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Le conjoint violent repart en prison


Tahiti, le 4 décembre 2023 - C'est une énième affaire de violences sur fond de misérabilisme social et de problèmes d'alcool qui a été jugée ce lundi après-midi au tribunal de Papeete. Arrivé menotté, le prévenu est reparti en prison pour deux ans, même si sa compagne, la victime présente à l'audience, ne le “voulait pas”.
 
Depuis le box des accusés, le prévenu, tee-shirt noir et bien rasé, lance des regards à sa compagne assise dans la salle du tribunal. Compagne qui est aussi la victime. Comme souvent. On peut voir leurs lèvres bouger pour communiquer, ils échangent des sourires, pendant qu'une première affaire est audiencée.
 
Vient donc le tour du prévenu : un jeune trentenaire originaire de Nuku Hiva qui n'en est pas à sa première fois. Il est d'ailleurs arrivé escorté par les gendarmes et menotté puisqu'il est en détention provisoire depuis le 30 octobre dernier. Pourquoi ? Pour avoir, encore une fois, été violent avec sa conjointe. Des violences répétées avec pas moins de cinq épisodes en moins d'un mois, le dernier lui ayant donc valu un mandat de dépôt.
 
À la barre, il reconnaît les faits et explique que ce jour-là, il a tiré les cheveux de sa compagne assez fort et qu'il l'a frappée sur le chantier de La Mission sur lequel il travaillait. C'était le 22 octobre. Résultat, “j'ai été viré du chantier” tandis que celle avec qui il est en couple depuis le mois de mars se retrouve avec une lésion à l'œil. Ensuite, rebelote parce qu'elle “n'a pas voulu aller acheter un stick”.
 
“J'étais énervé et content de la retrouver en même temps”
 
Trois jours plus tard, le 25 octobre, le service de sécurité du CHPF est obligé d'intervenir alors qu'elle est en consultation au service d'ophtalmologie. “Je l'ai prise par la tête parce qu'elle jouait à son téléphone, elle était agitée et commençait à s'éloigner de moi”, raconte-t-il.
 
Il ne faudra attendre encore une fois que quelques jours pour que cela recommence. Au parc Bougainville, cette fois où il la retrouve après l'avoir cherchée pendant trois jours, et où il la tire par les cheveux – encore – pour qu'elle le suive. “J'étais énervé et content de la retrouver en même temps parce qu'on vivait dans la rue”. “C'est pas évident d'aller mendier quelque chose”, poursuit-il expliquant n'avoir “pas eu une vie facile”.
 
“Je veux pas que mon tāne retourne en prison”
 
C'est alors que la présidente du tribunal appelle sa compagne-victime à la barre. “Je suis venue ici aujourd'hui pour retirer ma plainte”, commence-t-elle. “Parce que je ne veux pas.”Vous ne voulez pas quoi ?”, lui demande la présidente. “Parce que vous savez que cela ne changera rien à la décision du tribunal”, ajoute-t-elle. “Je veux pas que mon tāne, il retourne en prison”, lui répond la jeune femme qui s'enferme ensuite dans un mutisme quand la présidente du tribunal tente de lui faire comprendre que toute forme de violence est inacceptable. D'autant qu'elle est enceinte de six mois. “Vous n'avez pas peur pour votre bébé ?”Non”, lâche simplement la jeune femme qui ne dira pas un mot de plus avant de retourner s'asseoir. Elle ne se constituera pas partie civile.
 
Pour le procureur, le cas du prévenu est “irrécupérable”. Rappelant qu'il a déjà été jugé quatre fois pour des faits similaires, il souligne que les faits sont avérés avec des circonstances aggravantes (elle est enceinte) et qu'il ne présente pas de troubles psychiatriques. “La seule chose qu'il peut comprendre, c'est la sanction.” L'avocat du prévenu temporise en concédant qu'une peine ferme est nécessaire mais avec une “semi-liberté pour qu'il puisse travailler” et “sortir de la précarité”. Après en avoir délibéré, le tribunal a condamné le prévenu à deux ans de prison. Il a été reconduit à Nuutania où il a déjà effectué un mois et demi de détention provisoire qui sera donc déduit.

Rédigé par Stéphanie Delorme le Lundi 4 Décembre 2023 à 17:11 | Lu 1871 fois