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Les députés polynésiens dénoncent "un passage en force" sur la réforme des retraites


Tahiti, le 16 février 2023 - À la tête de la délégation aux Outre-mer de l'Assemblée nationale, le député du fenua (GDR) Moetai Brotherson mène la fronde des élus ultramarins contre la réforme des retraites. Un combat difficile à mener tant les débats sont englués dans les joutes entre des oppositions déterminées à utiliser toutes les armes à leur disposition et le gouvernement, qui a limité les débats et entend bien passer en force.
 
"Rappel de ce qu'est un rappel au règlement", "feuille de salade", "susucre", "cocu content", "playmobil", "assassin", etc… Ces jours-ci la créativité des députés en matière d'invectives et d'incidents de séance ne semble connaître aucune limite. Première conséquence : les débats n'avancent pas, en trois jours et trois soirées de travail, les députés n'ont réussi à s'exprimer en votant que sur deux articles du projet de loi de réforme des retraites ; il en compte vingt.
 
Au milieu de ce que les députés eux-mêmes décrivent comme "un cirque", il est bien difficile de faire entendre la voix de la Polynésie française et des Outre-mer en général. Pourtant, "nous avons une espérance de vie qui est de six ans inférieure à celle de l'Hexagone, nous avons des conditions de pauvreté, de précarité de l'emploi, d'emploi des femmes, la problématique du chlordécone, des victimes des essais nucléaires, qui sont spécifiques aux Outre-mer et qui ne sont pas du tout intégrées dans la réflexion et dans l'étude d'impact sur cette réforme des retraites", dénonce Moetai Brotherson, député (GDR) de Polynésie française et président de la délégation aux Outre-mer.
Pour l'instant, seuls les fonctionnaires d'État, les douaniers, les professeurs, les professions médicales, qui dépendent du système de retraites de la France hexagonale, eux, sont directement concernés pas la réforme des retraites. Reprenant un argument déjà développé localement, Moetai Brotherson s'est encore dit inquiet à Paris inquiet pour "tous les autres citoyens de Polynésie française parce que l'exécutif local a bien souvent tendance à copier-coller ce type de réformes".
 
Amendements contre 47.1
 
À cause de l'embouteillage créé par les milliers d'amendements déposés par les députés de l'opposition de gauche, l'examen de la réforme des retraites n'a quasiment aucune chance d'arriver à son terme. "Nous n'avons déposé aucun amendement sur la forme, que des amendements sur le fond", justifie Perceval Gaillard, député (LFI) de La Réunion. "C'est le gouvernement qui a créé les conditions de ce passage en force parce que les députés de la majorité refusent le débat !"
 
Il est vrai que le gouvernement de la Première ministre Élisabeth Borne a activé encore un article de la Constitution, le 47.1, qui permet de limiter dans le temps l'examen du texte. Tout doit être examiné avant le vendredi 17 février, à minuit. Ensuite, le texte ira au Sénat mais dans sa version initiale. Elle ne comporte aucune mention spécifique en ce qui concerne la Polynésie ou l'Outre-mer. Des mots du porte-parole du gouvernement central, Olivier Véran, c'est justement "le débat parlementaire qui [permettrait] des modifications et des adaptations". On en est loin.
 

Rédigé par Julien Sartre le Jeudi 16 Février 2023 à 17:45 | Lu 1302 fois