Un indigène Taiwannais (© Rich J Matheson)
PAPEETE, le 8 octobre 2016 - Une nouvelle étude scientifique s'appuyant sur des analyses ADN vient – encore – changer notre compréhension de l'origine du peuple Polynésien. Cette fois, les preuves indiquent que les premiers à coloniser le Triangle polynésien venaient bien de Taïwan, avant de se mélanger à des populations mélanésiennes.
L'étude est très sérieuse, et elle vient encore modifier notre compréhension du peuplement du Pacifique. Publiée dans le journal scientifique Nature la semaine dernière, le papier "Genomic insights into the peopling of the Southwest Pacific" (Enseignements génétiques sur le peuplement du Sud-ouest du Pacifique) est signé par près de 30 scientifiques qui ont analysé les restes de quatre squelettes trouvés dans les tous premiers cimetières Lapita de Vanuatu et des Tonga.
Les Lapita étaient un peuple de navigateurs qui sont arrivés aux Vanuatu il y a environ 3000 ans, identifié par les archéologues grâce à leurs poteries typiques (une tradition perdue depuis). Les traces qu'ils ont laissées derrière-eux permettent de les différencier des peuples vivant en Australie, Papouasie-Nouvelle-Guinée et îles Salomon actuelles depuis 40 000 à 50 000 ans.
Les Lapita, eux, sont apparus dans l'Ouest du Pacifique en l'an -1000, mais leur terre d'origine fait l'objet de débats académiques féroces. Pourtant, de ce peuple est née la civilisation Polynésienne qui finit par coloniser l'ensemble du Triangle polynésien… Bref, ce sont nos ancêtres. La thèse la plus populaire encore récemment les faisait venir des îles Bismarck, au nord-est de la Nouvelle-Guinée.
IL VA FALLOIR ENCORE CHANGER LES CARTES DE PEUPLEMENT DE LA POLYNÉSIE
L'étude est très sérieuse, et elle vient encore modifier notre compréhension du peuplement du Pacifique. Publiée dans le journal scientifique Nature la semaine dernière, le papier "Genomic insights into the peopling of the Southwest Pacific" (Enseignements génétiques sur le peuplement du Sud-ouest du Pacifique) est signé par près de 30 scientifiques qui ont analysé les restes de quatre squelettes trouvés dans les tous premiers cimetières Lapita de Vanuatu et des Tonga.
Les Lapita étaient un peuple de navigateurs qui sont arrivés aux Vanuatu il y a environ 3000 ans, identifié par les archéologues grâce à leurs poteries typiques (une tradition perdue depuis). Les traces qu'ils ont laissées derrière-eux permettent de les différencier des peuples vivant en Australie, Papouasie-Nouvelle-Guinée et îles Salomon actuelles depuis 40 000 à 50 000 ans.
Les Lapita, eux, sont apparus dans l'Ouest du Pacifique en l'an -1000, mais leur terre d'origine fait l'objet de débats académiques féroces. Pourtant, de ce peuple est née la civilisation Polynésienne qui finit par coloniser l'ensemble du Triangle polynésien… Bref, ce sont nos ancêtres. La thèse la plus populaire encore récemment les faisait venir des îles Bismarck, au nord-est de la Nouvelle-Guinée.
IL VA FALLOIR ENCORE CHANGER LES CARTES DE PEUPLEMENT DE LA POLYNÉSIE
Ce crâne provient d'un vieux site funéraire de 3000 ans situé aux Vanuatu. Il est l'une des 4 sources de l'ancien ADN analysé par l'étude.
Mais c'est faux, car ça y est, l'ADN a parlé : ils viennent de Taïwan. Ou peut-être du nord des Philippines. L'enseignant-chercheur Matthew Spriggs de la Australian National University (ANU), dont l'équipe a excavé deux des squelettes étudiés, explique dans un communiqué que "les habitants des Vanuatu d'aujourd'hui descendent principalement d'Asie. Ils sortent directement de Taïwan, et peut-être du nord des Philippines. Ils ont voyagé sans s'arrêter aux endroits déjà habités, mais quand ils sont arrivés aux Vanuatu il n'y avait personne. Ils étaient les premiers" raconte le chercheur. Ils ne se sont installés aux Tonga que légèrement plus tard. Malheureusement, l'étude n'a pas étudié les sites archéologiques des Samoa, ce qui aurait permis de régler un autre différent entre les deux pays qui se revendiquent tous les deux comme le berceau de la civilisation Polynésienne (c'est dans l'un des deux archipels que les Lapita ont évolué en Polynésiens).
Les analyses de la nouvelle étude montrent aussi que, déjà à l'époque, c'est le mélange qui a créé le peuple de Polynésie : "Ce n'est que plus tard qu'ils ont épousé des papous et créé le mix génétique que nous voyons aujourd'hui aux Vanuatu et à travers le Pacifique. Aujourd'hui, tous les îliens du Pacifique sont un mélange de ces populations asiatiques et mélanésiennes. Les différences sont seulement dans les pourcentages…" éclaire le professeur Matthew Spriggs.
Les analyses de la nouvelle étude montrent aussi que, déjà à l'époque, c'est le mélange qui a créé le peuple de Polynésie : "Ce n'est que plus tard qu'ils ont épousé des papous et créé le mix génétique que nous voyons aujourd'hui aux Vanuatu et à travers le Pacifique. Aujourd'hui, tous les îliens du Pacifique sont un mélange de ces populations asiatiques et mélanésiennes. Les différences sont seulement dans les pourcentages…" éclaire le professeur Matthew Spriggs.
