Tahiti, le 27 décembre 2023 – Si la Polynésie française regorge de combattants, elle semble néanmoins très peu fournie en athlètes. Une différence de taille qui pèse à l'heure de la professionnalisation des arts martiaux mixtes sur le territoire. Entre les rêves de gloire et l'exigence de la réalité, les acteurs locaux du MMA prennent petit à petit la pleine mesure du chantier qui les attend.
L'Ultimate Fighting Championship (UFC) et son octogone, où se décident désormais les carrières des plus grands combattants au monde, fascinent. Référence absolue dans le milieu des sports de combat, l'organisation a pour habitude de sortir des champions des endroits les plus improbables et d'en faire de véritables stars internationales. En témoignent les carrières de Conor McGregor, issu des quartiers modestes de Dublin en Irlande, et de Francis N'Gannou, originaire des mines de sable de Batié au Cameroun. Des “success stories” à l'américaine qui n'ont pas manqué d'inspirer toute une nouvelle génération de jeunes passionnés, dont celle du Fenua.
Et pour cause, depuis la légalisation du MMA en France en 2020, tout s'est très vite accéléré pour la discipline et ses pratiquants. En Polynésie, nombreux sont les clubs qui ont vu le jour, permettant à la Fédération polynésienne de lutte, arts martiaux mixtes, jiu-jitsu brésilien et disciplines associées (FPLAJDA) et aux diverses organisations de multiplier les événements amateurs. Un essor confirmé par l'émergence d'organisations telles que l'Octo Fighting League (OFL) et le Tahiti Fighting Championship (TFC), qui ont proposé en 2023 les premiers combats professionnels et internationaux en terre mā'ohi. Une professionnalisation de la discipline qui fait désormais naître des vocations chez les combattants locaux qui ne cachent plus leurs ambitions : s'exporter et vivre du MMA. Mais suite à une grosse saison 2023 – la première en son genre sur le territoire –, les différents acteurs du MMA local tirent leur bilan : l'UFC, ce n'est pas pour tout de suite.
Un manque de professionnalisme
Car après les rêves, il y a toujours le retour à la réalité. Si la Polynésie s'est toujours vantée d'être un vivier de combattants, le MMA, tout comme la boxe anglaise en son temps, a très vite exposé les lacunes de ses pratiquants. “C'est tout bête, mais encore là lors de l'OFL 2, j'ai des combattants qui n'étaient pas au poids”, pointe du doigt Avaro Neagle, co-organisatrice de l'Octo Fighting League. “Ils ne se rendent pas comptent, mais c'est la base pour prétendre combattre dans une grosse organisation. Il faut être capable d'identifier sa catégorie et de se présenter le jour de la pesée au poids règlementaire. Si nous le faisons ici, c'est pour qu'ils prennent les bonnes habitudes dès aujourd'hui”, insiste-t-elle, à raison. Pour autant, Avaro Neagle fait la distinction entre les combattants : “Il y a des compétiteurs qui se présentent par passion mais qui ne comptent pas faire carrière. Ceux-là, à la rigueur, ce n'est pas si grave. Par contre, ceux qui aspirent à en faire leur métier, c'est maintenant qu'il faut prendre conscience. Des fois, ils n'ont pas beaucoup à perdre en termes de poids et ils ne prennent même pas la peine de le faire. Pour l'organisation, c'est un problème. Le sérieux, ça compte.”
De leur côté, les clubs tentent également de faire le tri parmi leurs adhérents : “Il est hors de question de se voiler la face. Si un adhérent vient et me dit qu'il pense vouloir faire une carrière professionnelle alors qu'il n'a pas le bagage qu'il faut, je lui dis directement que ce n'est pas possible”, explique Keoni Terorotua, combattant professionnel et leader du club Te Aro MMA, pour qui la Polynésie a besoin de plus de temps et d'expérience avant de prétendre à de plus grands desseins : “Je n'aime pas trop parler des grosses organisations comme l'UFC, le PFL ou l'Ares à mes adhérents. Il s'agit encore d'une discipline nouvelle pour nous et les grands pays ont beaucoup trop d'avance. Je pense qu'il faut d'abord construire une base solide ici en Polynésie et se concentrer sur les amateurs.” Une tâche qui semble déjà difficile, au vu du contexte dans lequel se trouvent les clubs : “Il faut que les clubs jouent davantage le jeu et présentent leurs athlètes aux compétitions locales. Pour progresser, il faut monter dans la cage. Mais les adversaires se font de plus en plus rares. C'est la grande difficulté aujourd'hui en Polynésie”, ajoute Keoni Terorotua avec regret, dénonçant un manque d'émulation malgré le nombre important de pratiquants.
