Le Sénat accorde à l'unanimité des droits de perquisition à l'Autorité polynésienne de la concurrence. Il créé également les voies de recours que pourront utiliser les entreprises pour contester ses décisions.
PAPEETE, le 10 avril 2018 - C'est presque la fin du long processus législatif qui a permis d'établir un droit de la concurrence en Polynésie et de créer l'autorité indépendante chargée de le faire respecter. Certains des pouvoirs de cette autorité dépendent de la compétence de l'État, et c'est donc le législateur métropolitain qui va mettre la touche finale à ce grand projet. Le Sénat a validé le texte, il doit encore passer devant l'Assemblée nationale.
Le sénat a adopté hier à l'unanimité "projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2017-157 du 9 février 2017 étendant et adaptant à la Polynésie française certaines dispositions du livre IV du code de Commerce relatives aux contrôles et aux sanctions en matière de concurrence". Pour comprendre cette information, il faut remonter à la création du droit de la concurrence polynésien en 2014. Une loi de Pays mettait en place ce nouveau droit et établissait une autorité indépendante chargée de le faire respecter, avec de larges pouvoirs d'enquête et de sanction.
En raison du partage des compétences entre le Pays et l'État, certains pouvoirs de l'Autorité polynésienne de la concurrence (APC) ne pouvaient lui être accordés que par Paris. Ça a été chose faite avec un décret gouvernemental de février 2017, publié en juillet. Mais comme ce décret touche au droit, il faut que les législateurs l'approuvent moins de 18 mois après sa publication. La procédure prévoit que ce texte est discuté uniquement en commission, puis voté tel quel par le Sénat et l'Assemblée nationale.
La commission des lois a donc pu proposer deux amendements. L'AFP les décrits ainsi : "À l’initiative de son rapporteur, Catherine Troendlé (LR), la commission des lois a adopté deux amendements, l'un apportant des précisions en matière de voies de recours et permettant la coopération entre l'APC et les autorités nationales compétentes, l'autre rétablissant l'obligation pour les membres des autorités administratives indépendantes créées par la Polynésie française et par la Nouvelle-Calédonie de transmettre des déclarations de situation patrimoniale et des déclarations d'intérêts à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique." Le texte final a suffisamment plu aux sénateurs de tous bords politiques pour qu'il soit adopté à l'unanimité. Il reste encore à passer devant l'Assemblée nationale, ce qui ne devrait être qu'une formalité.
LE POUVOIR DE CONDUIRE DES PERQUISITIONS ET LA CRÉATION DES VOIES DE RECOURS
Le sénat a adopté hier à l'unanimité "projet de loi ratifiant l'ordonnance n° 2017-157 du 9 février 2017 étendant et adaptant à la Polynésie française certaines dispositions du livre IV du code de Commerce relatives aux contrôles et aux sanctions en matière de concurrence". Pour comprendre cette information, il faut remonter à la création du droit de la concurrence polynésien en 2014. Une loi de Pays mettait en place ce nouveau droit et établissait une autorité indépendante chargée de le faire respecter, avec de larges pouvoirs d'enquête et de sanction.
En raison du partage des compétences entre le Pays et l'État, certains pouvoirs de l'Autorité polynésienne de la concurrence (APC) ne pouvaient lui être accordés que par Paris. Ça a été chose faite avec un décret gouvernemental de février 2017, publié en juillet. Mais comme ce décret touche au droit, il faut que les législateurs l'approuvent moins de 18 mois après sa publication. La procédure prévoit que ce texte est discuté uniquement en commission, puis voté tel quel par le Sénat et l'Assemblée nationale.
