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Relaxe pour un retraité accusé d'avoir diffamé deux universitaires


Tahiti, le 19 avril 2023 – Le tribunal correctionnel a relaxé mardi un retraité bloggeur de 68 ans qui était poursuivi en diffamation par deux professeurs de l'UPF qu'il avait accusés, avec des centaines d'autres universitaires français, de promouvoir l'islamo-gauchisme dans la société. Le tribunal, qui ne peut requalifier l'objet de la poursuite en matière de presse, a jugé que les faits poursuivis constituaient non pas une diffamation mais une injure. 
 
Un retraité de 68 ans, déjà condamné à plusieurs reprises dont une fois par la cour d'assises pour un braquage, a été jugé mardi en son absence par le tribunal correctionnel. L'homme était poursuivi en diffamation par un maître de conférences et un professeur de l'Université de Polynésie française (UPF) pour avoir écrit sur son site internet que ces derniers, ainsi que des centaines d'autres universitaires français, étaient des “gauchistes complices de l'Islam radical”.
 
Pour comprendre l'origine de cette affaire, il faut remonter au mois de février 2022. À l'époque, celle qui était encore ministre de l'Enseignement supérieur, Frédérique Vidal, avait déclaré publiquement que “l'islamo-gauchisme gangrène la société dans son ensemble et l'université n'est pas imperméable”. Suite à cette déclaration, la ministre avait fait face à une levée de boucliers du corps universitaire. Plus de 23 000 enseignants français, dont plusieurs professeurs de l'UPF, avaient alors signé une pétition pour dénoncer “l'intention dévastatrice” de propos destinés à “diffamer une profession et, au-delà, toute une communauté”.
 
“Citadelle indépendante”
 
C'est dans le cadre de cette polémique que le retraité jugé mardi avait publié sur son blog la liste des 600 premiers signataires de la pétition – à laquelle participent deux professeurs de l'UPF – en accusant ces derniers d'être “payés par l'État” pour “effectuer d'hypothétiques recherches” qui servent “à développer les théories qui ont pour unique but de faire avancer l'Islam et par conséquent le radicalisme islamique à l'université en particulier et en France en général”. Face à ces affirmations, l'avocat des deux professeurs de l'UPF, Me Dominique Antz, a rappelé mardi à la barre du tribunal que l'université était une “citadelle indépendante”, un “endroit d'excellence où il n'y a pas de place pour une norme politique”. Il a par ailleurs assuré que sur son blog, le prévenu tenait des propos d'extrême droite en relayant un discours “aussi bête que faux”.
 
Le ministère public s'en étant rapporté à l'appréciation du tribunal, la parole a donc ensuite été donnée à l'avocate du retraité bloggeur, Me Viviane Genot, selon laquelle son client n'a “outrepassé ni le code, ni la moralité” en faisant simplement usage de sa “liberté d'expression” dans une époque où règne la “démagogie”.Après en avoir délibéré, le tribunal a relaxé le sexagénaire au motif que les faits poursuivis constituaient non pas une diffamation mais une injure. Dans la mesure où il n'a pas le pouvoir de requalifier l'objet de sa saisine en matière de presse, le tribunal n'a donc pu prononcer aucune condamnation à l'encontre du retraité injurieux. 

Rédigé par Garance Colbert le Mercredi 19 Avril 2023 à 15:24 | Lu 2180 fois