TAHITI, le 23 juillet 2020 - L’entreprise Speak Tahiti – Paraparau Tahiti, fondée par Heiura Itea-Tetaa, veut faire vivre le reo tahiti. Depuis un an, elle s’adresse à tous les publics, qu’ils souhaitent découvrir le tahitien ou bien parfaire leur apprentissage.
"Je suis hyper triste d’imaginer qu’un jour le reo tahiti puisse disparaître", explique Heiura Itae-Tetaa. "Car avec la langue c’est toute une culture, des valeurs, un état d’esprit qui disparaîssent. La langue c’est la racine d’un pays."
La langue est également étroitement liée à la nature et à l’environnement. Plus ces derniers sont riches et variés, plus il y a de langues. Pour tout cela, Heiura Itae-Tetaa a voulu "apporter une petite pierre au marae", elle a lancé Speak Tahiti – Paraparau Tahiti.
Cette entreprise propose des formules innovantes d’apprentissage du reo tahiti. Lancée en avril 2019, elle s’adresse aux particuliers, aux entreprises et, depuis deux semaines, aux enfants de tous niveaux.
Paraparau signifie discuter et cela résume l’objectif de cette "grande aventure", il s’agit de "débloquer la parole". En fait, Heiura Itae-Tetaa se bat pour que vive sa langue aujourd’hui menacée.
Le déclic
Née à Tahiti, elle a appris le tahitien en écoutant ses parents. "Je suis de la génération à qui on a dit : ‘le tahitien, ce n’est pas important’."
"On ne parlait pas tahitien à la maison, mais j’ai eu la chance d’avoir un père, une mère, des oncles et tantes, des grands-parents qui le parlaient." Elle a lu et écouté la langue chez elle mais aussi à l’église. Elle l’a étudiée à l’école, dès l’école primaire.
Elle a suivi sa scolarité en Polynésie jusqu'à la Licence puis en France, à Angers, où elle a obtenu un master en sociologie de la communication.
Elle a ensuite été journaliste aux Nouvelles, pour le magazine Hine, elle a travaillé à l’Institut supérieur de l’enseignement privé de Polynésie française (Isepp), à la Chambre de commerce, d’industrie, des services et des métiers (CCISM). Elle a aussi écrit des documentaires, effectué des repérages pour des tournages.
Et puis un jour, le déclic. "C’était il y a quatre ans, quand j’ai eu ma fille. Je me suis interrogée sur ce terme de langue maternelle et sur ce que j’allais moi-même laisser."
90% des langues autochtones menacées
Prenant conscience de la situation alarmante des langues autochtones, elle s’est lancée dans l’aventure. "Savez-vous que d’ici 2080, si rien n’est fait, 90% des langues autochtones auront disparu ? Mais 2080, c’est demain ! Il faut changer les choses aujourd’hui."
Lors de son apprentissage du reo (elle a une certification universitaire), elle a ressenti des manques "et notamment d'une immersion et d'une plus grande utilisation d’outils digitaux".
Lorsqu’elle a monté son entreprise (elle a été incubée par Prism en 2017-2018), elle a imaginé des formules avec cours théoriques en salle et activités en extérieur. Les apprenants, en groupe restreint, vont faire du tapa, de la voile, du café, du chant. Ils ont aussi accès à des capsules audio et vidéo qui prolongent les cours. "L’idéal", songe-t-elle "se serait d’organiser des séjours". Une idée est lancée.
Une langue qui reste vivante
Malgré les sombres prévisions, Heiura Itea-Tetaa reste optimiste. "Je constate que la langue est encore bien vivante." En témoigne son usage dans le monde des arts et du spectacle.
"Le rêve évidemment serait d’avoir toujours plus de locuteurs, mais si déjà on arrive à la préserver et à la diffuser, c’est bien. On a tout ce qu’il faut ici en Polynésie pour qu’elle soit plus visible." Dans ce cadre, Speak Tahiti – Paraparau Tahiti propose également des contenus vidéos de situations du quotidien traduits en reo tahiti.
La disparition des langues autochtones c’est "le serpent qui se mord la queue. Moins on a de locuteurs, moins on a de gens intéressés et moins on a de contenu". Selon Heiura Itea-Tetaa, il faut au contraire proposer un maximum d’offres et de contenus.
