Paris, France | AFP | mercredi 12/02/2019 - "Des fois je me sens plus homme, des fois plus femme, et des fois +autre+": à 19 ans, Camille se dit "genderfluid". Comme elle, une part croissante de jeunes brouille les frontières du masculin et du féminin, provoquant parfois rejet et "crispations".
Née dans un corps de femme - avec un prénom mixte -, Camille n'explique pas ses genres "fluctuants": "Au beau milieu d'une phrase, ça peut changer et parfois je peux rester trois mois avec le même genre".
"Contente d'avoir des seins" quand elle se sent femme, elle enfile "de gros pulls" quand elle se sent homme.
Au lycée, elle met un nom sur cette identité changeante: "genderfluid". Elle est rassurée: "Il y a d'autres gens comme moi, ce n'est pas un délire".
Née fille comme Camille, Noam, 16 ans, se définit depuis quelques mois comme "non-binaire", "ni strictement homme ni strictement femme", et adopte le pronom "iel" (contraction de il et elle).
"Le genre est une construction sociale. C'est bizarre de se dire attiré par un genre ou un autre", juge l'étudiant en prépa.
Si sa famille "progressiste" l'accepte, Noam n'a pas fait son "coming-out" à l'école et préfère passer "pour une lesbienne" auprès de ses camarades: "J'ai essayé une fois de parler de non-binarité, mais ils faisaient beaucoup de blagues".
Cette remise en cause des normes de genre et de sexe est "très générationnelle", affirme Arnaud Alessandrin, sociologue spécialiste de ces questions. "Quand on interroge les plus de 25 ans, c'est quelque chose qui n'apparaît pas".
"Les gens sont restés sur le sigle LGBT (lesbiennes, gay, bi, trans), ils n'ont pas conscience qu'il y a autre chose", explique Constance Manlay, jeune femme trans de 23 ans, qui a entamé sa transition "M to F" ("male to female", masculin à féminin).
Pour les "cisgenres", ceux dont l'identité correspond au sexe de naissance, soit l'immense majorité de la population, cette nouvelle grammaire est parfois difficile à appréhender.
D'autant qu'à ces nouvelles identités de genre s'ajoutent de nouvelles identités sexuelles. Ainsi, Constance se définit aussi comme "pansexuelle", c'est-à-dire attirée par une personne, peu importe son genre ou sa sexualité.
"Devoir choisir entre homme et femme a-t-il encore un sens ?", s'interroge Alexis Doyen, 20 ans, "pan" également. "+T'es homo, t'es bi?+ C'est une question qu'on ne devrait plus poser", affirme cet étudiant en sociologie à Angers.
Ce questionnement des normes sexuelles traditionnelles traduit-il une libido débridée? "Absurde" et "vraiment à côté de la plaque", rétorque-t-il.
Les jeunes interrogés par l'AFP trouvent également un réconfort sur les réseaux sociaux, où ils peuvent "s'afficher et se protéger en même temps", dans ces "alcôves de tranquillité", selon l'expression d'Arnaud Alessandrin.
Mais cette propension à "plier les normes du genre" s'accompagne aussi "de crispations", rappelle l'expert, à l'image de la campagne de haine homophobe dont a été victime Bilal Hassani, chanteur queer sélectionné pour représenter la France à l'Eurovision.
Avant lui, l'artiste Chris (ex-Christine and the Queens), la série "Orange is the New Black", la BD "Appelez-moi Nathan" (Payot Graphic), ou encore l'émission de téléréalité "RuPaul Drag race" ont également contribué à rendre visibles ces nouveaux genres.
Cette visibilité peine toutefois encore à infuser certains milieux sociaux et certains territoires, note Arnaud Alessandrin: "Etre +genderfluid+ n'est pas réservé aux enfants de cadres, mais c'est une expression d'enfants de cadres".
"Mes parents restent sur l’idée que je suis une fille. Nous sommes de la classe moyenne rurale, ce n’est pas très étonnant qu’on n’en discute pas", confie Sacha (prénom d’emprunt), trans de 23 ans.
"Le nombre de fois où on m'a dit que j'étais fou, que je n'existais pas, qu'on m'a réduit à mes organes génitaux", raconte un témoin de 19 ans, "agenre" et en couple avec une femme trans.
