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Recycler ses vieux appareils électroménagers : la galère


Des produits électroménagers dans une décharge sauvage à Tumarra, Raiatea, en 2011 (photo de l'association Rainuatea)
Des produits électroménagers dans une décharge sauvage à Tumarra, Raiatea, en 2011 (photo de l'association Rainuatea)
PAPEETE, le 22 mars 2019 - Les particuliers qui veulent recycler leurs appareils électroménagers ou électroniques usagés doivent les transporter jusqu'à Fenua Ma, à Paofai. Dans la plupart des cas, ils doivent payer de leur poche pour leur recyclage. Un système peu efficace... Mais bientôt, la réglementation obligera tous les importateurs et revendeurs à reprendre gratuitement les appareils usagers de leurs clients pour les recycler.

Il est parfois bien difficile d'être un consommateur responsable. Par exemple prenez ce témoignage de Coralie : "ça se passait la semaine dernière. Je voulais acheter une cave à vin en remplacement de la mienne, tombée en panne. Je suis donc allée dans le magasin d'électroménager à qui j'avais acheté la précédente. J'ai choisi mon modèle, j'étais prête à faire affaire... Mais au moment où j'allais payer, j'ai demandé à la caissière si, quand ils me la livreraient, ils pourraient en profiter pour reprendre mon ancienne cave à vin. Ils m'ont répondu que ce n'était pas possible, que l'enlèvement de l'ancien électroménager coûtait 4500 francs. Je leur ai dit qu'il me semblait bien qu'il était obligatoire de reprendre gratuitement l'ancien appareil, surtout si c'est un remplacement. Ça m'a un peu énervée. Je lui ai demandé, 'Du coup comment les gens font s'ils ne veulent pas payer les 4500 francs ? Ils le mettent au bord de la route ?' Elle m'a répondu que 'les gens font ce qu'ils veulent'... Et du coup je n'ai pas acheté."

Malheureusement, Coralie se trompe sur un point : à Tahiti les vendeurs n'ont aucune obligation de reprendre vos anciens appareils quand vous en achetez un neuf. Il s'agit d'une législation européenne, appliquée en métropole mais pas en Polynésie. Une loi locale a bien été votée, mais elle n'est toujours pas mise en place.

Donc pour l'instant au fenua, c'est au consommateur de prendre la responsabilité de ses appareils en fin de vie. Plutôt que de les envoyer à la décharge, le plus sûr pour qu'ils soient traités et recyclés correctement est de les amener à Fenua Ma (voir encadré).

Certaines entreprises du secteur font tout de même exception. Par exemple selon Fenua Ma, Apple et les télévisions Samsung imposent à leurs revendeurs locaux de recycler les appareils rapportés par leurs clients. Dans la téléphonie, Vini et Vodafone assurent le recyclage des téléphones et chargeurs en fin de vie que leurs rapportent leurs clients. Autre exemple, la chaîne Carrefour reprend vos appareils électroménagers et électroniques quand vous en achetez un neuf (mais le magasin facture le service de récupération à domicile de l'ancien matériel, par exemple pour récupérer un frigo il vous en coûtera 2000 francs). Mais sans une filière de récupération généralisée, beaucoup de ces produits continuent de finir leurs vies au bord des routes... Ou pire, dans nos vallées, rivières et lagons.

UNE LOI VA OBLIGER LES ENTREPRISES À PRENDRE LEUR RESPONSABILITÉ

Pour pallier ce manque de prise en charge, le Pays a décidé depuis l'année dernière d'allouer une petite enveloppe à Fenua Ma. Elle ne concerne que les produits électroniques, qui sont considérés trop dangereux pour être enfouis. Le directeur de Fenua Ma, Benoît Layrle, nous explique ainsi que "le budget alloué par le Pays a augmenté cette année. Ça nous a permis de travailler directement avec les communes. Nous avons fait passer un message aux éboueurs, quand ils ramassent des encombrants dans les rues de leurs communes ils mettent de côté tout ce qui est télévisions, ordinateurs, lecteurs DVD, hi-fi... L'électronique pure. Ils le mettent à l'abri, au sec, et quand ils en ont plusieurs mètres cubes, les équipes de Fenua Ma passent récupérer ces produits et ils sont envoyés au recyclage en Nouvelle-Zélande. Tout ce programme est financé par la Polynésie française. L'année dernière nous avons exporté 80 tonnes de déchets électroniques financés par le territoire, cette année on a le budget pour 120 tonnes. En plus, nous récupérons chaque année en 50 et 100 tonnes par an en provenance des professionnels."