Depuis le confinement, son entreprise propose des cours en ligne. Elle a reçu des demandes du monde entier : Nouvelle-Calédonie, France, Pays de Galles, Angleterre, États-Unis. "Cette langue a un intérêt, elle intéresse les gens ! "
Localement, la demande est croissante. L’équipe de professeurs va s’étoffer et Heiura Itea-Tetaa est désormais épaulée par Magnolia Liao pour assurer le bon fonctionnement de son entreprise.
"Je suis hyper triste d’imaginer qu’un jour le reo tahiti puisse disparaître", explique Heiura Itae-Tetaa. "Car avec la langue c’est toute une culture, des valeurs, un état d’esprit qui disparaîssent. La langue c’est la racine d’un pays."
La langue est également étroitement liée à la nature et à l’environnement. Plus ces derniers sont riches et variés, plus il y a de langues. Pour tout cela, Heiura Itae-Tetaa a voulu "apporter une petite pierre au marae", elle a lancé Speak Tahiti – Paraparau Tahiti.
Cette entreprise propose des formules innovantes d’apprentissage du reo tahiti. Lancée en avril 2019, elle s’adresse aux particuliers, aux entreprises et, depuis deux semaines, aux enfants de tous niveaux.
Paraparau signifie discuter et cela résume l’objectif de cette "grande aventure", il s’agit de "débloquer la parole". En fait, Heiura Itae-Tetaa se bat pour que vive sa langue aujourd’hui menacée.
Le déclic
Née à Tahiti, elle a appris le tahitien en écoutant ses parents. "Je suis de la génération à qui on a dit : ‘le tahitien, ce n’est pas important’."
"On ne parlait pas tahitien à la maison, mais j’ai eu la chance d’avoir un père, une mère, des oncles et tantes, des grands-parents qui le parlaient." Elle a lu et écouté la langue chez elle mais aussi à l’église. Elle l’a étudiée à l’école, dès l’école primaire.
Elle a suivi sa scolarité en Polynésie jusqu'à la Licence puis en France, à Angers, où elle a obtenu un master en sociologie de la communication.
Elle a ensuite été journaliste aux Nouvelles, pour le magazine Hine, elle a travaillé à l’Institut supérieur de l’enseignement privé de Polynésie française (Isepp), à la Chambre de commerce, d’industrie, des services et des métiers (CCISM). Elle a aussi écrit des documentaires, effectué des repérages pour des tournages.
Et puis un jour, le déclic. "C’était il y a quatre ans, quand j’ai eu ma fille. Je me suis interrogée sur ce terme de langue maternelle et sur ce que j’allais moi-même laisser."
90% des langues autochtones menacées
Prenant conscience de la situation alarmante des langues autochtones, elle s’est lancée dans l’aventure. "Savez-vous que d’ici 2080, si rien n’est fait, 90% des langues autochtones auront disparu ? Mais 2080, c’est demain ! Il faut changer les choses aujourd’hui."
Lors de son apprentissage du reo (elle a une certification universitaire), elle a ressenti des manques "et notamment d'une immersion et d'une plus grande utilisation d’outils digitaux".
Lorsqu’elle a monté son entreprise (elle a été incubée par Prism en 2017-2018), elle a imaginé des formules avec cours théoriques en salle et activités en extérieur. Les apprenants, en groupe restreint, vont faire du tapa, de la voile, du café, du chant. Ils ont aussi accès à des capsules audio et vidéo qui prolongent les cours. "L’idéal", songe-t-elle "se serait d’organiser des séjours". Une idée est lancée.
Une langue qui reste vivante
Malgré les sombres prévisions, Heiura Itea-Tetaa reste optimiste. "Je constate que la langue est encore bien vivante." En témoigne son usage dans le monde des arts et du spectacle.
"Le rêve évidemment serait d’avoir toujours plus de locuteurs, mais si déjà on arrive à la préserver et à la diffuser, c’est bien. On a tout ce qu’il faut ici en Polynésie pour qu’elle soit plus visible." Dans ce cadre, Speak Tahiti – Paraparau Tahiti propose également des contenus vidéos de situations du quotidien traduits en reo tahiti.
La disparition des langues autochtones c’est "le serpent qui se mord la queue. Moins on a de locuteurs, moins on a de gens intéressés et moins on a de contenu". Selon Heiura Itea-Tetaa, il faut au contraire proposer un maximum d’offres et de contenus.
