Mama Ah-Sin détient un trésor entre ses mains. Aujourd'hui, elle enseigne le "reo tūtae 'āuri" à celles et ceux qui le souhaitent.
TUBUAI, le 19/12/2016 - Le "reo tūtae 'āuri", qui se traduit par la langue rouillée, disparaitra si les habitants de Tubuai ne font pas l'effort de la conserver. Elle est pratiquée encore aujourd'hui par quelques personnes sur l'île. Nous avons rencontré l'une d'elles, en la personne de mama Ah-Sin, résidente de Taahuaia. Selon elle, le "reo tūtae 'āuri" s'applique en mettant le terme "te" entre chaque syllabe, dans un mot. Rencontre.
"Teoteratena", "Iaorana" en tahitien. C'est dans sa maison autour de sa table ronde que mama Ah-Sin, 88 ans, nous reçoit, dans une belle robe locale verte. Près d'elle, se trouve son mari. Dans cette petite maison qui a été refaite, après le passage d'Oli en 2010, on retrouve également quelques-uns de ses enfants. Un havre de paix, comme on en retrouve beaucoup dans les îles. Mais sa spécialité est le savoir qui s'y renferme.
En effet, mama Ah-Sin est comme un livre ouvert où un précieux savoir y est inscrit, tel que la langue natale de l'île de Tubuai, appelée "reo tūtae 'āuri", la langue rouillée en français. Une richesse qui sera amenée à disparaitre puisque peu de personnes la parlent encore aujourd'hui, sûrement dû à la complexité de la pratique.
Ce savoir, mama Ah-Sin le doit à sa grand-mère. "Elle m'avait dit que notre langue s'appelait le "reo tūtae 'āuri, parce qu'il y avait deux types de langue et que c'était à moi de choisir ce qui me plaisais. Et, j'ai préféré la langue avec les "te"", raconte-t-elle. "Je vais vous donner un exemple", poursuit-elle. "Si je te salue, je vais te dire "teoteratena", tu vas mettre le terme "te" dans chaque mot, entre les syllabes. Mais on ne met pas n'importe comment, il faut voir si cela est faisable. Elle me disait qu'il n'y a aucune langue qui ressemblait à la nôtre."
Dans son récit, mama Ah-Sin précise que ce savoir a été transmis à sa grand-mère par les parents de son grand-père. "Donc, pendant que notre grand-père allait à son travail de policier municipal, nous allions avec elle pour qu'elle partage avec nous cette langue. Elle nous disait toujours de bien retenir : quand tu salues une personne, tu lui diras "teoteratena", ce qui veut dire "iaorana", "teo teve" qui veut dire "o oe", "tei teite matehatena" "teie mahana", "teteateha teoteve tehuteru" "eiaha to oe huru ?", "teite matehatena" "i teie mahana". "Tea temaiteta teme tematetai" "aita mea maitai"".
"Aujourd'hui, je suis fière d'avoir ce savoir entre mes mains. Mais je suis également triste de voir que notre langue est amenée à disparaitre. Une fois, mon petit fils est allé à l'école et leur enseignant leur avait demandé de parler dans leur langue maternelle. C'était le seul à ne pas connaitre sa langue natale et quand je descendais à Papeete, il venait me voir pour que je lui apprenne cette langue. Donc, il écrivait tout ce que je lui disais. Il m'a ensuite embrassée et câlinée puisqu'il pourra, à présent, partager cela avec ses camarades de classe. À Tubuai, il n'y a aucun enfant qui connait cela", regrette-t-elle.
Pour partager ce savoir et cette richesse, mama Ah-Sin donnait, à l'époque, des cours aux personnes désireuses de connaitre cette langue. "Mes élèves aimaient le fait de connaitre cette langue, mais lorsque je leur parlais en "reo tūtae 'āuri", ils n'arrivaient pas à me répondre. Lorsqu'une personne vient à moi pour me demander de partager avec elle ce savoir, je le fais avec plaisir. Tout ce que je demande aux personnes avec qui je partage cela, c'est de dire que c'est moi qui leur ai appris."
