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Prudence avec les psychotropes, des médicaments dont les Français raffolent


Prudence avec les psychotropes, des médicaments dont les Français raffolent
PARIS, 25 oct 2012 (AFP) - Les Français continuent à caracoler en tête de la consommation mondiale de psychotropes par habitant, des médicaments dont ils connaissent rarement les dangers, avertit l'auteur d'un livre paru jeudi, alors que l'Inserm met en garde contre les risques de dépendance.

"Tous les prétextes sont bons pour ingurgiter des cocktails de gélules. Dormir, se réveiller, être stimulé, moins angoissé, moins stressé, plus performant, plus en confiance, mieux concentré, moins timide...", détaille le journaliste Guy Hugnet, auteur du livre "Psychotropes: l'enquête".

Le nombre de consommateurs de psychotropes a encore augmenté en France entre 2005 et 2010, selon des chiffres fournis par l'Inserm et on estime aujourd'hui qu'environ 20% de la population française, en majorité des femmes, consomment plus ou moins régulièrement antidépresseurs, tranquillisants, somnifères, neuroleptiques...

Selon Guy Hugnet, 200 millions de boîtes sont vendues chaque année en France, pour un coût qui dépasse le milliard d'euros chaque année pour la collectivité.

S'il ne conteste pas l'utilité de ces médicaments dans certaines pathologies mentales ou crises aiguës, le journaliste la juge beaucoup plus discutable lorsqu'ils sont prescrits en dehors d'une vraie pathologie.

"Quelles peuvent être les répercussions de cette overdose nationale et légale sur le cerveau de millions de gens", se demande-t-il en répertoriant les principaux effets négatifs connus sur le comportement : confusion mentale, désinhibition, dépersonnalisation, troubles de la mémoire, Alzheimer, actes de violence, suicides, infanticides.

Les troubles recensés sont illustrés de cas précis qui ont émaillé la rubrique des faits divers ces dernières années.

Le livre mentionne le cas de Philippe, un ingénieur déprimé qui arrive à vélo de son plein gré dans un hôpital et décède 15 jours plus tard d'un malaise cardiaque après des doses massives de neuroleptiques données par perfusion puis sous contention les deux derniers jours.

Benzodiazépines

Il cite également la tragédie de Charmaine, traitée par des antidépresseurs, "un poison qui allait lentement la tuer" car complètement contre-indiqué dans la maladie bipolaire non diagnostiquée dont elle souffrait.

Les psychotropes sont pour la plupart prescrits par des généralistes "qui dans leur grande majorité ne savent pas vraiment comment ces pilules se mélangent dans le cerveau ou l'organisme", accuse Guy Hugnet.

Dans un long document rendu public jeudi, l'Inserm reconnaît que les benzodiazépines (utilisés comme tranquillisants ou anxiolytiques, mais aussi comme somnifères) sont à "haut risque de pharmacodépendance en cas de consommation chronique".

Aucun chiffre n'est disponible sur la dépendance dans l'ensemble de la population française, mais pour les sujets atteints de troubles psychiatriques, une étude montre qu'environ une personne sur deux serait dépendante aux benzodiazépines.

Les personnes âgées se voient fréquemment prescrire des somnifères, alors que la Haute autorité de santé a rappelé le mois dernier que les vraies insomnies sont rares après 65 ans et que la plupart des traitements sont injustifiés.

Ils pourraient même favoriser la survenue de cas de démence et notamment d'Alzheimer, selon une étude de l'Inserm.

La prudence est également de mise pour l'utilisation de psychotropes au cours de l'enfance et de l'adolescence, mais aussi chez les femmes enceintes qui sont 6% à en consommer pendant leur grossesse dont 3% des benzodiazépines, alors que les conséquences à long terme restent mal connues, selon l'Inserm.

("Psychotropes, l'enquête" de Guy Hugnet, Editions de l'Archipel)

Rédigé par AFP le Jeudi 25 Octobre 2012 à 05:45 | Lu 754 fois