Depuis le confinement, son entreprise propose des cours en ligne. Elle a reçu des demandes du monde entier : Nouvelle-Calédonie, France, Pays de Galles, Angleterre, États-Unis. "Cette langue a un intérêt, elle intéresse les gens ! "
Localement, la demande est croissante. L’équipe de professeurs va s’étoffer et Heiura Itea-Tetaa est désormais épaulée par Magnolia Liao pour assurer le bon fonctionnement de son entreprise.
Un étiolement de la pratique
Selon le recensement général de la population de 2012, 149 007 habitants de Polynésie française âgés de 15 ans et plus déclarent comprendre, parler, lire et écrire une langue polynésienne, soit 73 % de la population de cette tranche d’âge. Par ailleurs, 95% déclarent une compétence équivalente en français, ce qui pourrait laisser penser que près des trois quarts de la population est bilingue.
Cependant, ces chiffres, qui reposent uniquement sur du déclaratif, cachent une réalité plus complexe.
Selon la même source, seuls 28% des habitants de 15 ans et plus parlent une langue polynésienne en famille alors qu’ils sont 70% à utiliser le français dans ce cadre. 53% des personnes âgées de 75 à 79 ans, 33% des 45-49 ans et 17% des 15-19 ans déclarent une langue polynésienne comme étant "la plus couramment parlée en famille", ce qui témoigne d’un étiolement de la pratique et de la transmission des langues polynésiennes au cours des générations. Une enquête extensive réalisée en 2005 auprès de 600 familles de Tahiti et de Moorea confirme cette érosion.
D’après Le numéro de Langues et cité de septembre 2017 (numéro 28).
Selon le recensement général de la population de 2012, 149 007 habitants de Polynésie française âgés de 15 ans et plus déclarent comprendre, parler, lire et écrire une langue polynésienne, soit 73 % de la population de cette tranche d’âge. Par ailleurs, 95% déclarent une compétence équivalente en français, ce qui pourrait laisser penser que près des trois quarts de la population est bilingue.
Cependant, ces chiffres, qui reposent uniquement sur du déclaratif, cachent une réalité plus complexe.
Selon la même source, seuls 28% des habitants de 15 ans et plus parlent une langue polynésienne en famille alors qu’ils sont 70% à utiliser le français dans ce cadre. 53% des personnes âgées de 75 à 79 ans, 33% des 45-49 ans et 17% des 15-19 ans déclarent une langue polynésienne comme étant "la plus couramment parlée en famille", ce qui témoigne d’un étiolement de la pratique et de la transmission des langues polynésiennes au cours des générations. Une enquête extensive réalisée en 2005 auprès de 600 familles de Tahiti et de Moorea confirme cette érosion.
D’après Le numéro de Langues et cité de septembre 2017 (numéro 28).
Aux origines des 37 langues polynésiennes
Le numéro de Langues et cité de septembre 2017 s’est intéressé aux langues de Polynésie française.
Souvent réduite, dans les esprits, à la seule langue tahitienne, la Polynésie française présente en réalité un paysage linguistique plus riche qu’on ne le croit. Ce vaste territoire compte en effet sept langues autochtones distinctes : tahitien, austral, ra’ivavae, rapa, mangarévien, pa’umotu et marquisien. Ces sept langues – sans compter leurs dialectes – constituent une part importante du groupe polynésien, cette famille linguistique de trente-sept langues qui recouvre la moitié orientale du Pacifique.
Les trente-sept langues polynésiennes du Pacifique, dont celles de Polynésie française, sont donc apparentées, entre autres, à pratiquement toutes les langues parlées aux Philippines, en Malaisie et en Indonésie, ainsi qu’à celles parlées par les peuples autochtones de Taïwan. C’est dans cette région, et plus précisément sur les côtes méridionales de ce qui correspond aujourd’hui à la Chine, que la plupart des spécialistes s’accordent à situer l’origine continentale des populations austronésiennes qui ont peuplé l’Insulinde, Madagascar et les îles du Pacifique à partir d’environ -5 500 ans.
Le tahitien est la première langue océanienne à avoir disposé d’un système d’écriture alphabétique, élaboré par les évangélistes protestants de la Société missionnaire de Londres au début du 19e siècle.
Le numéro de Langues et cité de septembre 2017 s’est intéressé aux langues de Polynésie française.
