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Séparé de ses enfants, Ruben veut avoir la garde exclusive


Ruben veut la garde exclusive de ses deux derniers enfants.
Ruben veut la garde exclusive de ses deux derniers enfants.
PAPEETE, le 3 octobre 2018 - Père de trois enfants, Ruben Avaeoru se bat pour faire valoir ses droits parentaux. Son fils ainé vit aujourd'hui à Taravao avec son ex première compagne et les deux derniers n'auraient pas d'adresse fixe. C'est justement pour ses deux derniers que Ruben se bat. Il veut les récupérer coûte que coûte.

C'est dans une maison presque vide, à Faaone, que ce père de famille nous a accueillis, mardi. Sur les murs, les dessins d'enfants et les photos de ses enfants décorent son salon. On peut dire que Ruben Avaeoru n'a pas eu une vie de tout repos.

Sa première compagne lui donne un fils qui a 16 ans aujourd'hui. Trois ans plus tard, les deux anciens concubins ont décidé de prendre des chemins différents. Ruben continue sa vie et rencontre, en 2008, une nouvelle femme, avec qui il aura deux autres enfants, âgés aujourd'hui de 8 et 9 ans.

Deux événements qui perturberont la vie du couple. "J'ai éduqué mes enfants tout seul, pendant deux ou trois ans. Ils ont vécu avec moi et ils savent comment je vis et comment je travaille. Ils savent que ce que je sculpte, c'est pour vendre et pour manger", raconte-t-il.

La mère, de son côté, errait de "gauche à droite". À cette époque, Ruben avait la garde exclusive. "La maman souffre de troubles mentaux et bipolaires. Elle est instable psychologiquement."

Mais en 2013, le monde de Ruben bascule. Il est accusé de violences et il écope de deux ans de prison. Tout s'écroule pour ce sculpteur de pierre. Cette période de sa vie sera la plus dure. Ruben ne verra ses enfants qu'une fois par mois. À sa sortie de Nuutania, deux ans plus tard, Ruben n'a qu'une seule idée en tête, récupérer ses deux enfants.

Et la tâche ne sera pas facile. La vie instable avec son ancienne compagne reprend le dessus. "En 2016, j'avais demandé à la maman de revenir à la maison. Mais je l'ai chassée à plusieurs reprises, parce qu'elle ne parlait pas aux enfants. Elle ne s'intéressait pas à l'éducation de nos enfants. Elle n'était pas concentrée sur notre vie, elle était tout le temps sur son téléphone, avec ses copains et ses copines", raconte Ruben Avaeoru.

Il y a quatre mois, le ton monte de nouveau et Ruben prend la décision de mettre fin à cette relation toxique. "Elle veut revenir à la maison, mais je ne veux plus. J'ai aussi entamé une procédure judiciaire, parce que je ne veux plus refaire ma vie avec elle, ça fait 10 ans que ça dure."

Une décision qui n'a pas été évidente pour lui, parce qu'il savait pertinemment qu'il ne verrait plus ses enfants. "Avec les services sociaux, on a prévu de partager les gardes, un week-end chacun, et la moitié des vacances. Et pour les vacances de juillet, jusqu'à aujourd'hui, je n'ai vu mes enfants que deux fois."

Une situation qui exaspère ce père de famille. "Je serais prêt à payer de ma vie pour ramener mes enfants à la maison. Quand ils me voient, ils me disent qu'ils sont contents de rentrer à la maison. 'Papa, on est triste parce qu'on est tout le temps sur la route. On est chez tatie, chez grand-père et dès qu'ils se fâchent, on nous chasse.' Pendant ces quatre derniers mois, ils ont fait plus d'une dizaine de foyers. Une fois, ils m'ont dit aussi qu'ils dormaient dans la voiture. J'ai déjà signalé tout cela aux services sociaux et rien n'a été fait. Pour moi, c'est un système pervers." Et de rajouter : "Il faut quand même qu'ils surveillent leurs arrières, parce que ça fait pas mal d'années que je souffre, comme tous les papas privés de leurs droits."

Aujourd'hui, plusieurs personnes soutiennent Ruben dans son combat. Dans un dossier bleu, Ruben conserve tous ses courriers. Si le chemin est encore long, ce père de famille fait de son mieux pour continuer à vivre. La plupart du temps, il fait de la sculpture sur pierres ou il tatoue. "J'ai tout ce qu'il faut pour bien élever mes enfants. Je veux les ramener. Après, s'ils veulent rester avec leur maman, je ne les retiendrai pas. Mais je sais où ils sont et je sais où aller les chercher."

Depuis quelques mois, Ruben fait partie de l'association "Papa où t'es ?". Il espère ainsi trouver une épaule assez large où se poser, afin de mener à bien son combat, celui de faire valoir ses droits parentaux.


La parole à

Raphael Wittenberg
Président de l'association "Papa où t'es ?"

"Il a payé ses dettes"


"Il a toujours été le père légal de ses enfants. Pour moi, ses demandes sont légitimes et il n'y a rien de compliqué à les traiter. Cet individu a fait de la prison, il est passé en justice, il a été condamné. La justice est là pour mettre de l'ordre et pour sanctionner et qu'à l'issue de cela, on soit lavé. Il a payé ses dettes. Maintenant, c'est fini. On ne peut pas, quand on se représente en justice, le ramener à ce qu'il a fait, même si c'est pour des cas de violence. Donc, il y a une rédemption qui est promise par la justice et elle doit être effective, sinon, c'est du mensonge, de la tromperie.

Ensuite, quelqu'un qui sort de prison a énormément de choses à reconstruire. Il a la réinsertion professionnelle, il a des enfants qu'il n'a peut-être plus vu ou moins vu pendant cette période de prison. Être un parent n'est pas anodin qu'on soit ensemble, séparés, sorti de prison… c'est certainement le plus grand costume qu'on enfile dans sa vie d'être humain. Donc, lorsqu'on redemande à être pleinement dans la vie de son enfant, on veut avancer, s'intégrer et être dans la société. Et ouvrir un autre chapitre, voire même opérer une transformation en profondeur de soi-même.
"



Contact

Vous pouvez contacter l'association "Papa où t'es ?" sur leur page facebook ou par téléphone au 87 76 24 83.


Ruben est sculpteur sur pierres et tatoueur.
Ruben est sculpteur sur pierres et tatoueur.

Il nous présente les colliers qu'il a fait pour ses enfants.
Il nous présente les colliers qu'il a fait pour ses enfants.

le Mercredi 3 Octobre 2018 à 22:00 | Lu 12967 fois