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Les télés s'arrachent Miss France


Les télés s'arrachent Miss France
PAPEETE, le 19 novembre 2014 - TNTV et trois autres chaînes de télévision privée de l'Outre-mer français s'en prennent à France Télévision. Elles accusent le groupe public d'essayer de les asphyxier en leur "volant" leurs programmes phares. Dernier en date : l'élection de Miss France. Mais Polynésie Première assure réagir à l'arrivée de la TNT.

Ça a commencé par la série Les Experts, puis ce fut la Coupe du Monde de Football en 2014 et cette fois c'est l'élection de Miss France… Les chaînes de France Télévision du réseau Outremer Première réalisent depuis quelques années ce qu'elles considèrent comme de "beaux coups" en raflant des programmes phares à leurs concurrentes locales.

Mais ces dernières, TNTV en tête, sont furieuses. Les généralistes de Polynésie (TNTV), des Antilles (ATV), de la Guyane (Antenne Guyane) et de la Réunion (Antenne Réunion), accentuent leurs protestations. Il y a déjà plusieurs actions en justice en cours, le CSA est saisi, et à la fin du mois elles se feront entendre à l'Élysée et à la direction générale des médias et des industries culturelles (DGMIC).

Elles dénoncent dans un communiqué public "des distorsions de concurrence" qui auraient commencé en 2011. Cette année-là "il s’est opéré un profond changement dans la politique d’acquisition de programmes par le Groupe France Télévisions en Outre-Mer" assurent-elles.

Les deux camps :

Philippe Roussel, directeur général de TNTV

"Traditionnellement, nous les chaines privées achetions des programmes à TF1 et M6, alors que Polynésie Première prenait ses programmes (gratuitement) sur les chaines publiques. Ça a marché des années. Puis est arrivé l'achat des Experts, puis de la Coupe du Monde et maintenant de Miss France. Du coup on s'interroge. Que fait la télévision publique à acheter des programmes du privé, qui ont l'ADN du privé ?

Leur mission de service publique n'est pas adaptée à ces programmes... Pour nous il y a une vraie volonté de nuire, on ne sait pas d'où elle vient. Patrice Gélinet, du CSA, a soulevé cette question lors de sa visite. En face de nous il y a un mastodonte avec trois fois plus de budgets, plus d'audiences et qui nous coupe l'herbe sous le pied : dès qu'on cible un programme, Polynésie Première arrive et met 15 fois le prix, et on ne peut pas surenchérir.
Il y a une gabegie avec l'argent publique. Pour Miss France ils ont mis 15 fois plus d'argent sur la table que nous. Cet argent de l'état doit normalement servir à créer des programmes locaux.

Notre stratégie maintenant est de dire tout haut ce qu'il se passe. On fait des réunions entre chaînes privées, on a attenté une procédure en référé sur la Coupe du monde qui est en cours, on a une action sur le fonds déjà lancée, et le CSA qui a bien conscience qu'il y a un problème a convoqué tout le monde pour une table ronde. On a dit d'accord, mais France Télévision n'a toujours pas donné son accord. Nous sommes à la recherche d'une solution amiable, mais France Télévision continue dans son œuvre de destruction.

Nous n'allons pas nous laisser faire : le danger pour TNTV, c'est la disparition. Le fait est que nous devons faire une télévision proche des gens et de haute valeur ajoutée… Mais si on perd nos programmes les uns après les autres, on ne va plus pouvoir remplir nos grilles et il va se poser la question de notre utilité.
"

Jean-Philippe Pascal, directeur régional de Polynésie Première

Le directeur a commencé par expliquer que le groupe achète ses programmes pour 9 chaînes locales, ce qui explique la différence d'échelle dans les prix offerts. "Concernant l'achat de Miss France, il ne s'agit pas de concurrence déloyale. Nous avons simplement acheté les droits de diffusion de Miss France à TF1, en toute légalité. Personnellement je suis vraiment fier de pouvoir diffuser sur nos antennes ce programme. Ca s'inscrit dans le la logique des choses : Outremer Première a toujours assuré la captation des élections des miss locales, et donc diffuser l'élection nationale est une continuation logique, c'est l'aboutissement normal du suivi de leur parcours.

Pour la Coupe du Monde nous avons répondu à l'appel d'offres, c'est tout. Il y a des programmes, comme la F1, auxquels nous n'avons pas accès parce que nous n'avons pas le budget. Et n'oublions pas que nous avons la TNT, donc toutes les émissions de France Télévision (auxquelles Polynésie Première a accès gratuitement) sont déjà diffusées ici, donc d'avoir des programmes différents peut nous intéresser, puisque les droits sont ouverts.

Pour moi il n'y a pas de polémique, nous sommes dans un paysage où le pluralisme existe, il faut que la concurrence existe. Mais je trouve qu'il y a une cohérence dans notre démarche. Après qu'il y ait un dialogue qui s'instaure comme l'a demandé Gélinet, pourquoi pas. Pour les recours en justice, je suis confiant et on va se défendre en fonction de la décision.

Mais je ne peux pas répondre pour la direction de France Télévision. Dans mon périmètre de Polynésie Première, je ne peux que répondre que tout ce que nous faisons est légal et que ça s'inscrit dans la logique des choses. Je m'inscris en faux contre l'accusation de gaspiller de l'argent public. 85% de notre budget, c'est la masse salariale, et il reste 15% pour la production et les frais de fonctionnement. Nous avons un ratio de 30% de production locale et de 70% de production internationale, et il augmente chaque année depuis l'arrivée de la TNT, qualitativement et quantitativement.
"

Rédigé par Jacques Franc de Ferrière le Mercredi 19 Novembre 2014 à 16:46 | Lu 1658 fois