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Règlement de comptes devant la 4e commission de l’ONU


NEW YORK, 9 octobre 2018 - La quatrième commission en charge des questions politiques spéciales et de décolonisation a de nouveau été le siège d’un bras de fer, entre représentants autonomistes et souverainistes polynésiens, ce mardi à New York.

Pour la troisième année consécutive, depuis 2016, Edouard Fritch intervient devant la quatrième commission de l’ONU en qualité de président de la Polynésie française et à la tête d’une délégation officielle. Cette délégation autonomiste a été soucieuse de faire savoir, mardi à New York, qu’elle représente une majorité populaire qui souhaite poursuivre des relations de partenariat avec l’Etat, comme le démontre encore, selon elle, le résultat des élections territoriales de mai 2018.

Les trois pétitionnaires de la délégation autonomistes n’étaient autres que la sénatrice, Lana Tetuanui, le vice-président, Teva Rohfritsch, le président de l’assemblée de la Polynésie française, Gaston Tong Sang et le représentant Tapura Huiraatira et maire de Makemo, Félix Tekoragi.

Pour la délégation officielle du Pays, après avoir insisté sur le résultat démocratique de mai dernier, il s’est agi de faire l’éloge du partenariat "indispensable" avec l’Etat. Une association qui garantit la "sécurité" et la "protection" du territoire de la Polynésie française et "assure 90 % du financement de notre système éducatif, soit 600 millions de dollars US par an", comme l’a rappelé le président Edouard Fritch. Le chef de l'exécutif a insisté sur la "large autonomie institutionnelle" dont bénéficie la collectivité, "pays membre du Forum du Pacifique" qui "ne vit nullement une situation coloniale, ni une situation d’oppression, ni une situation de confiscation de nos richesses naturelles par l’Etat français". Gaston Tong Sang a aussi rappelé que la collectivité entretient des relations avec plusieurs assemblées parlementaires du Pacifique, pour preuve de sa respiration régionale.

Invitation

Face à eux, le président de la quatrième commission a constaté le "nombre record", cette année, des 23 pétitionnaires du Tavini Huiraatira, des proches du mouvement souverainiste, des représentants d’associations anti-nucléaires, de l’église protestante maohi, de la conférence des églises du Pacifique et autres associations sportives. Pour eux, le mot d'ordre était de dénoncer l’impact des essais nucléaires français dans le Pacifique. Cette campagne de 193 essais, entre 1966 et 1996, a "des effets sur la santé qui se poursuivent jusqu’à ce jour", pour Taaroanui Maraea, le représentant de l’église protestante Maohi. Pour Roland Oldham, l'Etat français, "puissance administrante", doit "dédommager le peuple, victime de ce crime contre l’humanité" plutôt que d'"opérer en coulisse afin de minimiser sa responsabilité".

Une majorité de pétitionnaires de la délégation souverainiste a évoqué cette notion de "crime contre l’humanité" avant qu'Oscar Temaru ne finisse par annoncer qu’une plainte avait été déposée le 2 octobre dernier devant la Cour pénale internationale de La Haye. L’action vise "tous les présidents français" depuis le 2 juillet 1966, date du premier essai nucléaire français à Moruroa.

>> Lire aussi : Temaru annonce le dépôt d'une plainte pour crime contre l'humanité

"Nous sommes gênés de venir devant vous exposer nos joutes politiciennes locales", a souligné mardi à New York le vice-président Teva Rohfritsch en préambule de son intervention devant les membres de la commission en charge des questions politiques spéciales et de la décolonisation à l’Organisation des Nations Unies.

Mais pour Edouard Fritch, cette situation est liée "au manque d’informations objectives" dont dispose la 4e commission de l’ONU au sujet des réalités de la Polynésie française. Le président polynésien invite les membres de l'instance onusienne à se rendre en Polynésie pour "apprécier la crédibilité et la pertinence" de la position des autonomistes. Surtout, il "réfute" le rapport d'’évaluation du "niveau d’autonomie" de la Polynésie française sur lequel elle se fonde pour son projet de résolution cette année. Son auteur "était un salarié du groupe indépendantiste polynésien, et nous en avons les preuves", assure Edouard Fritch.

Il s’agissait mardi de la 3e réunion de l’assemblée générale de la commission en charge des questions politiques spéciales et de la décolonisation, la quatrième commission de l’Organisation des Nations Unies. Le projet de résolution qu’elle prépare cette année dans le cadre du processus d’autodétermination de la Polynésie française initié en mai 2013 sera examiné début décembre prochain par l’assemblée générale des Nation Unies.

Rédigé par Jean-Pierre Viatge le Mardi 9 Octobre 2018 à 15:41 | Lu 3053 fois