Souvent réduite, dans les esprits, à la seule langue tahitienne, la Polynésie française présente en réalité un paysage linguistique plus riche qu’on ne le croit. Ce vaste territoire compte en effet sept langues autochtones distinctes : tahitien, austral, ra’ivavae, rapa, mangarévien, pa’umotu et marquisien. Ces sept langues – sans compter leurs dialectes – constituent une part importante du groupe polynésien, cette famille linguistique de trente-sept langues qui recouvre la moitié orientale du Pacifique.
Les trente-sept langues polynésiennes du Pacifique, dont celles de Polynésie française, sont donc apparentées, entre autres, à pratiquement toutes les langues parlées aux Philippines, en Malaisie et en Indonésie, ainsi qu’à celles parlées par les peuples autochtones de Taïwan. C’est dans cette région, et plus précisément sur les côtes méridionales de ce qui correspond aujourd’hui à la Chine, que la plupart des spécialistes s’accordent à situer l’origine continentale des populations austronésiennes qui ont peuplé l’Insulinde, Madagascar et les îles du Pacifique à partir d’environ -5 500 ans.
Le tahitien est la première langue océanienne à avoir disposé d’un système d’écriture alphabétique, élaboré par les évangélistes protestants de la Société missionnaire de Londres au début du 19e siècle.
"Nous sommes à un carrefour"
Lors de la diffusion du documentaire Te reo tumu de Cybèle Plichart sur France Ô en 2016, le magazine national Telerama titrait : Reo Tahiti, enquête sur une langue qui se meurt. La journaliste Christine Chaumeau écrivait : Reo tahiti, paumotu, marquisien, mangarévien, langues des Australes et français se côtoient dans les archipels de Polynésie française où vivent 270 000 habitants.
Dans les familles, l’usage des langues locales demeure vivace, en particulier dans les îles les plus reculées. Le reo tahiti a toute sa place dans la vie politique locale, notamment à l’Assemblée territoriale, où les joutes oratoires sont fréquentes. Mais rares sont les passants interrogés dans la rue par la documentariste à pouvoir faire une phrase en reo tahiti.
"Nous sommes à un carrefour. Nous avons une génération qui entend la langue dans son entourage, mais qui ne la pratique pas et ne pourra donc pas la transmettre", explique le linguiste Jacques Vernaudon. Pourtant, depuis plus de trente ans, le territoire mène une politique linguistique volontariste. Deux heures quarante sont consacrées à l’apprentissage de la langue régionale dans les écoles primaires. La Polynésie française a reçu en 2012 le Label des labels pour saluer les initiatives pédagogiques innovantes en matière linguistique. Mais la menace plane.
Lors de la diffusion du documentaire Te reo tumu de Cybèle Plichart sur France Ô en 2016, le magazine national Telerama titrait : Reo Tahiti, enquête sur une langue qui se meurt. La journaliste Christine Chaumeau écrivait : Reo tahiti, paumotu, marquisien, mangarévien, langues des Australes et français se côtoient dans les archipels de Polynésie française où vivent 270 000 habitants.
Dans les familles, l’usage des langues locales demeure vivace, en particulier dans les îles les plus reculées. Le reo tahiti a toute sa place dans la vie politique locale, notamment à l’Assemblée territoriale, où les joutes oratoires sont fréquentes. Mais rares sont les passants interrogés dans la rue par la documentariste à pouvoir faire une phrase en reo tahiti.
"Nous sommes à un carrefour. Nous avons une génération qui entend la langue dans son entourage, mais qui ne la pratique pas et ne pourra donc pas la transmettre", explique le linguiste Jacques Vernaudon. Pourtant, depuis plus de trente ans, le territoire mène une politique linguistique volontariste. Deux heures quarante sont consacrées à l’apprentissage de la langue régionale dans les écoles primaires. La Polynésie française a reçu en 2012 le Label des labels pour saluer les initiatives pédagogiques innovantes en matière linguistique. Mais la menace plane.
Contact
FB : speak Tahiti – Paraparau Tahiti
Site internet de Speak Tahiti - Paraparau Tahiti
Tel. : 87 71 42 04
Pour regarder la vidéo https://www.tahiti-infos.com/Tahiti-Speak-Tahiti-avec-Heiura-Itea-Tetaa_a192960.html
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