Kinshasa, RD Congo | AFP | mardi 30/05/2017 ) Perché sur une colline d'un faubourg de Kinshasa, capitale de la République démocratique du Congo, un centre de recherche nucléaire se meurt. Son réacteur n'a pas servi depuis des lustres mais le lieu reste jalousement gardé en raison de la dangerosité du site, désormais menacé par l'érosion des sols.
Ce Centre régional de recherche nucléaire de Kinshasa (CREN-K) est né en 1959, à l'époque de la colonisation belge, et un an avant l'indépendance du pays. C'était alors le premier réacteur nucléaire d'Afrique subsaharienne.
En 2007, une équipe de l'AFP s'y était rendue alors que des barres d'uranium avaient été volées et que la communauté internationale s'inquiétait d'un possible détournement à des fins militaires.
Aujourd'hui, c'est l'érosion de la colline qui inquiète les autorités universitaires: depuis plusieurs années, elle gagne du terrain et la butte sur laquelle est construite la petite centrale de recherche se lézarde. Le ruissellement des eaux des pluies tropicales abîme le sol et laisse derrière lui des sillons qui menacent la clôture du CREN-K.
Le réacteur actuel -- un TRICO II d'un mégawatt, en vogue pour la recherche dans les années 1970-- a été installé en mars 1973 mais ne fonctionne plus depuis 1994, faute de moyens.
Il fut à l'époque l'une des victimes de l'effondrement de l'économie nationale saignée par la dictature de Mobutu.
Le pays a ensuite connu deux guerres qui ont achevé de le réduire en miettes, entre 1996 et 2003, et le réacteur n'a jamais repris son activité de recherche.
Face à l'érosion, le directeur du CREN-K, le Pr Vincent Lukanda, qui est également Commissaire général à l'énergie atomique de la RDC, se veut rassurant. Il explique que des dispositions ont été prises pour parer à toute éventualité: grâce à un "collecteur d'eau" censé drainer les eaux de pluies sans dommage pour la butte, le mont Amba.
Le journaliste de l'AFP ne sera pas autorisé à visiter le réacteur et le dépôt de stockage des déchets fissiles, il ne verra que les autres bureaux et locaux. Pas question d'en savoir plus sur la quantité d'uranium que le centre recèle ou sur les déchets fissiles hérités du premier réacteur et stockés dans l'enceinte. "Secret d'État", lance le Pr Lukanda, en concédant simplement que "c'est très dangereux".
Pas question non plus de s'entretenir avec deux inspecteurs de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) venus à Kinshasa animer un atelier de quatre jours sur la "protection physique des installations nucléaires du CREN-K". "Secret professionnel", affirme le gardien du temple nucléaire.
A Livulu, quartier populaire au pied de l'université, la population préoccupée par sa survie immédiate a d'autres soucis en tête que la dangerosité du centre nucléaire et l'érosion de la colline qui l'héberge.
"Le cuivre ne met pas en danger. Si l'uranium est aussi un minerai, il ne mettra personne en danger", assène un vendeur de cigarettes.
Quant aux chercheurs employés sur place, plusieurs se plaignent d'un manque criant de moyens pour le CREN-K, mais au moins ont-ils la satisfaction d'être payés --peu, mais dans les délais-- ce qui apparaît presque comme un privilège vu la misère dans laquelle se débattent neuf Congolais sur dix...
En 2004, alors que le pays sorti des guerres regardait de nouveau l'avenir avec espoir, le directeur de l'époque tablait sur l'arrivée imminente au CREN-K d'un nouveau tableau de contrôle censé permettre, enfin, de redémarrer l'engin. Il n'en fut rien.
Treize ans plus tard, son successeur le Pr. Vincent Lukanda veut encore y croire, alors que le petit réacteur reste désespérément à l'arrêt.
Il est "en très bon état", assure-t-il à l'AFP. "Nous attendons du gouvernement un financement de l'ordre de 3 millions de dollars américains" devant permettre l'installation d'un "pupitre [de commande] numérique", dit-il.
Sur le papier, le CREN-K mène diverses activités de recherche à visées médicales, biologiques, génétiques ou industrielles.
Et dans ses locaux peints en jaune et mieux entretenus que l'Université de Kinshasa dont le campus délabré accueillant 30.000 étudiants jouxte le CREN-K, le Pr Lukanda s'enflamme à l'idée que son pays --doté d'un immense potentiel hydroélectrique non exploité-- puisse un jour produire du courant avec l'énergie nucléaire.
"Les outils de départ, nous les avons!" affirme-t-il.
Mais il faut que "le pays s'engage politiquement" dans cette voie et sollicite l'aide de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), reconnaît-il.
L'heure ne semble toutefois pas à un redémarrage prochain de la petite centrale nucléaire congolaise.
L'argent manque et l'AIEA explique qu'elle "aide les autorités congolaises à mettre sur pied un plan de démantèlement".
Ce qui toutefois ne signifie pas que l'idée d'un démantèlement soit actée: l'AIEA recommande l'élaboration de tels plans "pour tous les réacteurs de recherche installés (dans le monde), quelle que soit la date à laquelle il doivent être démantelés", précise le porte-parole de l'organisation, basée à Vienne.
Le Pr Lukanda, lui, est catégorique: le gouvernement "n'entend pas démanteler" le CREN-K. Au contraire, il veut la "moderniser la centrale", assure-t-il, plus de 25 ans après la mise à l'arrêt du réacteur.
