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Réchauffement de 4°C attendu en France: le chantier de l'adaptation change de dimension


Crédit Ed JONES / AFP
Crédit Ed JONES / AFP
Paris, France | AFP | mardi 23/01/2024 - "Surmonter la sidération" pour commencer à s'adapter à un réchauffement de 4°C en France d'ici la fin du siècle: le gouvernement prépare les esprits aux innombrables bouleversements causés par l'évolution du climat sur l'agriculture, les modes de vie ou les infrastructures.

"Il faut qu'on arrête de penser que les problèmes du climat, c'est le problème de la COP et du bout du monde. C'est notre problème à tous. Tout de suite et pour les années qui viennent", a lancé le ministre de la Transition écologique, Christophe Béchu, qui réunissait mardi à Paris un amphithéâtre d'experts, élus et responsables d'entreprises sur la question de l'adaptation au changement climatique.

Le président Emmanuel Macron avait lors de sa récente conférence de presse appelé à se saisir du problème. "Quels que soient les efforts qu’on fait... nous aurons à vivre les conséquences du dérèglement climatique, il est déjà là. Et donc on doit s’adapter", avait-il dit.

Christophe Béchu avait appelé l'an dernier à sortir du "déni" et à préparer la France à un réchauffement de 4°C par rapport à l'ère préindustrielle sur le territoire métropolitain, soit un scénario moins optimiste que ceux retenus jusqu'alors. 

Le pays subit un réchauffement plus marqué que la moyenne mondiale, notamment parce que les continents se réchauffent plus que les océans. Or le monde n'a pas fini de se réchauffer en raison de la poursuite des émissions de gaz à effet de serre.

"Je pense que 1,5 degré c'est mort et enterré", estime Jean-Marc Jancovici, influent patron du Shift project, en référence à la limite la plus ambitieuse de l'accord de Paris de 2015. "Parce que le système socio-technique installé - les usines, les villes, les moyens de transport, etc., on ne va pas les changer à la bonne vitesse", prédit-il.

Mais le sénateur écologiste Ronan Dantec préfère retenir que les dynamiques politiques mondiales "sont en train de stabiliser le climat", qui ne devrait donc pas aller au-delà de +4°C en France... "Donc c'est quand même plutôt une nouvelle positive, même si c'est trop", juge-t-il.

"Pieds dans l'eau"

Ce réchauffement de 4°C - contre environ 1,7°C aujourd'hui - servira donc de base pour la préparation du troisième Plan national d’adaptation au changement climatique (PNACC), qui devrait se traduire par une cinquantaine de mesures. 

Ce plan doit faire l'objet d'une réunion gouvernementale autour du premier ministre Gabriel Attal "vers la fin du mois de février" puis sera mis en consultation un mois plus tard pour être ensuite publié "au moment du début de l'été".

Concrètement, il pourrait par exemple se traduire par une refonte du code du Travail (pour adapter les horaires aux pics de chaleur), des encouragements aux îlots de fraîcheur dans les villes ou encore une refonte des normes pour la construction ou les infrastructures.

Une tâche vertigineuse tant les répercussions du réchauffement climatique sont nombreuses, sur l'agriculture, la santé, les migrations, les milieux naturels, le tourisme ou les infrastructures...

"Pendant l'été, il faut s'attendre à ce que nos barrages reçoivent moins d'eau qui viennent des glaciers, que notre agriculture reçoive moins d'eau", rappelle la glaciologue Heidi Sevestre. 

"Il faut se préparer à ce qu'un port comme Le Havre ou l'aéroport de Nice se retrouvent les pieds dans l'eau. Et ça se prépare tout de suite...", poursuit-elle.

Dans les projections du ministère, Lille aura ainsi à terme le climat de Bilbao et Brest celui de Vigo. Mais avec à l'échelle du pays des vagues de chaleur plus nombreuses et plus sévères, des inondations qui s'aggravent et des ressources en eau qui diminuent.

A terme, cela signifie par exemple une culture de la vigne qui devient difficile dans le sud, un taux d'enneigement divisé par 3 à 1.500 mètres d'altitude dans le massif du Mont-Blanc et les premiers réfugiés climatiques de Miquelon (Saint-Pierre-et-Miquelon), menacé par la montée des eaux.

Christophe Béchu a appelé mardi à "surmonter la sidération quand on mesure ce que veut dire +4°C". "On va devoir changer nos villes, nos paysages, nos régions", a déjà prédit Emmanuel Macron.

le Mercredi 24 Janvier 2024 à 06:42 | Lu 417 fois