Des promesses pour l'avenir
Fort heureusement, le tableau n'est pas tout noir, bien au contraire. Certains athlètes ont excellé aussi bien sur la scène locale, à l'exemple d'un Julian Schlouch en grande forme cette saison, mais également sur la scène internationale, à l'image de Ariimana Lehartel qui s'est placé 3e au championnat du monde amateur de MMA. “Ce sont des performances qui nous rassurent dans le chemin que nous avons emprunté”, confie Keoni Terorotua. “Cela confirme que nous avons un certain niveau et qu'il est possible de réaliser des choses à l'international. C'est important. Lorsqu'il n'y a pas de résultats, c'est difficile de se situer. Là, c'est un cap que le MMA polynésien vient de franchir.” Et le leader du club Te Aro MMA sait de quoi il parle. Régulièrement en déplacement en Nouvelle-Zélande dans le mythique club du City Kick Boxing, Keoni Terorotua connaît l'exigence internationale et reste enthousiaste quant à l'avenir du MMA polynésien : “Nous avons la chance d'être de l'Océanie. Aujourd'hui, il s'agit d'une zone géographique où le niveau en MMA est très élevé, notamment grâce à la Nouvelle-Zélande et l'Australie qui ont produit de grands champions tels que Israel Adesanya et Alexander Volkanovski. Il faut profiter de cette expérience et surtout se faire remarquer dans la région. Après, les contrats, ça peut aller très vite.”
Autre avantage pour les futurs athlètes professionnels, les choix de carrière multiples. En effet, aujourd'hui, les organisations sont nombreuses et permettent aux combattants d'envisager plusieurs façons d'entrer dans les plus grosses écuries. “Il existe aussi de belles organisations à l'échelle nationale pour se faire connaître”, déclare Avaro Neagle. “Entre l'Ares et l'Hexagone MMA, cela offre déjà de belles opportunités.” Car si l'UFC reste l'organisation de référence en termes de prestige, d'autres mastodontes se sont fait un nom et sont à l'affut d'éventuelles pépites insoupçonnées. En effet, entre le One Championship ou la Professional Fighters League, d'autres carrières, mieux rémunérées, peuvent également s'ouvrir aux futurs athlètes polynésiens. Encore faut-il s'en donner les moyens.
L'Ultimate Fighting Championship (UFC) et son octogone, où se décident désormais les carrières des plus grands combattants au monde, fascinent. Référence absolue dans le milieu des sports de combat, l'organisation a pour habitude de sortir des champions des endroits les plus improbables et d'en faire de véritables stars internationales. En témoignent les carrières de Conor McGregor, issu des quartiers modestes de Dublin en Irlande, et de Francis N'Gannou, originaire des mines de sable de Batié au Cameroun. Des “success stories” à l'américaine qui n'ont pas manqué d'inspirer toute une nouvelle génération de jeunes passionnés, dont celle du Fenua.
Et pour cause, depuis la légalisation du MMA en France en 2020, tout s'est très vite accéléré pour la discipline et ses pratiquants. En Polynésie, nombreux sont les clubs qui ont vu le jour, permettant à la Fédération polynésienne de lutte, arts martiaux mixtes, jiu-jitsu brésilien et disciplines associées (FPLAJDA) et aux diverses organisations de multiplier les événements amateurs. Un essor confirmé par l'émergence d'organisations telles que l'Octo Fighting League (OFL) et le Tahiti Fighting Championship (TFC), qui ont proposé en 2023 les premiers combats professionnels et internationaux en terre mā'ohi. Une professionnalisation de la discipline qui fait désormais naître des vocations chez les combattants locaux qui ne cachent plus leurs ambitions : s'exporter et vivre du MMA. Mais suite à une grosse saison 2023 – la première en son genre sur le territoire –, les différents acteurs du MMA local tirent leur bilan : l'UFC, ce n'est pas pour tout de suite.