Ce Centre régional de recherche nucléaire de Kinshasa (CREN-K) est né en 1959, à l'époque de la colonisation belge, et un an avant l'indépendance du pays. C'était alors le premier réacteur nucléaire d'Afrique subsaharienne.
En 2007, une équipe de l'AFP s'y était rendue alors que des barres d'uranium avaient été volées et que la communauté internationale s'inquiétait d'un possible détournement à des fins militaires.
Aujourd'hui, c'est l'érosion de la colline qui inquiète les autorités universitaires: depuis plusieurs années, elle gagne du terrain et la butte sur laquelle est construite la petite centrale de recherche se lézarde. Le ruissellement des eaux des pluies tropicales abîme le sol et laisse derrière lui des sillons qui menacent la clôture du CREN-K.
Le réacteur actuel -- un TRICO II d'un mégawatt, en vogue pour la recherche dans les années 1970-- a été installé en mars 1973 mais ne fonctionne plus depuis 1994, faute de moyens.
Il fut à l'époque l'une des victimes de l'effondrement de l'économie nationale saignée par la dictature de Mobutu.
Le pays a ensuite connu deux guerres qui ont achevé de le réduire en miettes, entre 1996 et 2003, et le réacteur n'a jamais repris son activité de recherche.
- Collecteur d'eau -
Face à l'érosion, le directeur du CREN-K, le Pr Vincent Lukanda, qui est également Commissaire général à l'énergie atomique de la RDC, se veut rassurant. Il explique que des dispositions ont été prises pour parer à toute éventualité: grâce à un "collecteur d'eau" censé drainer les eaux de pluies sans dommage pour la butte, le mont Amba.
Le journaliste de l'AFP ne sera pas autorisé à visiter le réacteur et le dépôt de stockage des déchets fissiles, il ne verra que les autres bureaux et locaux. Pas question d'en savoir plus sur la quantité d'uranium que le centre recèle ou sur les déchets fissiles hérités du premier réacteur et stockés dans l'enceinte. "Secret d'État", lance le Pr Lukanda, en concédant simplement que "c'est très dangereux".
Pas question non plus de s'entretenir avec deux inspecteurs de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA) venus à Kinshasa animer un atelier de quatre jours sur la "protection physique des installations nucléaires du CREN-K". "Secret professionnel", affirme le gardien du temple nucléaire.
A Livulu, quartier populaire au pied de l'université, la population préoccupée par sa survie immédiate a d'autres soucis en tête que la dangerosité du centre nucléaire et l'érosion de la colline qui l'héberge.
"Le cuivre ne met pas en danger. Si l'uranium est aussi un minerai, il ne mettra personne en danger", assène un vendeur de cigarettes.
- 'En très bon état' -
Quant aux chercheurs employés sur place, plusieurs se plaignent d'un manque criant de moyens pour le CREN-K, mais au moins ont-ils la satisfaction d'être payés --peu, mais dans les délais-- ce qui apparaît presque comme un privilège vu la misère dans laquelle se débattent neuf Congolais sur dix...
En 2004, alors que le pays sorti des guerres regardait de nouveau l'avenir avec espoir, le directeur de l'époque tablait sur l'arrivée imminente au CREN-K d'un nouveau tableau de contrôle censé permettre, enfin, de redémarrer l'engin. Il n'en fut rien.
Treize ans plus tard, son successeur le Pr. Vincent Lukanda veut encore y croire, alors que le petit réacteur reste désespérément à l'arrêt.
Il est "en très bon état", assure-t-il à l'AFP. "Nous attendons du gouvernement un financement de l'ordre de 3 millions de dollars américains" devant permettre l'installation d'un "pupitre [de commande] numérique", dit-il.
Sur le papier, le CREN-K mène diverses activités de recherche à visées médicales, biologiques, génétiques ou industrielles.
- Plan de démantèlement ? -
Et dans ses locaux peints en jaune et mieux entretenus que l'Université de Kinshasa dont le campus délabré accueillant 30.000 étudiants jouxte le CREN-K, le Pr Lukanda s'enflamme à l'idée que son pays --doté d'un immense potentiel hydroélectrique non exploité-- puisse un jour produire du courant avec l'énergie nucléaire.
"Les outils de départ, nous les avons!" affirme-t-il.
Mais il faut que "le pays s'engage politiquement" dans cette voie et sollicite l'aide de l'Agence internationale de l'énergie atomique (AIEA), reconnaît-il.
L'heure ne semble toutefois pas à un redémarrage prochain de la petite centrale nucléaire congolaise.
L'argent manque et l'AIEA explique qu'elle "aide les autorités congolaises à mettre sur pied un plan de démantèlement".
Ce qui toutefois ne signifie pas que l'idée d'un démantèlement soit actée: l'AIEA recommande l'élaboration de tels plans "pour tous les réacteurs de recherche installés (dans le monde), quelle que soit la date à laquelle il doivent être démantelés", précise le porte-parole de l'organisation, basée à Vienne.
Le Pr Lukanda, lui, est catégorique: le gouvernement "n'entend pas démanteler" le CREN-K. Au contraire, il veut la "moderniser la centrale", assure-t-il, plus de 25 ans après la mise à l'arrêt du réacteur.