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Santé mentale : La Polynésie veut s'inspirer du modèle néo-zélandais


Crédit photo : Thibault Segalard.
Crédit photo : Thibault Segalard.
Tahiti, le 7 juin 2023 - Ce mardi, la consule générale de Nouvelle-Zélande dans le Pacifique a rencontré l'association Taputea Ora – Santé mentale Polynésie. Lors de cette rencontre, un changement du système d'accueil des personnes souffrant de trouble psychique, vers le modèle néo-zélandais, a été évoqué.
 
Et si la Polynésie prenait exemple sur la Nouvelle-Zélande au niveau de l'accueil des personnes atteintes de trouble psychique ? Depuis 2019, le pays au long nuage blanc a fait du bien-être de sa population une priorité, avec la création d'un budget “well being” de 128,5 milliards de Fcfp (1,9 milliard de dollars NZ) sur cinq ans, une première au niveau mondial. Ainsi, grâce à ses dépenses, le pays a radicalement transformé sa gestion de la santé mentale. Exit les hôpitaux psychiatriques, l'accueil de la plupart des personnes souffrant de troubles mentaux se fait maintenant en communauté locale, non médicamenteuse. Un principe qui intéresse fortement la Polynésie. Une rencontre entre la consule générale de la Nouvelle-Zélande pour le Pacifique, Felicity Roxburgh, et les membres de l'association Taputea Ora –Santé mentale Polynésie a d'ailleurs eu lieu ce mardi dans leurs locaux situés dans le quartier de Naohata à Pirae. La ministre des Solidarités, Minarii Galenon, était également présente lors de cette rencontre, où l'association a pu présenter ses différentes missions sociales ainsi qu'aborder l'idée de programme de collaboration régionale pour les peuples du Pacifique en matière de santé mentale. “J'ai toujours été impressionnée par le tissu associatif ici en Polynésie et la façon dont les gens s'engagent”, a d'ailleurs révélé la consule générale lors de l'événement.
 
Pour rappel, la santé mentale est un problème majeur au fenua. En effet, le nombre de troubles mentaux détectés ne cesse de grimper, passant de 1 672 patients en 2015 suivis à 9 782 en 2021. Selon une enquête de la SMPG (santé mentale en population générale) menée de 2015 à 2017, 42,8% de la population polynésienne ont déjà présenté un problème psychique au cours de leur vie.
 
Revoir la stratégie associative du Pays
 
“La Nouvelle-Zélande a une longueur d'avance sur nous par rapport à ce problème qui est majeur en Polynésie. Ils sont très avant-gardistes”, a déclaré Minarii Galenon lors de cette rencontre. “Leur modèle de communauté, c'est vraiment très intéressant.” Interrogée sur la faisabilité de la mise en place de structures semblables à celles néo-zélandaises au fenua, la ministre a reconnu que ce système serait très intéressant pour le pays, notamment en raison de son éclatement géographique. “Notre hôpital psychiatrique est centralisé à Pirae. Mettre en place ce système serait très adapté pour les habitants des îles éloignées, qui ne peuvent pas ou ne veulent pas quitter leur chez-soi”, a-t-elle continué. “Nous aussi, nous pourrions mettre en place notre société du bonheur, d'autant plus que nous ne sommes même pas 300 000.”
 
Si l'idée est sur le papier idéale, dans les faits, elle pourrait vite coûter cher au Pays, tant en investissement humain qu'au niveau budgétaire. Des craintes balayées par la ministre qui a assuré que ce “bien-être” était une “volonté du gouvernement” : “Nous voulons nous unir contre cette problématique”. À travers ses propos, c'est un changement de la stratégie associative qui est évoqué. “Jusqu'à présent, nous aidions les associations avec des subventions. Mais seules, leurs impacts sont forcément limités. Ma volonté et celle du gouvernement, c'est de mettre au cœur de nos décisions ces problèmes, que ce soit la santé mentale, la violence familiale... pour qu'ils deviennent interministériels et non plus morcelés à tel ou tel ministère. Nous devons tous nous allier, que ce soit avec les associations ou les instances religieuses, pour mener à bien cette volonté.”
 
Fonds associatif
 
Cette rencontre tripartite était également l'occasion pour les membres de Taputea Ora de remercier la consule générale pour le don fait il y a quelques semaines à l'association. En effet, chaque année, la Nouvelle-Zélande, à l'aide d'un fonds d'investissement associatif spécifique, subventionne des associations polynésiennes. “L'année dernière, nous avions soutenu Cousins Cousines. Cette année, ça a été Anavai et Taputea Ora”, a expliqué la consule. “Grâce à ces aides, on finance le plus souvent du matériel, que ce soient des navettes, des vélos, de l'ameublement, mais également des formations.” Pour bénéficier de ces subventions, un appel à dossiers est organisé chaque année. Les associations sont choisies en fonction de critères définis. Pour Taputea Ora, ce don, d'une valeur de 500 000 Fcfp, a permis de meubler le foyer de l'association et d'acheter du matériel informatique.
 
À travers ce fonds, la Nouvelle-Zélande marque véritablement son envie constante de pérenniser son lien avec le fenua. “Ce fonds, c'est notre façon d'apporter un petit quelque chose et de créer des liens profonds avec les Polynésiens car nous avons les mêmes ancêtres”, a expliqué Felicity Roxburgh. “On montre également par ce biais l'importance de nos relations avec la Polynésie, qui est un marché très précieux pour nous dans la région du Pacifique”. Le prochain appel à dossiers débutera le 1er juillet prochain.

 

Rencontre entre la vice-présidente et la consule générale de Nouvelle-Zélande

La vice-présidente du Pays, Éliane Tevahitua (à gauche), a rencontré la consule générale de Nouvelle-Zélande, Felicity Roxburgh (à droite), ce mardi. Crédit photo : présidence.
La vice-présidente du Pays, Éliane Tevahitua (à gauche), a rencontré la consule générale de Nouvelle-Zélande, Felicity Roxburgh (à droite), ce mardi. Crédit photo : présidence.
La consule générale de Nouvelle-Zélande a également rencontré, ce mardi, la vice-présidente du Pays, Éliane Tevahitua. Lors de cet entretien, de nombreux sujets ont été abordés, dont notamment le renouvellement du Plan conjoint de coopération, signé en 2018 entre les deux pays, pour lequel un audit devrait être effectué prochainement.
 
Plusieurs autres thématiques ont été abordées comme des possibles collaborations dans le secteur de la culture entre musées et institutions culturelles comme la mise en place d'un partenariat de formation aux techniques muséales. La coopération universitaire, élément essentiel de la relation entre les deux pays, a aussi été évoquée avec la confirmation du maintien de l'éligibilité pour les étudiants polynésiens au Public Sector Program. Les deux parties ont conclu cette rencontre en réaffirmant leur volonté de coopérer en matière de préservation de l'environnement, que ce soit dans leurs territoires respectifs ou dans la région du Pacifique.

Rédigé par Thibault Segalard le Mercredi 7 Juin 2023 à 17:44 | Lu 2022 fois