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Le caporal Robert Lequerré : Tahitien mort pour la France en 1940


Le caporal Robert Lequerré
Le caporal Robert Lequerré
PAPEETE, le 11 décembre 2014 - Retrouver leur ancêtre et le rapatrier à Tahiti fut un travail de longue haleine pour les descendants du caporal Lequerré. Ce jeune Tahitien, engagé dans l'armée française juste avant le début de la Seconde guerre mondiale, est mort à 23 ans en tentant de défendre la Moselle de l'invasion allemande. Il sera enterré samedi, selon son vœu, au cimetière de l'Uranie.


Il aura fallu 5 ans de recherches et de démarches administratives à Gérard Doucet et Yannick Lowgreen pour retrouver leur ancêtre et arriver à ramener son corps sur son île natale. Depuis 1939 et son départ pour la France, engagé dans le Régiment des Mitrailleurs d’Infanterie Coloniale Fusiller Voltigeur 3ème Cie, les trois filles, trois sœurs, deux frères et parents de Robert Lequerré n'avaient pas pu faire leur deuil de leur proche.

Car il était mort lors de combats à Grundviller, en Moselle, au début du mois de juin 1940 alors que la France tentait désespérément de résister au blitzkrieg de l'Allemagne nazi sur la Ligne Maginot. Mais la défense, contournée par la Belgique, ne tiendra pas, et la nation se rend en signant un armistice avec l'Allemagne quelques jours plus tard, le 22 juin 1940.

Plusieurs voyages, mais jamais vers son île

La dépouille du caporal, qui aura sacrifié sa vie pour tenter de défendre sa patrie, sera alors déplacée de multiples fois sans jamais parvenir à retrouver son île natale et ses proches. Enterré sur le champ de bataille par les soldats allemands, il se retrouve anonyme dans une région désormais annexée par les nazis. Un an plus tard, en juin 1941, le corps du caporal Lequerré est exhumé de Grundviller par des prisonniers de guerre français du groupe des Morts Robardet pour être enterré plus céreémonieusement au cimetière militaire de Hoste-Bas, toujours en Moselle.

Le lieutenant Robardet, l'officier français - prisonnier de guerre - responsable de l'identification de tous ces soldats alors inconnus, transmet au ministère des Anciens Combattants à Paris les renseignements en sa possession sur ce caporal anonyme. Le gouvernement de Vichy arrive à identifier le jeune Tahitien et officialise son décès, le déclarant "Mort pour la France".


28 ans plus tard, en 1969, le corps est encore déplacé. Le cimetière militaire de Hoste-Bas est désaffecté et les corps des soldats français sont transférés à la Nécropole Nationale de Metz Chambière. Il y reposera pendant 45 ans, sans que sa famille à Tahiti ne sache ce qu'il était advenu de la dépouille de leur frère, fils, oncle…

Aujourd'hui il revient à son fenua

Le Tahitien, élevé près du lagon, du sable chaud et habitué à l'odeur de la "tiare", passera tout le vingtième siècle dans un cimetière de Moselle. Jusqu'à ce que les recherches de son neveu (Gérard Doucet) et petit-neveu (Yannick Lowgreen), qui ont interrogé historiens, forums spécialisés, organismes officiels, familles et bases de données généalogiques, aboutissent à retrouver le corps de ce metua qu'ils ne connaissent pas mais qui hante l'histoire familiale.

Le 15 septembre 2014, Kader Arif, secrétaire d’État aux Anciens Combattants et à la Mémoire, accède à titre exceptionnel à la requête de la famille qui demande le transfert en Polynésie des restes mortels du caporal Robert Lequerré.

C'est par le vol le vol Air France du 10 décembre 2014 que le jeune soldat retrouve enfin sa terre natale. Les honneurs militaires lui sont rendus dès son atterrissage à la Base Aérienne 190. Il sera enterré ce samedi après-midi au premier étage du cimetière de l'Uranie à Papeete, à côté de sa bien-aimée Émilie, comme s'était sa volonté. Son reliquaire recevra les hommages officiels, ceux de la famille et ceux de la population à la mairie de Papeete et au monument aux morts toute la matinée.

Il se sera passé 75 ans depuis son embarquement sur le Sagittaire, le navire qui l'emmènera vers Marseille, puis la Moselle, où il connaitra son tragique destin. Un Tahitien mort pour la France lors de la Seconde Guerre mondiale.

Qui était le caporal Robert Lequerré ?

Engagé volontaire dans l'armée française avant même la déclaration de guerre contre l'Allemagne, Robert Lequerré était connu comme étant un grand sportif. Joueur de tennis, footballeur et gardien de but, il faisait partie de l'AS Fei Pi.
Issu des familles Lequerré et Teraiamano par sa mère, il a eu trois filles, Monique, Maire et Odette. Il a aussi laissé un souvenir impérissable à ses cinq frères et sœurs : Tutu Palmer, Pauline Pietri, Arthur Lequerré, Maurice dit Momo Lequerré et Magdeleine dite Madou Doucet.

AS Fei Pi, 1934
AS Fei Pi, 1934

Le maire de Papeete, Michel Buillard, entouré de membres de la famille de M. Lequerré le 9 décembre
Le maire de Papeete, Michel Buillard, entouré de membres de la famille de M. Lequerré le 9 décembre


Rédigé par Jacques Franc de Ferrière le Jeudi 11 Décembre 2014 à 11:31 | Lu 1454 fois