Malheureusement pour le gros électroménager, comme les fours, machines à laver ou réfrigérateurs, il n'y a souvent pas d'autre solution pour les éco-consommateurs que de les apporter eux-mêmes à Fenua Ma. Les autres les mettront aux encombrants pour être enfouis avec les gravats et plastiques... Et les plus indélicats les abandonneront dans la nature.

Mais la situation devrait s'améliorer dans les années qui viennent. La direction de l'Environnement nous explique que le principe de Responsabilité Élargie des Producteurs (REP), celle qui s'impose en métropole, allait être mise en place en Polynésie dans les années qui viennent. Le concept : les importateurs auront la responsabilité de la fin de vie des produits qu'ils font venir au fenua. Une fois la filière mise en place, les vendeurs auront l'obligation de récupérer et recycler les produits en fin de vie rapportés par les particuliers. En échange, ces produits pourraient bénéficier d'une baisse de la Taxe Environnement Agriculture Pêche (TEAP, une taxe de 2 % sur tous les produits importés).

La loi créant le cadre des REP est déjà votée, il ne reste plus qu'à la mettre application. La première REP est en cours de négociation, elle concernera les médicaments non utilisés. Ensuite ce sera au tour des huiles, des piles, des batteries, puis viendra enfin le cas des déchets électriques et électroniques. Ce sont donc les professionnels eux-mêmes qui vont devoir mettre en place les filières de traitement. "Qui connait mieux que les professionnels leurs produits et les filières de traitement ?" explique la Diren. "Ce qui est important c'est que ceux qui créent la filière d'importation devront créer en même temps la filière de collecte. Et moduler la TEAP permettra de financer le dispositif en évitant de créer de nouvelles taxes. Dès lors qu'une REP sera mise en place, il y aura des obligations pour tous les professionnels qui seront imposées progressivement, sur le même modèle que l'interdiction des sacs plastique qui sera mise en place en fin d'année."

Comment recycler ses déchets électriques et électroniques ?

Les ordinateurs, imprimantes, décodeurs, téléviseurs et autres équipements électriques et électroniques sont particulièrement polluants pour l’environnement et peuvent s’avérer dangereux pour l’homme. Il est indispensable de ne pas les traiter comme n’importe quel déchet.

Fenua Ma vous propose donc de recycler vos appareils électriques ou électroniques usagés moyennant le paiement de 176 francs par kg de déchet récupéré pour les particuliers. Certains produits électroniques sont pris en charge par le Pays, leur recyclage ne vous coûtera donc rien. Les appareils récupérés sont exportés vers la Nouvelle-Zélande.

La collecte est possible sans rendez-vous tous les mercredis après-midi de 12h30 à 15h30 aux bureaux de Fenua Ma, immeuble Paofai en face de la Maison de la Culture. Pour venir un autre jour, il suffit de contacter l'entreprise au 40 54 34 50 ou à l'adresse [email protected].

Où recycler vos ampoules, batteries, huiles, médicaments, fusées de détresse, etc ?

Six magasins ont signé une convention avec Fenua Ma pour récupérer les néons et ampoules usagées des particuliers. Les magasins concernés sont Ace Papeete, Ace Taravao, Yune Tung, SODIMEC, S.D.I.P et L'APPRO, qui prennent en charge sur leurs budgets de coût de leur recyclage.

Pour les batteries, piles, huiles usagées, médicaments, fusées de détresse et verres, une série de points de dépôts publics, financés par le Territoire ou les communes, est disponible. La liste complète peut être consultée sur la carte géolocalisée de Fenua Ma : fenuama.pf/pav

Rédigé par Jacques Franc de Ferrière le Vendredi 22 Mars 2019 à 15:15 | Lu 4874 fois