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Réforme de la justice: coup d'envoi des débats au Sénat


Crédit Ludovic MARIN / AFP
Crédit Ludovic MARIN / AFP
Paris, France | AFP | mardi 06/06/2023 - Le Sénat à majorité de droite a entamé mardi la discussion de deux textes portés par le garde des Sceaux Eric Dupond-Moretti pour "tourner la page du délabrement et de la clochardisation de la justice française".

Le projet de loi d'orientation et de programmation du ministère de la justice 2023-2027 est accompagné d'un projet de loi organique relatif à "l'ouverture, la modernisation et la responsabilité du corps judiciaire".

Le Sénat se prononcera sur ces deux textes assez techniques lors de votes solennels mardi prochain. Ils iront ensuite à l'Assemblée nationale.

"Ils ont l'ambition de répondre concrètement aux attentes de nos concitoyens au premier rang desquelles celle d'une justice plus rapide", a affirmé le ministre. Objectif: "diviser par deux l'ensemble des délais de justice d'ici 2027".

L'article 1er du projet de loi entend ainsi faire passer le budget du ministère de la Justice de 9,6 milliards d'euros en 2023 à près de 11 d'ici quatre ans. Il entérine également l'embauche de 10.000 personnes, dont 1.500 magistrats. 

L'effort budgétaire et les recrutements supplémentaires ont été salués par les magistrats, dubitatifs cependant quant à la promesse d'une amélioration rapide des délais de traitement des dossiers.

Si les textes "vont dans le sens d’une amélioration du fonctionnement de l’institution judiciaire", selon les rapporteures Agnès Canayer (LR) et Dominique Vérien (centriste), les sénateurs restent eux aussi sur leur faim.

Agnès Canayer a déploré "une reprise pas toujours fidèle et pas complète" des conclusions des États généraux de la justice.

En commission, les sénateurs ont adopté un amendement des rapporteures portant de 1.500 à 1.800 le nombre de nouveaux greffiers et prévoyant la création de 600 postes de conseillers pénitentiaires de probation et d'insertion (CPIP).

Les voies d'accès à la magistrature seront réformées et ouvertes à de nouveaux profils. La réforme prévoit par ailleurs la création d'une nouvelle fonction, celle d'"attachés de justice", qui se substitueront aux actuels "juristes assistants".

Le garde des Sceaux a souligné que le texte entérine d'"importantes revalorisations des métiers de justice".

Violences intra-familiales

Les sénateurs ont accepté, en commission, un amendement du gouvernement pour institutionnaliser dans les tribunaux des pôles spécialisés dans la lutte contre les violences intra-familiales.

C'est une recommandation majeure du rapport parlementaire sur les violences conjugales remis le 22 mai au ministre par Mme Vérien et la députée Emilie Chandler (Renaissance).

Toujours vigilants lorsqu'il s'agit d'autoriser le gouvernement à légiférer par ordonnance, les sénateurs ont posé leurs conditions à la demande d'habilitation à "clarifier" par cette voie la rédaction du code de procédure pénale.

Ils ont prévu un délai d'un an entre la publication de l'ordonnance et son entrée en vigueur, afin de laisser une marge de manœuvre au Parlement. Le ministre a confirmé que le nouveau code "n'entrera pas en vigueur avant sa ratification".

La commission des Lois du Sénat a accueilli "favorablement" certaines mesures de modernisation de l'institution judiciaire, "bien que de portée souvent technique".

C'est en particulier le cas de l'expérimentation de tribunaux des activités économiques, aux compétences élargies par rapport aux tribunaux de commerce. Ou du renforcement de la responsabilité des magistrats.

A gauche, la socialiste Laurence Harribey pointe "un texte lacunaire", déplorant notamment l'absence de la question de la surpopulation carcérale, alors que le nombre de détenus a atteint un nouveau record historique au 1er mai, avec 73.162 personnes incarcérées.

Les Etats généraux avaient suggéré de fixer pour chaque établissement un seuil de "suroccupation majeure", au-delà duquel pourraient être envisagées des mesures de régulation de la population carcérale.

Le ministre a préféré rappeler le "cap" fixé par le gouvernement de construire 15.000 places de prison supplémentaires d'ici 2027. 

Comme la gauche, des associations et des avocats s'inquiètent par ailleurs d'une disposition permettant aux enquêteurs judiciaires d'activer à distance les appareils électroniques d'une personne à son insu. Cette possibilité est toutefois limitée aux crimes et délits passibles de plus de 5 ans d'emprisonnement. 

le Mardi 6 Juin 2023 à 06:19 | Lu 334 fois