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Nouveau décret d’application de la loi Morin: pour Moruroa e Tatou, c'est de l'esbroufe!


Nouveau décret d’application de la loi Morin: pour Moruroa e Tatou, c'est de l'esbroufe!
L'association "Moruroa e tatou" a réagit vivement à la publication du projet du nouveau décret portant sur la modification du décret n° 2010-653 du 11 juin 2010 relatif à la reconnaissance et à l'indemnisation des victimes des essais nucléaires français


Communiqué de Moruroa e Tatou

La présomption d’origine écartée
L’effet d’annonce du Président Sarkozy éclate au grand jour avec le nouveau projet de décret d’application de la loi Morin rendu public depuis deux jours.
La réforme prioritaire, réclamée par Moruroa e tatou, l’Aven et les autorités du Pays, aurait dû porter sur l’annulation de la méthode d’examen des dossiers choisi par le comité d’indemnisation qui organisait, pratiquement, le rejet de tous les dossiers. Moruroa e tatou demandera le remplacement de cette méthode par le principe de présomption d’origine, comme c’est le cas de la législation américaine 1988. Concrètement le nouveau décret devrait abroger l’article 7 alinéa 1er du décret du 11 juin 2010 stipulant que « cette présomption ne peut être écartée que si le risque attribuable aux essais nucléaires peut être considéré comme négligeable au regard de la nature de la maladie et des conditions de l'exposition aux rayonnements ionisants ». Sans cette réforme essentielle, les modifications prévues par le nouveau décret n’apporteront pas plus d’indemnisations que le décret précédent.

Les maladies radio-induites
Le nouveau décret français ajoute les lymphomes et myélomes ainsi que les myélodysplasies, c’est-à-dire les maladies de la moelle osseuse considérées comme des états préleucémiques. Il rectifie le cas du cancer du sein, sans autre précision, alors qu’il était retenu uniquement pour les femmes. Les cancers de la thyroïde, très nombreux chez les anciens travailleurs de Moruroa, les vétérans et dans les populations - tous adultes donc - ne sont toujours retenus que pour « une exposition pendant la période de croissance ».
A titre de comparaison (voir pièce jointe), en 2012, la législation américaine comporte une liste de 35 pathologies cancéreuses réparties en deux sous-listes, la première comportant 25 types de cancers pour lesquels s’applique la présomption sans obligation de preuve et la seconde comportant 10 autres types de cancers pour lesquels s’applique le cas par cas.

Les zones géographiques
L’article 1er du nouveau décret corrige les zones retenues précédemment de l’atoll de Hao qui concernaient les seules implantations militaires et du CEA. Pour éviter une discrimination trop flagrante à l’égard de la population polynésienne de cet atoll, c’est maintenant l’île toute entière qui sera concernée pour la période allant du 2 juillet 1966 au 31 décembre 1998.
L’article 2 du nouveau décret précise l’annonce « phare » du Président Sarkozy, prétendant la grande « générosité » de la France à l’égard de la population polynésienne majoritairement concentrée sur Tahiti. Désormais, toute l’île de Tahiti sera concernée par la loi d’indemnisation… mais seulement pour la période allant du 19 juillet au 31 décembre 1974 !
Moruroa e tatou rappelle avec insistance que les documents du ministère de la défense eux-mêmes distribués à Tahiti en 2006 par M. Jurien de la Gravière, mentionnaient plus de 200 retombées radioactives sur tous les archipels polynésiens entre 1966 et 1974. Et chacun sait maintenant que les nuages radioactifs des bombes aériennes n’avaient pas la « prudence » de s’arrêter aux frontières de la Polynésie française…

Réexamen des dossiers rejetés du fait du précédent décret
L’article 5 du nouveau décret prévoit que les dossiers rejetés sur le fondement du décret du 10 juin 2011 seront réexaminés sur la base du nouveau décret. A regarder de près cette « bonne nouvelle », on imagine mal que le comité d’indemnisation accepte d’envoyer un courrier « rectificatif » à ceux qui avaient eu leur dossier rejeté, stipulant qu’il s’était trompé et que le « risque négligeable » qui avait justifié le rejet était une contamination bien réelle justifiant indemnisation !
En fait, selon les informations fournies lors de la réunion de la commission consultative du 20 octobre 2011 à Paris, les dossiers « réexaminés » seront ceux qui avaient été rejetés parce que la maladie déclarée ou parce que la zone géographique du déclarant n’étaient pas dans la liste ou dans les dispositions du premier décret. Des chiffres seront encore plus parlants : sur les 278 dossiers examinés par le comité d’indemnisation au 20 octobre 2011, il y avait 19 rejets pour des lymphomes et 6 rejets pour des myélomes et 7 autres dossiers ont été rejetés par qu’ils étaient « hors zone ».
La mesure de réexamen pour 25 dossiers est donc à « générosité limitée ».

Des mesures d’esbroufe électorales
Le 21 février à Paris, lors de la réunion de la commission consultative de suivi des essais nucléaires, Moruroa e tatou dénoncera l’esbroufe de l’annonce du Président Sarkozy. A cette dénonciation s’ajoutera l’absence scandaleuse de révision des zones géographiques concernées par les essais atomiques de la France au Sahara. Devons-nous en conclure que les populations algériennes n’ont droit à aucun égard pour la simple raison qu’elles n’auront pas à déposer de bulletin dans l’urne des élections présidentielles françaises ? La position de Moruroa e tatou est claire et tient en trois points :
- l’adoption du principe de présomption d’origine sur le modèle de la législation américaine et l’annulation de la méthode adoptée par le comité d’indemnisation,
- l’élargissement des zones géographiques à toute la Polynésie et à tout le Sahara,
- l’adoption d’une liste révisable des maladies radio induites sur le modèle de l’actuelle législation américaine.

Moruroa e tatou ne se laissera pas berner par des mesures électorales.


Moruroa e tatou
projet_decret.pdf Projet décret.pdf  (15.35 Ko)

Rédigé par D'après Moruroa e tatou le Lundi 13 Février 2012 à 14:15 | Lu 1086 fois