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Procès en appel de l'affaire OPT: "Saint" Emile à la barre


Procès en appel de l'affaire OPT: "Saint" Emile à la barre
Le procès en appel de l’affaire OPT a débuté jeudi matin au tribunal de Papeete, avec comme principal protagoniste l’ex-ministre des postes et télécommunications, Emile Vernaudon, condamné en 1ère instance à cinq ans de prison, cinq ans d’inéligibilité et dix millions d’amendes, et actuellement détenu à Nuutania. La justice lui reproche d’avoir fait payer par l’Office des Postes des frais de bouches injustifiés pour un montant de 117 millions de francs. Sa ligne de défense n’a pas varié d’un pouce : Emile est une victime, c’était au « staff » de l’OPT de lui signaler qu’il agissait dans l’illégalité.

« Nous espérons que la Cour va réviser son jugement », explique l’avocat d’Emile Vernaudon, Me Antz. «Nous voulons replacer Emile Vernaudon à sa vraie place, non pas celle qui lui a été dévolue jusqu’à présent comme chef de file d’une série de gabegie, mais une victime. A l’époque il était ministre des postes, maire de Mahina, chef de parti, et vice-président du CA de l’OPT. En raison de ses multiples casquettes il devait faire confiance à ce qu’il appelle lui-même son « staff », avance l’avocat.


Alphonse Teriieroiterai
Alphonse Teriieroiterai
La « victime » tente justement de prouver jeudi matin qu’elle ne connaît rien au droit, et qu’elle comptait sur les autres pour lui poser des limites. « Je ne comprends absolument rien à la prise illégale d’intérêt » répond donc aux juges celui qui a pourtant voté la loi en 1993, lorsqu’il était député. « Vous avez voté une loi à laquelle vous ne comprenez rien ? » s’étonne le juge qui semble stupéfait de la ligne de défense de l’homme qu’il a face à lui. Emile serait-il un « ignare » de bonne foi ? Peut-être, mais pas seulement. Les témoins parlent d’un homme « violent » quand on s’oppose à lui, d’un ministre à qui on ne peut pas dire non « sous peine d’être éjecté ». « C’est comme ça que ça marche en Polynésie », se justifie Alphonse Teriieroiterai à la barre. « Voilà, on a tout résumé, on est en Polynésie », soupire le juge, qui rappelle tout de même à l’ex-PCA qu’il était de son « devoir » de dire non à des ordres illégaux.

« Le ministre espérait être protégé par toutes ces personnes », explique quant à lui Me Antz. « Et aujourd’hui, c’est le seul qui a été mis en prison ! » (E. Vernaudon a été placé en détention malgré son appel en raison d’un mandat de dépôt prononcé par les juges ndlr). « Mon client ne jouit d’aucun traitement de faveur », poursuit l’avocat. « Il est détenu avec 4 autres personnes dans une cellule de 9 mètres carrés très insalubre. C’est un véritable cloaque. »


Procès en appel de l'affaire OPT: "Saint" Emile à la barre
Le contraste avec le rythme de vie luxueux du ministre des Postes et Télécommunications en 2004, 2005, et 2006 est saisissant. Des repas aux frais de l’OPT tous les deux jours, voitures et téléphones de fonction (dont un téléphone satellitaire), des caisses de bon vin livrées directement à son domicile, des nuitées d’hôtel au Radisson…« pour se reposer sur la route de Tautira », explique Emile. « Vous aviez besoin de vous reposer avec une bouteille de Saint-Emillion à 12 000 F sur la table de chevet ? » réplique le juge, qui montre des signes de scepticisme. « Ce système de défense n’avait pas été entendu devant le tribunal correctionnel, je ne sais pas s’il sera entendu par la Cour d’appel », résume l’avocat d’A. Teriieroiterai, Me Jourdainne.

En tout, ils sont dix à avoir interjeté appel, parmi lesquels l’ancien PCA de l’office des postes, Alphonse Teriieroiterai, l’ancien directeur de cabinet d’Emile Vernaudon, Alain Michon, des « consultants », comme Loïc Brigato, Georges Puchon, Yves Conroy, et enfin d’autres protagonistes comme Hiro Tefaarere, Natacha Taurua , Yvon Bardes, Patrick Bordet, tous accusés d’avoir profité des largesses du ministre des Postes et Télécommunications. « Des centaines de personnes sont venues me voir pour me demander du boulot, et je n’en ai embauché que 6 ou 7, moi, pas des centaines, comme ceux qui sont jugés à côté », argumente Emile Vernaudon, en référence au procès des emplois fictifs, en cour de jugement au tribunal correctionnel de Papeete. Le procès en appel de l'affaire OPTdoit se poursuivre vendredi.

Par ailleurs, la Cour a confirmé, jeudi, la peine d'un an de prison ferme prononcée en première instance à l'encontre de Léonard Puputauki pour travail dissimulé lors du convoyage de 18 thoniers de la Corée vers Tahiti.

Rédigé par F K le Jeudi 5 Mai 2011 à 14:16 | Lu 1548 fois