La commission des lois a donc pu proposer deux amendements. L'AFP les décrits ainsi : "À l’initiative de son rapporteur, Catherine Troendlé (LR), la commission des lois a adopté deux amendements, l'un apportant des précisions en matière de voies de recours et permettant la coopération entre l'APC et les autorités nationales compétentes, l'autre rétablissant l'obligation pour les membres des autorités administratives indépendantes créées par la Polynésie française et par la Nouvelle-Calédonie de transmettre des déclarations de situation patrimoniale et des déclarations d'intérêts à la Haute Autorité pour la transparence de la vie publique." Le texte final a suffisamment plu aux sénateurs de tous bords politiques pour qu'il soit adopté à l'unanimité. Il reste encore à passer devant l'Assemblée nationale, ce qui ne devrait être qu'une formalité.
LE POUVOIR DE CONDUIRE DES PERQUISITIONS ET LA CRÉATION DES VOIES DE RECOURS
Jacques Mérot, président de l'APC, nous détaille ce que prévoit le texte : "C'est un processus qui a débuté fin 2014, dans le cadre du droit de la concurrence adopté par la Polynésie. Certaines compétences relevaient de l'État et devaient donc être votées par le Parlement. Ces compétences concernent deux grands domaines. D'abord des pouvoirs d'investigations renforcés, c’est-à-dire en langage technique les opérations de visite et de saisie dans les entreprises, ou en langage normal, les perquisitions. Seul l'état pouvait nous les accorder puisque ça relève du domaine des libertés. Ce qui est prévu par le texte c'est que, comme en métropole, une autorité qui veut faire une visite ou une saisie doit demander une ordonnance au juge, qui autorise l'opération. Ensuite la visite ou la saisie ne peut être réalisée qu'en la présence d'officiers de police judiciaire. Le deuxième grand domaine couvert par cette loi concerne les voies de recours contre les décisions de l'autorité. L'APC agit comme une autorité judiciaire de premier niveau, donc il faut pouvoir faire un recours. Là il y aura deux voies possibles. Dans le cas des pratiques anti-concurrentielles, c'est-à-dire les abus de positions dominantes, ententes ou cartels, ce sera le juge judiciaire qui sera compétent, donc la cour d'appel de Paris. Les appels auront lieu en métropole car c'est un droit tellement spécifique que seule la cour d'appel de Paris a une chambre spécialisée dans la régulation économique. Le deuxième type de recours concernera les autorisations en cas de concentration ou de surfaces commerciales. Là, ce sera le juge administratif qui sera saisi pour les recours, à la cour administrative d'appel de Paris. Ce juge sera nommé par un décret, probablement en mai ou juin prochain. "
Le président de l'autorité se félicite de l'avancée de ce parcours législatif : "Ce sont des choses qui ont été demandés par la Polynésie pour accompagner son texte, afin que la Polynésie dispose d'un droit de la concurrence complet et que l'APC dispose des pouvoirs nécessaires à exercer sa mission de façon indépendante."
Par contre, il est intéressant de noter que les sénateurs ont signalé dans leur débat que les droits simples d'investigation de l'autorité devraient être inscrits dans la loi du pays. Il s'agit de ses pouvoirs "normaux", comme la possibilité de demander des documents à une entreprise. Les sénateurs ont noté que l'absence de description de ces pouvoirs dans notre droit de la concurrence était étonnante. Jacques Mérot nous rassure cependant : "Nous avons déjà ces pouvoirs en pratique, ils sont présumés puisque le texte prévoit que nous pouvons sanctionner les entreprises qui ne nous donnent pas ce qu'on leur demande. Mais effectivement ces pouvoirs ne sont pas décrits en détails, le livre 5 du droit de la concurrence est vide. De ne pas avoir ce texte a pu fragiliser notre action, dans la mesure où quand on dit aux entreprises que nous les contrôlons, elles aimeraient savoir précisément comment nous allons procéder et ce que nous pouvons exiger." Cette absence est à regretter car le droit de la concurrence polynésien, en particulier les outils mis à disposition de l'APC, vient d'être modifié lors de la dernière session de l'Assemblée de la Polynésie, sans corriger cet oubli.
