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Le confinement génère une vague d’annulations sur le secteur touristique


Tahiti, le 2 novembre 2020 - Après l’annonce d’un couvre-feu en Polynésie suivi du confinement sur l’hexagone, l’heure est à l’évaluation des dégâts. Si la destination est bien ouverte, une vague d’annulations des tours opérateurs français atteint le fenua, résultat en partie d’une communication confuse sur les sites institutionnels. Un fâcheux ricochet pour les professionnels du tourisme alors que la France arrive depuis peu en tête des marchés émetteurs.
 
Si la Polynésie échappe encore au confinement - « ultime » recours contre l’épidémie - l’annonce du président de la République mercredi porte un énième coup de massue au secteur touristique déjà sévèrement fragilisé. « Les annulations tombent, on attend de voir quand ça va se stabiliser et sur quelle période » indique Thierry Brovelli, co-président du Conseil des professionnels de l'hôtellerie.
 
Et c’est d’un marché identifié vendredi comme « prioritaire » par l’observatoire du tourisme que les mauvaises nouvelles arrivent. C’est-à-dire de l’hexagone, principal pourvoyeur de passagers depuis la réouverture des frontières avec ses 15 000 visiteurs (54%), devant les Etats-Unis et ses 10 000 passagers (36%). Un « renforcement des effectifs métropolitains » que l’ISPF attribue à la « résilience plus importante du tourisme affinitaire ».

Or, les tour-opérateurs français ont annoncé vendredi la suspension de tous les départs jusqu'au 30 novembre en raison des nouvelles restrictions de déplacement liées au Covid-19. Résultat : « Les réservations émanant du marché français depuis vendredi dernier ont subit une vague importante d’annulations » déplore Guillaume Epinette, directeur régional du groupe Intercontinental Tahiti.

"L’impératif de reprise économique" comme motif de déplacement

Et pourtant « la destination est ouverte ! » assènent les professionnels du secteur. C’est que, vue de l’hexagone et de la cible en question, c’est beaucoup moins évident. Rien concernant les déplacements vers la Polynésie sur le site du ministère de l’Outre-mer. Sur celui de France diplomatie par contre si, mais il indique clairement qu’on ne peut pas s’y rendre. « Vous ne pourrez pas voyager vers ou depuis la Guyane, Mayotte, la Polynésie française, la Nouvelle-Calédonie ou les îles Wallis-et-Futuna sauf si vous pouvez justifier d’un motif familial ou professionnel impératif » peut-on lire sur les mesures spécifiques aux Outre-mer.

Si le décret du 29 octobre (*) interdit effectivement à l’article 10 les déplacements « sauf s'ils sont fondés sur un motif impérieux d'ordre personnel ou familial, un motif de santé relevant de l'urgence ou un motif professionnel ne pouvant être différé » il prévoit également que « pour les vols au départ ou à destination de la Polynésie française et de la Nouvelle-Calédonie, en fonction des circonstances locales, le représentant de l'Etat est habilité à compléter la liste des motifs de nature à justifier les déplacements mentionnés. »

Ce que Dominique Sorain, le haut-commissaire, a fait dans son arrêté du 13 août précisant à l’article 9 que « sont également de nature à justifier un déplacement au départ et à destination de la Polynésie française les activités en lien avec l’impératif de reprise économique du territoire, dont notamment l’investissement, le tourisme ou les manifestations culturelles et sportives. » Article repris tel quel dans son arrêté d’application du 29 octobre. Mais encore faut-il le savoir. « Beaucoup de Français ne savent pas s’ils peuvent venir et beaucoup de questions sont posées aux tours opérateurs » abonde Michel Monvoisin, p-dg d’ATN.

« Seuls Tahiti et Moorea sont concernés par le couvre-feu »

L’annonce du Premier ministre d’une extension du couvre-feu à la « Polynésie française » le 24 octobre, sans préciser que seul Tahiti et Moorea étaient visés, n’avait déjà pas arrangé les affaires du secteur sur l'hexagone. Un « couac de communication » qui avait mis un premier coup de frein au remplissage des appareils. « C’est sûr que ça ne nous aide pas du tout. Beaucoup de voyageurs ne savent pas que seuls Tahiti et Moorea sont concernés par le couvre-feu » s’impatiente le p-dg. A ce jour, ils peuvent donc non seulement venir, mais ils peuvent aussi s’envoler dans les îles pour échapper à cette restriction. « Pour nous le message est clair. Le problème c’est que l’information est incomplète. »

Avenue Pouvana’a O’opa, on reconnaît que la communication mérite une « clarification ».  Des discussions entre le Pays, les services de l’Etat et les tours opérateurs sont en cours pour rectifier le tir, « les choses n’étant pas claires concernant la Polynésie sur les sites institutionnels nationaux » commente Nicole Bouteau, ministre du Tourisme, occupée à évaluer les dégâts. « A ce stade nous avons beaucoup d’annulation que nous sommes en train de quantifier ».

Du côté du grand public, des interrogations subsistent. Notamment sur la stratégie touristique qui se heurte aux appels des pouvoirs publics à « différer » les déplacements dans les îles. « Nous avons mis en place des protocoles d’entrées qui permettent de tracer et d’identifier les cas Covid qui se déclarent pendant leur séjour, et de les isoler à leur frais » argumente la ministre. « Une soixante de cas ont été détectés sur un total de 30 000 entrants depuis le 15 juillet. » Preuve pour les pouvoirs public que le dispositif fonctionne et que « les contaminations n’arrivent pas de là », comme l'a encore souligné le haut-commissaire vendredi.
 
*décret prescrivant les mesures générales nécessaires pour faire face à l'épidémie de covid-19 dans le cadre de l'état d'urgence sanitaire.
 


Rédigé par Esther Cunéo le Lundi 2 Novembre 2020 à 19:08 | Lu 9216 fois