Les plus jeunes sont persuadés qu'il ne s'agit pas d'une mode : "Si j'étais née plus tôt, je sais même pas si je me serais rendue compte que je suis bisexuelle. Avant, c'était moins accepté", confie Louna, 15 ans.
Née dans un corps de femme - avec un prénom mixte -, Camille n'explique pas ses genres "fluctuants": "Au beau milieu d'une phrase, ça peut changer et parfois je peux rester trois mois avec le même genre".
"Contente d'avoir des seins" quand elle se sent femme, elle enfile "de gros pulls" quand elle se sent homme.
Au lycée, elle met un nom sur cette identité changeante: "genderfluid". Elle est rassurée: "Il y a d'autres gens comme moi, ce n'est pas un délire".
Née fille comme Camille, Noam, 16 ans, se définit depuis quelques mois comme "non-binaire", "ni strictement homme ni strictement femme", et adopte le pronom "iel" (contraction de il et elle).
"Le genre est une construction sociale. C'est bizarre de se dire attiré par un genre ou un autre", juge l'étudiant en prépa.
Si sa famille "progressiste" l'accepte, Noam n'a pas fait son "coming-out" à l'école et préfère passer "pour une lesbienne" auprès de ses camarades: "J'ai essayé une fois de parler de non-binarité, mais ils faisaient beaucoup de blagues".
Cette remise en cause des normes de genre et de sexe est "très générationnelle", affirme Arnaud Alessandrin, sociologue spécialiste de ces questions. "Quand on interroge les plus de 25 ans, c'est quelque chose qui n'apparaît pas".
"Les gens sont restés sur le sigle LGBT (lesbiennes, gay, bi, trans), ils n'ont pas conscience qu'il y a autre chose", explique Constance Manlay, jeune femme trans de 23 ans, qui a entamé sa transition "M to F" ("male to female", masculin à féminin).
- "Alcôves de tranquillité" -
Pour les "cisgenres", ceux dont l'identité correspond au sexe de naissance, soit l'immense majorité de la population, cette nouvelle grammaire est parfois difficile à appréhender.
D'autant qu'à ces nouvelles identités de genre s'ajoutent de nouvelles identités sexuelles. Ainsi, Constance se définit aussi comme "pansexuelle", c'est-à-dire attirée par une personne, peu importe son genre ou sa sexualité.
"Devoir choisir entre homme et femme a-t-il encore un sens ?", s'interroge Alexis Doyen, 20 ans, "pan" également. "+T'es homo, t'es bi?+ C'est une question qu'on ne devrait plus poser", affirme cet étudiant en sociologie à Angers.
Ce questionnement des normes sexuelles traditionnelles traduit-il une libido débridée? "Absurde" et "vraiment à côté de la plaque", rétorque-t-il.
Les jeunes interrogés par l'AFP trouvent également un réconfort sur les réseaux sociaux, où ils peuvent "s'afficher et se protéger en même temps", dans ces "alcôves de tranquillité", selon l'expression d'Arnaud Alessandrin.
Mais cette propension à "plier les normes du genre" s'accompagne aussi "de crispations", rappelle l'expert, à l'image de la campagne de haine homophobe dont a été victime Bilal Hassani, chanteur queer sélectionné pour représenter la France à l'Eurovision.
Avant lui, l'artiste Chris (ex-Christine and the Queens), la série "Orange is the New Black", la BD "Appelez-moi Nathan" (Payot Graphic), ou encore l'émission de téléréalité "RuPaul Drag race" ont également contribué à rendre visibles ces nouveaux genres.
Cette visibilité peine toutefois encore à infuser certains milieux sociaux et certains territoires, note Arnaud Alessandrin: "Etre +genderfluid+ n'est pas réservé aux enfants de cadres, mais c'est une expression d'enfants de cadres".
"Mes parents restent sur l’idée que je suis une fille. Nous sommes de la classe moyenne rurale, ce n’est pas très étonnant qu’on n’en discute pas", confie Sacha (prénom d’emprunt), trans de 23 ans.
"Le nombre de fois où on m'a dit que j'étais fou, que je n'existais pas, qu'on m'a réduit à mes organes génitaux", raconte un témoin de 19 ans, "agenre" et en couple avec une femme trans.
Les plus jeunes sont persuadés qu'il ne s'agit pas d'une mode : "Si j'étais née plus tôt, je sais même pas si je me serais rendue compte que je suis bisexuelle. Avant, c'était moins accepté", confie Louna, 15 ans.