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Les Capésiens envisagent de saisir la justice


Tahiti le 07 août 2024 – L’État et le Pays se renvoient la balle concernant l’affectation en métropole des huit fonctionnaires stagiaires de l’Éducation nationale. Le vice-rectorat rappelle que les affectations sont faites en concertation avec le Pays et que la “phase de négociation […] a peut-être été mal réalisée cette année”. Les fonctionnaires stagiaires envisagent de saisir la justice en référé.
 
L’affectation en métropole des huit Polynésiens fonctionnaires stagiaires de l’Éducation nationale fait tellement de remous que le ministre de l’éducation Ronny Teriipaia leur a annoncé, ce mercredi, que le président du Pays, Moetai Brotherson, “a saisi” le Président Macron “pour régler le plus rapidement possible la situation”. Le ministre précise de son côté avoir “tout fait” avec l’aide de la Direction générale de l’éducation et des enseignements (DGEE) pour leur permettre “de rester au pays”. En vain. Il mise désormais sur l’intervention du président du Pays.

“L’État refuse de les affecter ici”

Le ministre de l’éducation Ronny Teriipaia explique qu’au début du mois de juillet “on nous a dit qu’il y avait de la place pour eux [localement]. Et fin juillet, il y a eu des changements, il fallait les envoyer en métropole. Je n’ai pas compris pourquoi car je sais qu’il y a des postes ici”.
 
Il regrette qu’aucune explication n’ait été donnée. “La Direction des ressources humaines et l’État refusent qu’on les affecte ici.” Le ministre ne compte pas en rester là : l’État “essaie de nous piquer nos lauréats pour aller combler cette carence. Il est hors de question que nos lauréats de concours partent exercer ailleurs. On aura quoi nous ? De la mauvaise qualité ? Il est hors de question”, peste-t-il. Selon lui, le pays ne dispose pas du “vivier” nécessaire en contractuels pour faire face aux besoins “dans certaines spécialités” : “L’État n’a affecté personne sur ces postes. On va mettre qui devant les enfants à la rentrée ?”
 
En représailles, Ronny Teriipaia annonce ne plus vouloir “renouveler les demandes de second séjour” des enseignants non-Polynésiens affectés sur le territoire. Il explique que le premier séjour dure quatre ans, il en est de même pour le second séjour : “Ce qui se passe c’est qu’au bout de la sixième année d’exercice, ces expatriés peuvent demander un CIMM ici et du coup ils bloquent les postes et nos enfants sont obligés d’aller exercer ailleurs. Ce n’est pas acceptable.”

Au niveau national “le regard est différent”

De son côté le vice-recteur, Thierry Terret, n’a eu de cesse de répéter que les concours sont nationaux. Il reconnait que “du point de vue local on peut considérer qu’il y a des besoins et que ces lauréats sont légitimes à être affectés en Polynésie”. Mais, comme il le précise aussi, au niveau national “le regard est différent […]. Il faut répartir la ressource […]. Il y avait des besoins bien supérieurs proportionnellement ailleurs qu’en Polynésie”. Le haut-fonctionnaire est bien conscient que cela peut paraitre “injuste du point de vue local”.
 
Mais Thierry Terret le martèle : les décisions sont prises au niveau national. “On reçoit la liste des lauréats affectés en Polynésie et après avec le Pays on procède à leur affectation sur tel ou tel poste […]. Nous avons accepté, début juillet, la totalité des propositions de la DGEE.”
 
Il comprend que le ministre défende “les principes de répartition de la ressource sur le territoire”, mais cela est hors de sa compétence rappelle le vice-recteur. Les mises à disposition ont été déterminées “il y a quelques semaines et les lieux d’affectation ont été également arrêtés au moment où cela s’est fait. Et il n’y avait pas de lieu pour les huit lauréats en question”.
 
Au regard d’un niveau de réussite “exponentiel” aux concours cette année, le vice recteur estime qu’il faudra dorénavant “mieux anticiper le nombre de lauréats” car “plus c’est fait en amont et moins cela pose de problèmes”. De son point de vue, la phase de négociations entre les services du vice-rectorat, la DGRH à Paris et le Pays visant à établir “les possibilités d’accueil en Polynésie et les besoins du territoire […] a peut-être été mal réalisée cette année”.
 
Mais il le rappelle : tous les fonctionnaires stagiaires savent aussi “dès le début d’année qu’ils ne seront pas nécessairement affectés en Polynésie”.
 
À l’issue de la réunion organisée mercredi après-midi à la présidence, avec Moetai Brotherson et le ministre de l’Éducation Ronny Teriipaia, le père d’une fonctionnaire stagiaire, Faana Taputu, était rassuré. “On était contents d’entendre que le ministre est vraiment derrière ces jeunes-là.” Des propositions émanant du Pays ont d’ailleurs été faites “soit partir soit faire un recours […] : Tous ces jeunes ont décidé de faire un recours”.

Rédigé par Vaite Urarii Pambrun le Mercredi 7 Août 2024 à 21:24 | Lu 3847 fois