L'ancienne carte du peuplement des îles du Pacifique. Les dernières recherches la contestent de plus en plus, les analyses génétiques de squelettes âgés de 3000 ans confirmant une nouvelle fois que nos ancêtres venaient de Taïwan.
Si cette publication permet de trancher un débat qui fait rage depuis si longtemps, c'est qu'elle a utilisé de toutes nouvelles techniques d'analyse génétique qui permettent de mieux extraire les ADN très anciens. Le docteur Stuart Bedford, qui a lui-aussi participé aux fouilles aux Vanuatu, explique dans le communiqué de l'ANU que "c'est une découverte vraiment remarquable. Les débats sur l'origine des habitants du Pacifique font rage depuis, littéralement, des siècles, en particulier ceux qui concernent les Lapita, les premiers à coloniser les îles allant de Vanuatu aux Tonga. Cette découverte prouve l'énorme potentiel de ce type de recherches, mais ces données nous ont déjà offerts une pièce très importante du puzzle."
LES FEMMES JOUAIENT UN ROLE PRIMORDIAL
Les analyses génétiques ont été effectuées par une équipe rassemblant des chercheurs de la Harvard Medical School, de la University College Dublin et du Max Planck institute for the Science of Human History. L'un des principaux chercheur de cette équipe, le docteur Ron Pinhasi de la University College Dublin, explique de son côté que "ce sont les premières données portant sur le génome entier d'humains préhistoriques des Tropiques, et ce fut rendu possible par des méthodes améliorées dans la préparation des squelettes. Ces résultats inattendus sur l'histoire océanienne soulignent la puissance de l'analyse des ADN anciens (aDNA) pour renverser des modèles établis sur le passé de l'Homme."
Les analyses de son équipe ont aussi révélé un détail intéressant sur la structure de ces premières sociétés : "une trouvaille particulièrement intéressante vient des différents types d'ascendances observés dans le chromosome X, qui est principalement hérité des mères. Elle révèle que la vaste majorité des ancêtres de ces pionniers de l'océan qui survivent aujourd'hui étaient des femmes, ce qui montre comment l'information génétique peut apporter une idée des processus culturels de ces anciennes sociétés."
LES FEMMES JOUAIENT UN ROLE PRIMORDIAL
Les analyses génétiques ont été effectuées par une équipe rassemblant des chercheurs de la Harvard Medical School, de la University College Dublin et du Max Planck institute for the Science of Human History. L'un des principaux chercheur de cette équipe, le docteur Ron Pinhasi de la University College Dublin, explique de son côté que "ce sont les premières données portant sur le génome entier d'humains préhistoriques des Tropiques, et ce fut rendu possible par des méthodes améliorées dans la préparation des squelettes. Ces résultats inattendus sur l'histoire océanienne soulignent la puissance de l'analyse des ADN anciens (aDNA) pour renverser des modèles établis sur le passé de l'Homme."
Les analyses de son équipe ont aussi révélé un détail intéressant sur la structure de ces premières sociétés : "une trouvaille particulièrement intéressante vient des différents types d'ascendances observés dans le chromosome X, qui est principalement hérité des mères. Elle révèle que la vaste majorité des ancêtres de ces pionniers de l'océan qui survivent aujourd'hui étaient des femmes, ce qui montre comment l'information génétique peut apporter une idée des processus culturels de ces anciennes sociétés."
Le modèle du "bateau lent" prend un coup dans l'aile
Ce pot lapita est conservé au Musée National des Vanuatu. Ces poteries qui utilisent des techniques asiatiques ont permis aux archéologues d'identifier un peuple différent des mélanésiens, qui s'est ensuite transformé pour devenir le peuple Polynésien.
Dans le débat scientifique sur l'origine des peuples du Pacifique, on sait depuis longtemps que les Polynésiens et Micronésiens d'aujourd'hui ont des gènes similaires à ceux des indigènes de Taïwan (ces indigènes ne représentent aujourd'hui plus que 2% de la population de cette île, qu'ils avaient colonisé il y a quatre mille ans depuis le sud-est de la Chine. Mais leurs descendants vivent encore dans une grande partie de l'Asie et de l'Océanie), mélangés à des gènes mélanésiens.
Mais le débat porte encore aujourd'hui sur la chronologie. La thèse défendue par l'équipe internationale ayant dirigé ces toutes dernières analyses est celle du "train express", où les Lapita sont arrivés de Taïwan et ont rapidement colonisé les premières îles polynésiennes, avant de se mélanger aux populations mélanésiennes et de leur emprunter des éléments linguistiques ou culturels, des techniques agricoles, etc.
Cette théorie est en concurrence avec l'hypothèse du "bateau lent", ou "Slow boat model". Dans ce dernier modèle, les arrivants taïwanais se sont d'abord mélangés aux populations mélanésiennes, puis ces "demis" ont colonisé petit à petit le reste des îles. Cette dernière hypothèse est désormais de plus en plus improbable…
Mais le débat porte encore aujourd'hui sur la chronologie. La thèse défendue par l'équipe internationale ayant dirigé ces toutes dernières analyses est celle du "train express", où les Lapita sont arrivés de Taïwan et ont rapidement colonisé les premières îles polynésiennes, avant de se mélanger aux populations mélanésiennes et de leur emprunter des éléments linguistiques ou culturels, des techniques agricoles, etc.
Cette théorie est en concurrence avec l'hypothèse du "bateau lent", ou "Slow boat model". Dans ce dernier modèle, les arrivants taïwanais se sont d'abord mélangés aux populations mélanésiennes, puis ces "demis" ont colonisé petit à petit le reste des îles. Cette dernière hypothèse est désormais de plus en plus improbable…