Nous avons profité de l'occasion pour demander à Jacques Mérot ce qu'il répond aux critiques qui accusent l'autorité de ne pas avoir de résultats probants à montrer concernant la lutte contre la vie chère : "C'est une méconnaissance totale du sujet. Concernant la lutte contre la vie chère, ce n'est pas en 18 mois que l'APC va défaire 50 ans d'économie administrée. La baisse des prix est une résultante de l'action de l'autorité pour que la concurrence s'effectue de façon normale sur les marchés. Nous n'avons pas des manettes qui disent 'on baisse ces prix-là et ces prix-là', ça c'est l'économie administrée. Nous, nous cherchons à établir une concurrence qui fonctionne bien, et c'est ça qui baissera les prix. Pour comprendre cette idée, il suffit de regarder le cas extrême du monopole. Les études économiques ont toutes montré que ceux qui sont en situation de monopole n'ont aucune raison de faire des efforts et donc de baisser leurs marges, ce qui conduit à des prix élevés. C'est la concurrence qui fait baisser les prix. Un exemple grandeur nature a été l'arrivée de French Bee, on a bien vu que les autres compagnies aériennes se sont adaptées et ont baissé leurs prix. Mais ça prendra plus que 18 mois pour être visible."
Le président de l'autorité se félicite de l'avancée de ce parcours législatif : "Ce sont des choses qui ont été demandés par la Polynésie pour accompagner son texte, afin que la Polynésie dispose d'un droit de la concurrence complet et que l'APC dispose des pouvoirs nécessaires à exercer sa mission de façon indépendante."
Par contre, il est intéressant de noter que les sénateurs ont signalé dans leur débat que les droits simples d'investigation de l'autorité devraient être inscrits dans la loi du pays. Il s'agit de ses pouvoirs "normaux", comme la possibilité de demander des documents à une entreprise. Les sénateurs ont noté que l'absence de description de ces pouvoirs dans notre droit de la concurrence était étonnante. Jacques Mérot nous rassure cependant : "Nous avons déjà ces pouvoirs en pratique, ils sont présumés puisque le texte prévoit que nous pouvons sanctionner les entreprises qui ne nous donnent pas ce qu'on leur demande. Mais effectivement ces pouvoirs ne sont pas décrits en détails, le livre 5 du droit de la concurrence est vide. De ne pas avoir ce texte a pu fragiliser notre action, dans la mesure où quand on dit aux entreprises que nous les contrôlons, elles aimeraient savoir précisément comment nous allons procéder et ce que nous pouvons exiger." Cette absence est à regretter car le droit de la concurrence polynésien, en particulier les outils mis à disposition de l'APC, vient d'être modifié lors de la dernière session de l'Assemblée de la Polynésie, sans corriger cet oubli.
Nous avons profité de l'occasion pour demander à Jacques Mérot ce qu'il répond aux critiques qui accusent l'autorité de ne pas avoir de résultats probants à montrer concernant la lutte contre la vie chère : "C'est une méconnaissance totale du sujet. Concernant la lutte contre la vie chère, ce n'est pas en 18 mois que l'APC va défaire 50 ans d'économie administrée. La baisse des prix est une résultante de l'action de l'autorité pour que la concurrence s'effectue de façon normale sur les marchés. Nous n'avons pas des manettes qui disent 'on baisse ces prix-là et ces prix-là', ça c'est l'économie administrée. Nous, nous cherchons à établir une concurrence qui fonctionne bien, et c'est ça qui baissera les prix. Pour comprendre cette idée, il suffit de regarder le cas extrême du monopole. Les études économiques ont toutes montré que ceux qui sont en situation de monopole n'ont aucune raison de faire des efforts et donc de baisser leurs marges, ce qui conduit à des prix élevés. C'est la concurrence qui fait baisser les prix. Un exemple grandeur nature a été l'arrivée de French Bee, on a bien vu que les autres compagnies aériennes se sont adaptées et ont baissé leurs prix. Mais ça prendra plus que 18 mois pour être visible."