Tahiti Infos

Le fret maritime n'échappera pas à la hausse des prix


Tahiti, le 21 août 2022 - La commission d'examen des tarifs maritimes interinsulaires doit se réunir cette semaine pour examiner une réactualisation du tarif du fret pour les îles. Avec la hausse du carburant, l'indice des prix du secteur a augmenté de +8%. Les armateurs demandent une révision de leurs tarifs pour survivre économiquement, tandis que le gouvernement doit arbitrer en limitant la hausse du coût de la vie dans les îles…
 
L'inflation n'a visiblement pas fini de se répercuter dans les secteurs économiques du fenua. Cette semaine, c'est au tour des armateurs de se réorganiser face à la hausse des prix et notamment des coûts du carburant. Dans un secteur extrêmement réglementé, les licences de transporteurs interinsulaires imposent un nombre de rotations minimums aux navires dans les îles, le prix d'achat du carburant des bateaux est fixé par le Pays et le prix de vente du fret maritime est également réglementé par le gouvernement… Chaque année, une commission d'examen des tarifs maritimes inter-insulaires (CETMI) se réunit pour examiner l'indice des prix du secteur et ré-ajuster les tarifs du fret si cet indice augmente de plus de 2%. La dernière fois, c'était en 2018.
 
Au moins +8% demandé
 
“Nous avons une réunion annuelle de la CETMI en avril-mai. Cette année, on a constaté une augmentation de moins de 2%. Ce qui fait qu'on n'a pas augmenté les tarifs”, explique le président de la confédération des armateurs, Philippe Wong. “Par contre, on a convenu d'une clause de revoyure en fin août de cette année pour, à nouveau, constater le résultat de la formule en fonction de la hausse du gazole.” Une hausse du gazole intervenue également au 1er juillet dernier pour les armateurs : +20 Fcfp pour passer à 103 Fcfp/l au prix de détail. Augmentation du gazole à laquelle il faut ajouter celle de +10 Fcfp en début d'année. Pour ce qui est des autres charges, celles du personnel et des coûts de maintenance ont évidemment subi la même “inflation importée”, même si le fret maritime n'a pas été affecté par les 1% de TVA sociale. Au final, le constat sur l'indice des tarifs du fret maritime interinsulaire est sans appel : “Logiquement, on devrait avoir une augmentation d'au moins 8%”, estime Philippe Wong.
 
Parmi ces charges, la question de la hausse des carburants semble cristalliser les inquiétudes des armateurs. Certains professionnels disent ne pas comprendre les différences de traitement entre les secteurs : +30 Fcfp/l pour le carburant destiné à la desserte Tahiti-Moorea, +20 Fcfp pour celui des îles, +9 Fcfp pour celui des pêcheurs… “C'est le fait du prince”, tance un professionnel. Philippe Wong ne commente pas directement ces critiques, mais insiste sur la charge que représente la hausse du carburant sur l'activité de la quinzaine d'armateurs de la confédération : “57 millions de Fcfp par mois depuis juillet. Sur une année pleine, c'est plus de 700 millions pour l'ensemble du secteur. Pour une société normale, qui avait un bénéfice, elle se retrouve automatiquement en perte.” Et le président de la confédération d'affirmer que certains des petits armateurs subissent déjà les effets de cet étau économique difficile : “Sans parler du Covid qui a mis à genou plusieurs sociétés, spécifiquement celles qui transportent des passagers, on a petites sociétés basées dans les îles qui n'y arrivent plus. Aux îles Sous-le-Vent par exemple, on a une petite société qui exploite quatre navires et qui vient d'être placée en redressement judiciaire.”
 
L'inflation appelle l'inflation
 
La réunion de la CETMI est prévue ce jeudi à la Direction des affaires maritime. Son avis ne sera que consultatif pour le gouvernement qui décidera, in fine, quel sera le montant de la réactualisation des tarifs du fret maritime. Mais le gouvernement a un autre paramètre que celui de l'économie des armateurs à prendre en compte : la protection du coût de la vie dans les îles. Le président du Pays, Édouard Fritch, l'a confirmé vendredi à Tahiti Infos en marge du séminaire du Tapura à Matatia. Pas question de répercuter directement toutes ces augmentations de prix sur le consommateur final. Un principe certainement d'autant plus important en période électorale…
 
L'équation sera donc difficile à résoudre. D'autant que les armateurs craignent également qu'une nouvelle hausse des carburants, pour rattraper le niveau des cours internationaux, ne perturbe encore l'équilibre économique de leur secteur. “C'est ce qui est problématique. Cette semaine, on va se voir et discuter d'une augmentation. Mais si deux mois après ils ré-augmentent, on va devoir courir après les augmentations”, prévient Philippe Wong.
 


Rédigé par Antoine Samoyeau le Dimanche 21 Août 2022 à 13:55 | Lu 1879 fois