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Pererau, un tahua renaît de ses ruines après 10 ans de restauration


Tahiti, le 30 avril 2021 - A l’issue de près de 10 ans de restauration, les vestiges de Pererau déployés sur plus de 2 000 mètres carrés à Piha’e’ina à Moorea offrent désormais “un lieu propice à la redécouverte des racines culturelles pour la jeunesse polynésienne“, peut-on lire dans la 6e édition des Dossiers d'archéologie polynésienne. 

"Pererau est la grande place, l’esplanade des déclamations, le marae où veillent les jumeaux, Teava et Teavau, (…) le tambour gronde sur Pererau et résonne sur Rotui”. En contrebas de l’une des petites vallées du mont Rotui, le site de Pererau a ainsi été psalmodié de génération en génération dans les légendes des “pari pari fenua”, traditions orales aujourd’hui transmise par Maurice Rurua, orateur de l'association Puna reo Piha’e’ina.

C’est là, sur deux plateformes monumentales de plus de 2 000 mètres carrés au sommet d’un petit promontoire, que les deux aito faisaient résonner les pahu dans la vallée. Comme pour annoncer, d’après les pari pari, la présence de Teremu’ura, “vahine ari’i” du Rotui. Les tahu’a de la vallée se réunissaient alors sur le paepae de Pererau. “Le site s’inscrit dans un paysage légendaire des temps anciens, qui inclut le marae Tevairoa, situé en haute vallée, le marae Naonao situé en moyenne vallée et le marae Atitaihae situé en bord de mer” note Aymeric Hermann sur “l’étude et la restauration des structures archéologiques sur la terre Pererau à Piha’e’ina”.

Ancienne zone de pâture pour le bétail, le site a souffert de nombreuses perturbations auxquelles s’est ajoutée la construction d’une piste à proximité. Un décapage “intensif” s’impose dans le cadre d’une restauration vivement souhaité par l’association Puna Reo, responsable de la gestion du site, afin de “pouvoir réinvestir le site dans le cadre d’activités extra-scolaires et culturelles”.

Un simple tahua plus qu’un marae
 
Aussi, une collaboration avec le service de la Culture et du patrimoine à partir de 2010 met le chantier sur les rails. Après le décapage, un nettoyage intensif en 2014 et 2015 permet d’abattre de nombreux arbres aux racines menaçantes et de dégager les blocs effondrés. Dernière phase des travaux, un sondage et une fouille de 10 mètres carrés écartent la présence supposée de l’élément principal d’un marae : un ahu. 

En l’absence de celui-ci, “les deux plateformes pavées (…) ne peuvent être qualifiées de marae au sens strict et se rapportent plutôt à des tahua simples, des espaces non-cérémoniels”, note le chercheur, sorte de “plateformes de conseil” ou de “terrain de réunion” dotée d’une fonction publique, politique ou pour un événement festif ponctuel. Un espace qui se démarque ainsi du marae à ahu, “plus restreint à une classe sociale ou à une lignée familiale particulière”.

Outre une meilleure compréhension de la “nature des structures archéologiques”, ces dix ans de remise en valeur offrent aujourd’hui “un lieu propice à la redécouverte des racines culturelles pour la jeunesse polynésienne” afin de “faciliter la réappropriation de l’histoire locale et (…) léguer ce patrimoine matériel et immatériel aux enfants”. Par ailleurs, le projet a déjà permis de nombreux échanges culturels avec des communautés de Polynésie, mais aussi des associations de Hawaii, de Rapa Nui et de Aotearoa. Un usage “en accord avec la fonction traditionnelle des plateformes de réunion, (…) plus accessibles à l’ensemble de la communauté” peu importe sa classe sociale.
 

Rédigé par Esther Cunéo le Jeudi 29 Avril 2021 à 19:07 | Lu 1667 fois