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Neuf mois avec sursis pour complicité d'escroquerie


Tahiti, le 28 janvier 2025 - Une jeune femme d'une trentaine d'années au casier vierge comparaissait ce mardi devant le tribunal correctionnel pour des faits de complicité d'escroquerie. Une arnaque sur les réseaux sociaux au préjudice d'une dizaine de victimes pour un montant total de plus de trois millions de francs. Elle a écopé de neuf mois de prison avec sursis et devra indemniser les parties civiles.
 
Une jeune femme d'une trentaine d'années comparaissait ce mardi devant le tribunal correctionnel pour des faits de complicité d'escroquerie commis entre mai et décembre 2023. Une dizaine de victimes ont ainsi été escroquées pour un montant total de trois millions de francs, en lui ayant fait des acomptes pour acheter une voiture qu'elles ne conduiront évidemment jamais. Mais l'auteur principal des faits n'a jamais été identifié. Et pour cause puisqu'il s'agit d'une des nombreuses arnaques qui prolifèrent sur les réseaux sociaux : trouver des intermédiaires qui permettent d'escroquer des centaines de victimes. Ce qu'on appelle des brouteurs.
 
À la barre, cette intermédiaire est une jeune femme qui travaille actuellement dans une roulotte et qui n'a jamais eu affaire à la justice jusqu'à présent. Elle explique qu'à l'époque, elle gagnait 60 000 francs par mois en tant que technicienne de service et qu'elle a répondu à une annonce d'offre d'emploi sur Facebook pour avoir un complément de revenus. Une pseudo société de location de voiture lui demande de lui communiquer son relevé d'identité bancaire (RIB) au motif que la société est en train de se constituer. “Ils m'ont dit qu'ils feraient des virements sur mon compte.”
 
“La naïveté a ses limites”
 
Si elle affirme penser avoir un travail honnête, le juge semble en douter fortement : “Pour un patron que vous n'avez jamais rencontré ? Sans contrat de travail ?”  Elle concède timidement qu'elle n'avait aucune preuve que la société existait. Chaque transaction lui rapportait 15 000 francs uniquement en prêtant son compte bancaire.
 
“Comment peut-on se faire rémunérer avec une inaction ! C'est du pur délire, de la pure escroquerie”, claque la procureure qui estime que “la naïveté a ses limites” et que la rédaction même de l'annonce de recrutement “truffée de fautes” aurait dû suffire à l'alerter.
 
Sur les dix victimes qui se sont constituées partie civile, une seule était présente à l'audience. Elle raconte avoir eu besoin de remplacer son véhicule il y a deux ans et tombe alors sur une annonce proposant une petite citadine à un “prix assez abordable”. “J'habite à Moorea et ils me disent que si je veux bloquer le véhicule, il faut que je verse une avance de 200 000 francs. J'ai fait le versement et le soir, j'ai un message pour me dire que la personne est en déplacement dans les îles et j'ai commencé à comprendre que je me faisais arnaquer”, témoigne la victime, consciente d'avoir “peut-être manqué de vigilance”. À sa décharge, le soi-disant vendeur lui avait communiqué les (faux) papiers du véhicule pour la mettre en confiance et ça a fonctionné.
 
Pour la défense, le tribunal se trompe de cible
 
Pour l'avocat de la prévenue, le tribunal se trompe de cible car l'auteur principal des faits est le grand absent de l'audience. Celui qui n'a donc jamais été identifié, et qui se présentait comme étant le propriétaire des véhicules fantômes. C'est lui qui était en contact avec les acheteurs. Sa cliente n'a fait que répondre à une “annonce somme toute basique” et “elle a mordu à l'hameçon” en lui communiquant son RIB. “Il n'y a aucune volonté manifeste d'escroquer de sa part”, a-t-il plaidé arguant du fait que cette jeune femme a touché “en tout et pour tout 80 000 francs” alors qu'elle avait accès à ces trois millions et qu'elle aurait pu “s'empresser de vider son compte”.
 
Il a demandé la relaxe de sa cliente qui est, selon lui, “également dans une position de victime potentielle”, et le rejet de demande d'indemnisation des parties civiles car elles n'ont pas versé les justificatifs de virements au dossier. “Qu'elle en ait profité à 100% ou à 20% ne m'intéresse pas (...) car sans elle, il n'y a pas d'escroquerie sur le sol polynésien”, a lancé la procureure qui a demandé une sanction “suffisamment forte pour qu'elle ne recommence plus”, soit 18 mois de prison avec sursis probatoire de trois ans, obligation de travail et d'indemnisation des victimes.
 
Après en avoir délibéré, le tribunal correctionnel a finalement condamné la jeune femme à 9 mois de prison avec sursis et à l'indemnisation des parties civiles. 
 

Rédigé par Stéphanie Delorme le Mardi 28 Janvier 2025 à 18:25 | Lu 2847 fois