"Teoteratena", "Iaorana" en tahitien. C'est dans sa maison autour de sa table ronde que mama Ah-Sin, 88 ans, nous reçoit, dans une belle robe locale verte. Près d'elle, se trouve son mari. Dans cette petite maison qui a été refaite, après le passage d'Oli en 2010, on retrouve également quelques-uns de ses enfants. Un havre de paix, comme on en retrouve beaucoup dans les îles. Mais sa spécialité est le savoir qui s'y renferme.
En effet, mama Ah-Sin est comme un livre ouvert où un précieux savoir y est inscrit, tel que la langue natale de l'île de Tubuai, appelée "reo tūtae 'āuri", la langue rouillée en français. Une richesse qui sera amenée à disparaitre puisque peu de personnes la parlent encore aujourd'hui, sûrement dû à la complexité de la pratique.
Ce savoir, mama Ah-Sin le doit à sa grand-mère. "Elle m'avait dit que notre langue s'appelait le "reo tūtae 'āuri, parce qu'il y avait deux types de langue et que c'était à moi de choisir ce qui me plaisais. Et, j'ai préféré la langue avec les "te"", raconte-t-elle. "Je vais vous donner un exemple", poursuit-elle. "Si je te salue, je vais te dire "teoteratena", tu vas mettre le terme "te" dans chaque mot, entre les syllabes. Mais on ne met pas n'importe comment, il faut voir si cela est faisable. Elle me disait qu'il n'y a aucune langue qui ressemblait à la nôtre."
Dans son récit, mama Ah-Sin précise que ce savoir a été transmis à sa grand-mère par les parents de son grand-père. "Donc, pendant que notre grand-père allait à son travail de policier municipal, nous allions avec elle pour qu'elle partage avec nous cette langue. Elle nous disait toujours de bien retenir : quand tu salues une personne, tu lui diras "teoteratena", ce qui veut dire "iaorana", "teo teve" qui veut dire "o oe", "tei teite matehatena" "teie mahana", "teteateha teoteve tehuteru" "eiaha to oe huru ?", "teite matehatena" "i teie mahana". "Tea temaiteta teme tematetai" "aita mea maitai"".
"Aujourd'hui, je suis fière d'avoir ce savoir entre mes mains. Mais je suis également triste de voir que notre langue est amenée à disparaitre. Une fois, mon petit fils est allé à l'école et leur enseignant leur avait demandé de parler dans leur langue maternelle. C'était le seul à ne pas connaitre sa langue natale et quand je descendais à Papeete, il venait me voir pour que je lui apprenne cette langue. Donc, il écrivait tout ce que je lui disais. Il m'a ensuite embrassée et câlinée puisqu'il pourra, à présent, partager cela avec ses camarades de classe. À Tubuai, il n'y a aucun enfant qui connait cela", regrette-t-elle.
Pour partager ce savoir et cette richesse, mama Ah-Sin donnait, à l'époque, des cours aux personnes désireuses de connaitre cette langue. "Mes élèves aimaient le fait de connaitre cette langue, mais lorsque je leur parlais en "reo tūtae 'āuri", ils n'arrivaient pas à me répondre. Lorsqu'une personne vient à moi pour me demander de partager avec elle ce savoir, je le fais avec plaisir. Tout ce que je demande aux personnes avec qui je partage cela, c'est de dire que c'est moi qui leur ai appris."
UNE ASSOCIATION A VU LE JOUR
Pour permettre d'étendre leurs actions, les quelques personnes qui maitrisaient le "reo tūtae 'āuri" ont mis en place une association qui portait le nom de la montagne de Tubuai, "Taita'a". Plusieurs membres constituaient cette association, aussi bien des adultes que des jeunes. Des cours de reo ont été enseignés dans les locaux de l'ancien administrateur, ainsi que des danses en "reo tūtae 'āuri". "Tout le monde était motivé à apprendre cette langue".
"L'administrateur me disait que je pouvais apprendre à l'école mais qu'il fallait que je m'arrange avec l'enseignant. Comme cela, on pouvait définir des créneaux pour les cours. Mais le souci est que certains parents ne nous soutenaient pas, mais ce n'était pas grave", se rappelle mama Ah-Sin.
