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Manihi, du laisser-aller sur l’environnement


Tahiti, le 21 octobre 2024 - La Chambre territoriale des comptes a rendu son rapport sur la gestion de Manihi ces cinq dernières années. Sans être catastrophique, ce rapport pointe du doigt une gestion financière malhabile et une régression de la prise en compte environnementale sur l’atoll.

 
La Chambre territoriale des comptes a rendu ce lundi dans la journée un nouveau rapport, cette fois sur la commune de Manihi, aux Tuamotu concernant les exercices 2019 jusqu’à aujourd’hui. Une commune que la CTC analyse comme “en déclin économique et démographique” après “quatre décennies prospères portées par la perliculture et l’activité touristique grâce à un hôtel de standing”, fermé en 2012.

 
Sans être définitivement sévère, ce rapport note “un pilotage communal à renforcer dans différents domaines”. Dans sa comptabilité tout d’abord, il semble que la petite commune soit à la peine avec ses chiffres au point que la CTC recommande “de la clarté” pour éviter à la commune une “confusion entre les restes à réaliser et les crédits annulés” pour préparer au mieux son budget.
 

Une comptabilité mise à mal, comme dans toutes les autres communes du Fenua, par le manque à gagner lié aux sommes non réclamées des factures d’ordures ménagères. Sans se perdre dans la gabegie, le conseil municipal de Manihi peine à faire le tri dans ses dépenses et ses recettes, au point de ne plus parvenir à dégager de capacité d’autofinancement brute. Ainsi, 777 millions de francs de dépenses d’équipement ont été réalisées sur le seul budget principal, “obligeant la commune à mobiliser chaque année (sauf en 2021) son fonds de roulement pour couvrir ses dépenses”, explique la CTC. Conséquence : “Le fonds de roulement, asséché par les prélèvements successifs, est négatif à partir de 2022.” Sa trésorerie ne permet donc plus à la commune de voir à long terme.

Problématique des bateaux

Ayant du mal à gérer son personnel communal, Manihi flirte aussi avec l’illégal concernant l’utilisation de ses deux bateaux communaux. Le premier est en défaut d’homologation et le second est utilisé “en violation manifestement délibérée d'une obligation particulière de prudence ou de sécurité imposée par la loi ou le règlement”. Des données qui inquiètent la Chambre puisque sont relevés des transports de personnes qui dépassent la capacité permise, des transports inter-îles non-autorisés ou encore des pilotes sans qualification.
 

Autre problème naval, alors que la commune est membre du syndicat à vocation multiple des Tuamotu-Gambier et qu’elle pourrait s’appuyer sur cette instance pour une assistance technique et financière, Manihi a néanmoins eu recours pendant la période 2020-2022, à un prestataire de service pour des tâches identiques moyennant un montant de plus de 5,16 millions de francs.

Des services à revoir

L’électricité et l’eau sont des services pris en charge par la mairie. Mais la Chambre constate que ces services sont sporadiques. Le service public de l’électricité est marqué par des dysfonctionnements significatifs des batteries de la centrale hybride de Manihi, obligeant cette dernière à fonctionner désormais exclusivement sur groupes électrogènes, ce qui impacte de fait les finances de la commune. Quant à l’eau, si des bornes de distribution ont été installées, elles sont “en grande partie inutilisables pour la population compte tenu de problèmes techniques et d’une qualité de l’eau encore insuffisante pour être considérée comme potable”.

 
Enfin, la CTC s’inquiète aussi de voir le service des déchets en pleine régression avec la tolérance d’un dépotoir au sein du village principal, à quelques mètres de l’océan et des habitations.

Des agents anormalement malades

Outre quelques recrutements temporaires bizarres comme en 2020 lorsque la commune a recruté dix agents de sécurité publique “pour surveillance et médiation” et pour une durée de de 15 jours, lors des périodes des fêtes et de vacances scolaires avec le retour des jeunes de Tahiti, la Chambre s’interroge sur les arrêts maladie des agents de Manihi : “L’absentéisme des agents s’amplifie depuis deux ans, notamment pour les congés de maladie dite ordinaire (hors longue maladie, maladie grave, accident du travail, congé de maternité, etc.qui ne cessent de progresser (de 446,5 jours en 2020 à 1022,5 jours en 2023)”, constate la CTC.
 
Deux fois plus d’arrêt en deux ans ! La Chambre, pour y mettre de l’ordre, recommande l’application des jours de carence et des demandes de contrôle de la CPS.

Les recommandations
  • Mettre en œuvre, dès à présent, une évaluation annuelle des agents ;
  • Réaliser, dès 2024, un document Unique d’Évaluation des Risques Professionnels ;
  • Respecter, dès à présent, les conditions réglementaires liées aux obligations de sécurité du transport de personnes par voie maritime ;
  • Réaliser et formaliser, dès 2024, au moins un contrôle par an de la régie par l’ordonnateur ;
  • En tenant compte des ressources limitées, distribuer, dès 2024, de l’eau potabilisée aux bornes collectives ;
  • Relancer, dès 2024, le processus de CET pour la commune de Manihi ;
  • Assurer, dès 2025, le service d’assainissement non-collectif des eaux usées.

Rédigé par Bertrand PREVOST le Lundi 21 Octobre 2024 à 19:21 | Lu 2386 fois