entre 2010 et 2019), les habitudes alimentaires n'ont malheureusement pas changé. Ou trop peu en tout cas puisqu'il y a encore 25% de la population polynésienne abonnée à la “junk food” cinq jours sur sept. Si on ajoute à cela un “niveau d'activité physique limité” pour “près de la moitié de la population” et une consommation d'alcool qui a “doublé en dix ans” en passant de 4% à 8%, on comprend aisément que la situation, loin de s'être améliorée, s'est encore un peu plus dégradée.
Et cela commence de plus en plus tôt. “On voit qu'il y a une augmentation de l'obésité chez les 0-4 ans qu'on ne soupçonnait pas”, s'inquiète Zeina Ajaltouni, pédiatre spécialisée en obésité infantile et qui a lancé, depuis 2018, un programme d'éducation thérapeutique (ETP) à l'hôpital de Uturoa. Un programme inspirant puisqu'il a été repris pour les adultes depuis 2020 au centre Ora Ora de Pirae. Et ça fonctionne.
Etre acteur de ses propres choix avec l'éducation thérapeutique
La clé, c'est le travail en équipe pluridisciplinaire (médecins, diététiciens, psychologues, enseignants en activité physique adaptée) pour offrir au patient un accompagnement qui l'aide à changer ses habitudes en profondeur et sur la durée. L'objectif du centre Ora Ora est aussi d'arriver à travailler en synergie avec le Fare Tama Hau qui s'occupe des enfants et des adolescents afin de proposer une véritable démarche familiale.
Car il est indispensable que le patient et son entourage soient acteurs de ce changement. “On a des statistiques qui démontrent que tous nos patients ont un impact sur la conscience alimentaire familiale”, souligne Daniel Monconduit, docteur en anthropologie et codirecteur du centre Ora Ora. C'est essentiel car comme pour les addictions à l'alcool ou au tabac par exemple, il ne suffit pas de vouloir pour pouvoir. La rechute est plus que probable et ce sont des processus qui prennent du temps et qui demandent un suivi régulier.
"Une prise de conscience globale est en train de s'opérer"
Si on manque encore un peu de recul aujourd'hui, Daniel Monconduit estime que d'ici cinq ans, “on va pouvoir objectiver quel est le pourcentage de stabilité des changements comportementaux”. Et il y a néanmoins une petite lueur d'espoir selon lui : “On sent qu'on est dans un tournant actuellement avec une prise de conscience globale qui est en train de s'opérer”.
Et les graines législatives semées il y a une dizaine d'années vont finir par porter leurs fruits. “En Polynésie, depuis 2015, beaucoup de choses ont été faites comme l'amélioration des menus dans les cantines, les parcours santé, l'école en santé”, note Zeina Ajaltouni qui rappelle toutefois qu'il s'agit là d'actions de prévention. “Elles demeurent indispensables mais la prise en charge pluridisciplinaire est la seule chose qui va fonctionner sur des patients déjà obèses.” Même son de cloche de la part de Daniel Monconduit qui souhaiterait davantage de “coordination” au niveau des autorités et des “filières mieux structurées”.
Car si les pouvoirs publics ne peuvent pas intervenir dans la sphère privée, il est de leur compétence, pour ne pas dire de leur devoir, de proposer des outils pour lutter contre ce fléau. La question d'une “fiscalité comportementale” en taxant par exemple les produits trop sucrés ou trop salés a déjà été évoquée et revient logiquement sur le tapis. Le gouvernement Fritch s'y est cassé les dents. Le ministre Cédric Mercadal a lui aussi dit l'envisager. Reste à savoir si cela se traduira cette fois concrètement dans les textes.
L'obésité n'est pas un choix, c'est une maladie
Une chose est sûre, être en surpoids ou être obèse n'est pas un choix. C'est une maladie. Ce qui peut être choisi en revanche, c'est d'adopter une hygiène de vie plus saine. Et ça passe par l'éducation en apprenant à nos enfants à préférer une pomme plutôt que des biscuits apéritifs, ou à boire une citronnade plutôt qu'un soda. Car cela ne coûte pas plus cher. L'aspect économique reste néanmoins l'un des principaux facteurs de surpoids et d'obésité en Polynésie. “La bonne alimentation coûte cher. Nous, on l'a chiffrée puisque les gens mangent avec nous et il faut compter environ 700 francs par repas”, nous a expliqué Daniel Monconduit.
En somme, chacun doit faire sa part. Aux politiques de légiférer, et aux Polynésiens de se prendre en main. Qu'on soit petit ou grand, privilégier les escaliers à l'ascenseur, se déplacer à pied ou à vélo quand c'est possible, profiter de notre environnement pour aller nager... autant de petites actions qui participent à une meilleure santé. Des gestes simples qu'il faut parvenir à transformer en habitudes, même s'il faut un peu se forcer au début.