Un manque de professionnalisme
Car après les rêves, il y a toujours le retour à la réalité. Si la Polynésie s'est toujours vantée d'être un vivier de combattants, le MMA, tout comme la boxe anglaise en son temps, a très vite exposé les lacunes de ses pratiquants. “C'est tout bête, mais encore là lors de l'OFL 2, j'ai des combattants qui n'étaient pas au poids”, pointe du doigt Avaro Neagle, co-organisatrice de l'Octo Fighting League. “Ils ne se rendent pas comptent, mais c'est la base pour prétendre combattre dans une grosse organisation. Il faut être capable d'identifier sa catégorie et de se présenter le jour de la pesée au poids règlementaire. Si nous le faisons ici, c'est pour qu'ils prennent les bonnes habitudes dès aujourd'hui”, insiste-t-elle, à raison. Pour autant, Avaro Neagle fait la distinction entre les combattants : “Il y a des compétiteurs qui se présentent par passion mais qui ne comptent pas faire carrière. Ceux-là, à la rigueur, ce n'est pas si grave. Par contre, ceux qui aspirent à en faire leur métier, c'est maintenant qu'il faut prendre conscience. Des fois, ils n'ont pas beaucoup à perdre en termes de poids et ils ne prennent même pas la peine de le faire. Pour l'organisation, c'est un problème. Le sérieux, ça compte.”
De leur côté, les clubs tentent également de faire le tri parmi leurs adhérents : “Il est hors de question de se voiler la face. Si un adhérent vient et me dit qu'il pense vouloir faire une carrière professionnelle alors qu'il n'a pas le bagage qu'il faut, je lui dis directement que ce n'est pas possible”, explique Keoni Terorotua, combattant professionnel et leader du club Te Aro MMA, pour qui la Polynésie a besoin de plus de temps et d'expérience avant de prétendre à de plus grands desseins : “Je n'aime pas trop parler des grosses organisations comme l'UFC, le PFL ou l'Ares à mes adhérents. Il s'agit encore d'une discipline nouvelle pour nous et les grands pays ont beaucoup trop d'avance. Je pense qu'il faut d'abord construire une base solide ici en Polynésie et se concentrer sur les amateurs.” Une tâche qui semble déjà difficile, au vu du contexte dans lequel se trouvent les clubs : “Il faut que les clubs jouent davantage le jeu et présentent leurs athlètes aux compétitions locales. Pour progresser, il faut monter dans la cage. Mais les adversaires se font de plus en plus rares. C'est la grande difficulté aujourd'hui en Polynésie”, ajoute Keoni Terorotua avec regret, dénonçant un manque d'émulation malgré le nombre important de pratiquants.
Des promesses pour l'avenir
Fort heureusement, le tableau n'est pas tout noir, bien au contraire. Certains athlètes ont excellé aussi bien sur la scène locale, à l'exemple d'un Julian Schlouch en grande forme cette saison, mais également sur la scène internationale, à l'image de Ariimana Lehartel qui s'est placé 3e au championnat du monde amateur de MMA. “Ce sont des performances qui nous rassurent dans le chemin que nous avons emprunté”, confie Keoni Terorotua. “Cela confirme que nous avons un certain niveau et qu'il est possible de réaliser des choses à l'international. C'est important. Lorsqu'il n'y a pas de résultats, c'est difficile de se situer. Là, c'est un cap que le MMA polynésien vient de franchir.” Et le leader du club Te Aro MMA sait de quoi il parle. Régulièrement en déplacement en Nouvelle-Zélande dans le mythique club du City Kick Boxing, Keoni Terorotua connaît l'exigence internationale et reste enthousiaste quant à l'avenir du MMA polynésien : “Nous avons la chance d'être de l'Océanie. Aujourd'hui, il s'agit d'une zone géographique où le niveau en MMA est très élevé, notamment grâce à la Nouvelle-Zélande et l'Australie qui ont produit de grands champions tels que Israel Adesanya et Alexander Volkanovski. Il faut profiter de cette expérience et surtout se faire remarquer dans la région. Après, les contrats, ça peut aller très vite.”
Autre avantage pour les futurs athlètes professionnels, les choix de carrière multiples. En effet, aujourd'hui, les organisations sont nombreuses et permettent aux combattants d'envisager plusieurs façons d'entrer dans les plus grosses écuries. “Il existe aussi de belles organisations à l'échelle nationale pour se faire connaître”, déclare Avaro Neagle. “Entre l'Ares et l'Hexagone MMA, cela offre déjà de belles opportunités.” Car si l'UFC reste l'organisation de référence en termes de prestige, d'autres mastodontes se sont fait un nom et sont à l'affut d'éventuelles pépites insoupçonnées. En effet, entre le One Championship ou la Professional Fighters League, d'autres carrières, mieux rémunérées, peuvent également s'ouvrir aux futurs athlètes polynésiens. Encore faut-il s'en donner les moyens.