Mais aujourd'hui, l'association a été mise en sommeil par manque de fonds et d'activités. Mama Ah-Sin a préféré baisser les bras. "L'idéal serait de demander aux habitants de Tubuai d'apprendre cette langue, mais je ne préfère pas parce que les gens sont hypocrites. Devant, ils te disent qu'ils ont envie d'apprendre, mais au fond d'eux ce n'est pas le cas. Tu arrives à ressentir tout cela, et à reconnaitre les personnes qui veulent vraiment apprendre."
Pour permettre d'étendre leurs actions, les quelques personnes qui maitrisaient le "reo tūtae 'āuri" ont mis en place une association qui portait le nom de la montagne de Tubuai, "Taita'a". Plusieurs membres constituaient cette association, aussi bien des adultes que des jeunes. Des cours de reo ont été enseignés dans les locaux de l'ancien administrateur, ainsi que des danses en "reo tūtae 'āuri". "Tout le monde était motivé à apprendre cette langue".
"L'administrateur me disait que je pouvais apprendre à l'école mais qu'il fallait que je m'arrange avec l'enseignant. Comme cela, on pouvait définir des créneaux pour les cours. Mais le souci est que certains parents ne nous soutenaient pas, mais ce n'était pas grave", se rappelle mama Ah-Sin.
Mais aujourd'hui, l'association a été mise en sommeil par manque de fonds et d'activités. Mama Ah-Sin a préféré baisser les bras. "L'idéal serait de demander aux habitants de Tubuai d'apprendre cette langue, mais je ne préfère pas parce que les gens sont hypocrites. Devant, ils te disent qu'ils ont envie d'apprendre, mais au fond d'eux ce n'est pas le cas. Tu arrives à ressentir tout cela, et à reconnaitre les personnes qui veulent vraiment apprendre."
Aujourd'hui, la langue qui est pratiquée à Tubuai est le tahitien. "Un jour, j'avais dit à mon petit-fils : sais-tu quelle île parle la même langue que Tahiti ? Tubuai alors que nous avons une langue. Mais certains ont dit que nous n'avons pas de langue. Donc, ils ont préféré parler comme les Tahitiens, alors que nous avons notre langue qui est le "reo tūtae 'āuri". Certains disent que c'est une langue pour les alcooliques, mais je ne fais pas attention à cela."
À la question de savoir pourquoi les ancêtres de Tubuai avaient appelé leur langue maternelle, le "reo tūtae 'āuri", mama Ah-Sin s'est contentée de répondre : "je ne sais pas", mais "une personne m'avait dit à l'époque, que les personnes âgées avaient laissé leurs affaires dans le sable et lorsqu'ils les ont sortis, tout était rouillé. Il pense que c'est à cause de cela. Mais, nous ne sommes pas sûrs parce que ma grand-mère ne m'a jamais expliquée l'origine de cette appellation."
Dans l'archipel des Australes, Tubuai est la seule île à parler le tahitien, contrairement aux autres îles Rurutu, Rimatara, Raivavae et Rapa. Un archipel, où la diversité des sonorités est présente, ce qui reflète bien la beauté de nos langues polynésiennes, ce qui devrait faire la fierté des Polynésiens.
À la question de savoir pourquoi les ancêtres de Tubuai avaient appelé leur langue maternelle, le "reo tūtae 'āuri", mama Ah-Sin s'est contentée de répondre : "je ne sais pas", mais "une personne m'avait dit à l'époque, que les personnes âgées avaient laissé leurs affaires dans le sable et lorsqu'ils les ont sortis, tout était rouillé. Il pense que c'est à cause de cela. Mais, nous ne sommes pas sûrs parce que ma grand-mère ne m'a jamais expliquée l'origine de cette appellation."
Dans l'archipel des Australes, Tubuai est la seule île à parler le tahitien, contrairement aux autres îles Rurutu, Rimatara, Raivavae et Rapa. Un archipel, où la diversité des sonorités est présente, ce qui reflète bien la beauté de nos langues polynésiennes, ce qui devrait faire la fierté des Polynésiens.